Octobre 2017 - n° 803

Engagement militaire : de nouvelles formes ?

« Le chef est celui qui prend tout en charge. Il dit : “J’ai été battu”. Il ne dit pas : “Mes soldats ont été battus” »

Antoine de Saint-Exupéry

La stratégie se construit sur la combinaison des temps, entre-temps long s’appuyant sur la connaissance du passé pour mieux préparer l’avenir, et temps court où l’action s’impose désormais avec en toile de fond la pression politique et médiatique sur les décideurs. C’est alors une contradiction permanente pour le commandeur confronté à des choix d’autant plus difficiles que les ressources sont comptées. Lire la suite

  p. 1-1

La Patrouille de France a commémoré le centenaire de l’entrée en guerre des États-Unis au cours d’une longue mission de présentations en vol, démontrant ainsi l’importance du lien stratégique et d’amitié qui unit nos deux pays. C’était aussi la reconnaissance du haut degré d’interopérabilité entre nos forces aériennes. Lire les premières lignes

  p. 5-9

À l’heure où la revue stratégique doit à la fois proposer une nouvelle lecture des menaces, définir notre niveau d’ambition et fixer un modèle pour nos forces, une réflexion globale sur un concept de défense adapté à notre siècle est indispensable, quitte à remettre en causes certains principes aujourd’hui obsolètes. Lire les premières lignes

  p. 11-16

Engagement militaire : de nouvelles formes ?

Les armées ont été soumises à un processus permanent de réformes ayant mis en cause les fondements du fonctionnement des forces tant au quotidien qu’en opération, avec des pertes de savoir-faire pénalisant la conduite et le soutien des unités engagées. Il faut réfléchir désormais à des approches plus innovantes et répondant aux besoins militaires. Lire les premières lignes

  p. 29-36

La Marine nationale suit avec attention les évolutions sociologiques touchant son personnel à cause des contraintes professionnelles. Celles-ci doivent être prises en compte, notamment à travers une meilleure reconnaissance par l’État et donc la nation elle-même. Lire les premières lignes

  p. 37-42

Le soldat doit rester d’abord un combattant, même si le contexte stratégique français a tendance à fusionner théâtres d’opérations extérieures et territoire national. Certes, il y a de nouvelles menaces comme le terrorisme islamiste, mais la guerre reste une réalité qu’il faut affronter, au risque de la mort. Lire les premières lignes

  p. 43-46

Le droit international condamne le recours à la force comme moyen de régler des contentieux entre États.  Il impose même des sanctions à ceux qui violeraient ce corpus doctrinal contraignant. Toutefois, face à un adversaire déterminé, le droit peut rester impuissant. Lire les premières lignes

  p. 47-55

L’incertitude est une réalité de la guerre et des opérations. Or, dans l’esprit français marqué par le cartésianisme, l’incertitude est déstabilisatrice. Pourtant, accepter celle-ci en prenant des risques se révèle souvent une des clés du succès militaire, à condition d’en avoir le courage. Lire les premières lignes

  p. 56-60

La résilience est un concept relativement nouveau dans le champ des sciences sociales et trouve toute sa pertinence notamment face au terrorisme. En effet, l’action terroriste vise à affaiblir la capacité d’une nation à résister à de telles attaques, dissociant opinion publique et autorités politiques. Développer une culture de résilience est donc indispensable. Lire les premières lignes

  p. 61-66

Les gendarmeries constituent un outil très pertinent à travers la Force de Gendarmerie européenne (FGE) pour la gestion de crise, en apportant une expertise et des savoir-faire uniques permettant de façon pragmatique des engagements pour renforcer la sécurité en Europe. Lire les premières lignes

  p. 67-72

Le mobile d’une alliance militaire contient beaucoup d’ambiguïtés par rapport à la signification spécifique contenue dans l’idée d’alliance. Participer à ce type de relations entre États signifie un certain renoncement au risque d’affaiblir la finalité d’une alliance fondée sur une défense commune. Lire les premières lignes

  p. 73-77

Le maintien en condition opérationnelle (MCO) est un enjeu majeur pour l’Armée de terre. La montée en puissance du programme Scorpion amène Renault Trucks Défense (RTD) à proposer une organisation innovante et évolutive pour répondre aux objectifs et aux besoins en opérations. Lire les premières lignes

