Pensée militaire - Esprit de défense et presse de défense
Depuis la disparition de la conscription, on se soucie beaucoup de l’esprit de défense, concept nouveau qui a remplacé un patriotisme désuet et passablement suspect. L’institution militaire cherche des relais pour assurer la diffusion de cet esprit de défense qui ne va plus de soi, puisque la masse des Français n’a désormais plus de contact direct avec l’armée. Le phénomène doit encore s’aggraver dans les années qui viennent avec la réduction inéluctable du nombre des implantations militaires. Des villes aussi importantes que Nantes ou Montpellier n’auront désormais plus aucune présence militaire. Dans ces conditions, il est impératif de trouver de nouveaux relais, d’où la multiplication d’initiatives comme la réserve citoyenne, censée maintenir un lien entre l’armée et les civils.
L’un des problèmes principaux est l’information du public sur les questions de défense. Jamais ou presque, l’image des militaires n’a été aussi bonne dans la société, toutes les enquêtes d’opinion convergent sur ce point. Mais cela ne se traduit pas par une acceptation de la contrepartie pourtant nécessaire, à savoir la fourniture à cette armée des moyens dont elle a besoin pour remplir ses missions. Le budget de la Défense est, trop souvent, perçu comme une variable d’ajustement qui permet de limiter un déficit un peu trop voyant. Comment pourrait-il en être autrement alors qu’il n’y a plus d’ennemi désigné, l’ennemi ayant cédé la place à des menaces mal identifiées, mal comprises, donc peu propres à susciter un engagement concret ? Les médias ne font pas preuve d’un grand empressement pour porter remède à cette situation. Certains d’entre eux, et non des moindres, sont plus prompts à braquer leur projecteur sur les dysfonctionnements comme lors de la malheureuse affaire de Castres ou la tragique embuscade d’Uzbin, qu’à fournir une information objective et régulière sur les missions, les besoins, les
problèmes des forces armées.
L’explication naturelle y voit la conséquence logique d’un antimilitarisme communément répandu dans le prolétariat intellectuel qui peuple la presse parisienne. Sans doute y a-t-il une part de vérité dans cette assertion, l’antimilitarisme n’est qu’un aspect, parmi d’autres, d’un esprit post-68 qui se traduit par un rejet de toutes les institutions établies : la religion, l’État, l’armée, la famille. Mais, d’une part, ce n’est pas une règle générale ; d’autre part, ce constat sociologique n’interdit pas de mettre en évidence d’autres facteurs auxquels l’armée elle-même n’est pas nécessairement étrangère, notamment un manque d’informations sur la problématique réelle de la défense. Si les médias et l’Université se penchent peu sur la défense, c’est peut-être aussi parce que la Défense elle-même ne fait pas toujours l’effort de fournir les données nécessaires à une information objective et de qualité.
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