  p. 78-82

La France et l’Espagne disposent d’une longue expérience dans le domaine des opérations amphibies avec des connaissances partagées complémentaires. Une coopération s’impose naturellement entre les deux pays contribuant à accroître ainsi une capacité européenne utile pour demain. Lire les premières lignes

  p. 83-88

La conception, le développement et l’emploi du char ont débuté au cours de la Première Guerre mondiale. Industriels privés et arsenaux d’État ont su produire des engins variés jusqu’à la nationalisation en 1936. Après-guerre, les tentatives de coopération autour d’un char commun avec l’Allemagne ont échoué jusqu’à aujourd’hui. En sera-t-il autrement demain ? Lire les premières lignes

  p. 89-96

La relance de la fabrication de munitions de petit calibre est redevenue un enjeu de souveraineté nationale. Un projet de nouvelle filière est en cours de montage avec des partenaires industriels ayant l’ambition de répondre aux besoins opérationnels de nos armées et de nos forces de sécurité. Lire les premières lignes

  p. 97-101

Approches régionales

La question démographique reste un enjeu majeur en Asie du Sud en modifiant peu à peu des équilibres déjà fragiles avec les cohabitations complexes entre les religions, dont l’hindouisme et l’Islam, mais aussi entre les ethnies, au risque de mouvements migratoires incontrôlables. Lire les premières lignes

  p. 105-109

Repères - Opinions

Les empires sont de retour. Pas ceux démantelés à l’issue de la Seconde Guerre mondiale et les conflits de décolonisation mais de nouveaux empires traduisant des ambitions souvent déstabilisatrices. Avec une démographie encore forte, la Chine est le premier exemple d’une puissance impériale en pleine expansion. Lire les premières lignes

  p. 110-115

Depuis des décennies, le porte-avions a démontré sa pertinence dans les opérations, en étant à la fois un outil tactique efficace, mais aussi un instrument stratégique indispensable pour soutenir une politique étrangère crédible face à des adversaires potentiels. Lire la suite

  p. 116-118

Chroniques

Plus de vingt ans après les faits, le général d’armée Bachelet, bien connu des lecteurs de la Revue Défense Nationale a pris la plume pour porter témoignage de son commandement du secteur de Sarajevo (1), exercé au cours du second semestre 1995. Il s’agit d’un récit de première main, captivant, très riche et d’un style enlevé d’un indiscutable succès des armes de la France, puisque c’est sous son commandement que le siège de cette ville emblématique a été levé. Lire la suite

  p. 122-123

Recensions

Pierre Servent est une fin connaisseur de la question militaire, à la fois comme praticien, acteur et observateur. Sa longue expérience tant des opérations que du milieu lui-même lui permet un regard pertinent sur le lien plus ou moins étroit entre le pouvoir politique et le monde des Armées. Son dernier ouvrage est à la fois un parcours dans l’histoire de la Ve République mais aussi un témoignage de l’intérieur – comme conseiller, porte- parole ou encore comme officier – et également de l’extérieur – comme journaliste et analyste des questions de défense. Lire la suite

  p. 124-127

Guillaume Ancel : Vent glacial sur Sarajevo  ; Les Belles Lettres, Clermont-Ferrand, 2017 ; 217 pages - Thibault Lavernhe

Après un premier roman tiré de son expérience opérationnelle au Rwanda (1), Guillaume Ancel livre ici un témoignage historique de première main en nous plongeant dans le Sarajevo assiégé du premier semestre 1995. En adossant un travail de mémoire décantée à son journal de bord personnel et à une série d’entretiens, l’auteur fait renaître sous les yeux du lecteur le quotidien du capitaine Ancel, chef de l’équipe de guidage au sol des frappes aériennes inséré au sein du bataillon d’infanterie n° 2 (Batinf 2) de la force de protection de l’ONU (Forpronu), alors armé par le 1er REC et basé sur l’aéroport de Sarajevo encerclé par les forces serbes depuis 1992. Lire la suite

  p. 127-129

Pierre Verborg : Envoyez les hélicos !  ; Éditions du Rocher, 2015 ; 228 pages - Pascal Lecardonnel

« L’aviation légère de l’Armée de terre est l’arme de l’urgence ». Ces mots du colonel Pierre Verborg, chef du premier groupement aéromobile (GAM), désignent parfaitement le caractère de cette unité d’hélicoptères performante et redoutable à laquelle les autorités font appel quand « la guerre s’enlise » et que les argentiers commencent à faire les comptes. L’auteur en profite pour dénoncer les restrictions budgétaires, déjà en 2011, qui ne permettaient pas d’équiper tous les appareils d’ancienne génération avec le système de leurrage automatique, essentiel à leur protection lorsqu’ils subissaient des tirs de missile. Lire la suite

  p. 129-130

Constance Arminjon Hachem : Les droits de l’Homme dans l’islam shi’ite  ; Éditions du Cerf, 2017 ; 400 pages - Serge Boidevaix

L’article 55, alinéa C de la Charte des Nations unies demande à l’organisation internationale d’assurer le respect universel et effectif des droits de l’homme. C’est le fondement juridique de nombreuses interventions occidentales. Cette obligation favorise-t-elle une antinomie ou une concordance entre le droit islamique et le droit international des droits de l’Homme et même entre l’Islam et la modernité. Telle est la question que tente de résoudre Constance Arminjon Hachem dont on connaît la thèse qui fait autorité sur chiisme et État dans un livre érudit qui analyse le passé et le présent de l’Islam. Lire la suite

  p. 139-132

Revue Défense Nationale - Octobre 2017 - n° 803

Engagement militaire : de nouvelles formes ?

The Patrouille de France, the French Air Force aerobatic team, commemorated US entry to the Great War a hundred years ago through a long programme of flying displays in demonstration of the importance of the strategic and friendly links that unite the two countries. It was also a demonstration of the high degree of interoperability between the two air forces.

A modern strategic review must necessarily offer a new perspective on threats. It is therefore essential to take a broad look at a concept for defence adapted to the current century if we are to define an appropriate level of ambition and to establish the appropriate model for our forces: this will mean calling into question a number of now-obsolete principles.

New Outlines for Military Commitments?

The armed forces have long been subjected to a continual succession of reforms that have called into question the very foundations of how those forces function on a day-to-day basis, as well as on operations. These reforms have led to loss of expertise, which is in turn penalising the conduct and support of the units committed. There is now a need to look for more innovative approaches that respond to military requirements.

The French Navy, the Marine Nationale, is closely following the sociological developments that affect its manpower because of constraints imposed by the profession. The latter need to be taken into account through better recognition by state bodies in particular and, more generally, by the whole nation.

Although the current French strategic context is tending to blend overseas theatres of operations with what is happening domestically, the fact remains that the combat soldier must remain above all a fighter. There are, of course, new threats, such as Islamist terrorism, but war remains a reality that has to be confronted at the risk of death.

International law condemns the use of force as a means of resolving disputes between states, and goes as far as imposing sanctions on those who might choose to violate this limiting doctrinal corpus. Nevertheless, in the face of a determined adversary, the law becomes impotent.

Uncertainty is one of the realities of war and operations and yet in the highly Cartesian French mind uncertainty is a destabilising factor. Having the courage to grasp that very destabilising factor whilst at the same time taking risks can often be the key to military success.

Resilience is a reasonably new concept in the field of social sciences. It takes on relevance in the face of terrorism in particular, since terrorism aims at weakening the capability of a nation to resist such attacks and setting public opinion against the political authority. It is therefore essential to develop a culture of resilience.

The European Gendarmerie Force (EUROGENDFOR) demonstrates the relevance and usefulness of gendarmeries in crisis management through the unique expertise and knowhow they bring into play. They represent a pragmatic manner of force commitment to strengthening security in Europe.

Motives for a military alliance have in them many ambiguities when compared with the specific meaning as stated in the concept of the alliance. Participation in this type of relationship between states means a degree of acceptance of the risk of weakening the ultimate aim of an alliance founded on common defence.

Maintenance in operational condition is a major challenge for the army. The arrival of the Scorpion programme is leading Renault Trucks Défense to suggest an innovative organisation that can be developed over time to respond to aims and needs on operations.

France and Spain have considerable experience in amphibious operations, which benefit from complementary and shared knowledge and capabilities. The natural cooperation between the two countries that flows from this is contributing to the acquisition of a European capability for use in the future.

The design, development and employment of the tank began during the First World War. Private and state industries produced a variety of machines up to nationalisation in 1936. Since the Second World War, attempts to cooperate with Germany on a common tank have hitherto failed. Might it be different in the future?

Restarting the manufacture of small-calibre munitions has again become a question of national sovereignty. An outline for this new industry is currently being drawn up with industrial partners, with the aim of responding to the operational needs of our armed and security forces.

Regional Approaches

Demography represents a major challenge in South Asia. It is gradually altering already delicate balances in the complex relationships between religions (including Hinduism and Islam) and races, and risks leading to uncontrollable migratory movements.

Opinions and Viewpoints

Empires are back. Not those that were dismantled as a result of the Second World War and the wars that led to decolonisation, but new ones often driven by destabilising ambitions. With its strong demography, China is the prime example of an imperial power in full expansion.

The aircraft carrier has for decades demonstrated its value in operations. It is an effective tactical tool and also an essential strategic instrument for upholding a credible foreign policy with regard to potential adversaries. Read more

Chronicles

Book reviews

Guillaume Ancel : Vent glacial sur Sarajevo  ; Les Belles Lettres, Clermont-Ferrand, 2017 ; 217 pages - Thibault Lavernhe

Pierre Verborg : Envoyez les hélicos !  ; Éditions du Rocher, 2015 ; 228 pages - Pascal Lecardonnel

Constance Arminjon Hachem : Les droits de l’Homme dans l’islam shi’ite  ; Éditions du Cerf, 2017 ; 400 pages - Serge Boidevaix

Revue Défense Nationale - Octobre 2017 - n° 803

Engagement militaire : de nouvelles formes ?

La stratégie se construit sur la combinaison des temps, entre-temps long s’appuyant sur la connaissance du passé pour mieux préparer l’avenir, et temps court où l’action s’impose désormais avec en toile de fond la pression politique et médiatique sur les décideurs. C’est alors une contradiction permanente pour le commandeur confronté à des choix d’autant plus difficiles que les ressources sont comptées.

À cet égard, le choix de Paris 2024 en est une illustration paradoxale. Au regard du tempo des chaînes d’informations continues, 2024 c’est encore très loin ! Mais pour ceux qui vont conduire le projet, la course contre le chronomètre est désormais engagée.

Il en est de même pour l’outil de défense de notre pays, engagé au quotidien dans la protection des Français, de nos intérêts et de nos valeurs, avec des contraintes telles qu’elles se sont cristallisées en juillet en une crispation politique. En même temps, il s’agit de préparer cet outil pour répondre aux menaces de demain, dans un monde en déséquilibre où désormais les ambivalences alimentent les surprises stratégiques. C’est l’objet des travaux en cours qui vont définir les ambitions et les moyens nécessaires, avec un calendrier lui-même sujet à discussion, voire à l’inquiétude, si les retards s’accumulent en particulier pour les programmes d’armement, d’autant plus que les lacunes capacitaires clairement identifiées depuis des années sont hélas une réalité pressante pour les forces très fortement sollicitées depuis plusieurs années.

La revue stratégique en cours, suivie ensuite par la Loi de programmation militaire 2019-2024, doit permettre cette réflexion sur la notion d’engagement dont les formes sont autant individuelles que collectives. C’est le sujet de ce dossier de rentrée proposant des approches, très différentes à première vue mais très complémentaires, pour illustrer cette convergence des efforts, avec une évidence commune, la réalité de la violence de la guerre – quelle qu’en soit sa forme. Les attaques terroristes djihadistes démontrent ainsi cette volonté, non seulement de tuer, mais également de remettre en cause – par le sang – notre modèle politique, social et culturel.

Mais il ne faut pas oublier que d’autres incertitudes stratégiques pèsent sur notre défense et notre sécurité. La résurgence d’empires aux exigences nationalistes revendiquées souvent pour renforcer la cohésion interne incite ainsi à accroître les tensions d’autant plus que la prolifération nucléaire et balistique a été de facto relancée avec la crise nord-coréenne. La notion de rapport de force – le « hard power » – oubliée par ceux qui croyaient aux dividendes de la paix – et au « soft power » – reste indéniablement l’un des éléments de régulation des relations internationales. Cela exige donc un effort réel pour notre pays pour qu’il puisse rester un acteur crédible sur la scène internationale, maître de son destin tout en proposant un modèle d’engagement au service de la paix.

 

Jérôme Pellistrandi

Revue Défense Nationale - Octobre 2017 - n° 803

Engagement militaire : de nouvelles formes ?

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