Revue Défense Nationale - Novembre 2006 - n° 691
La revue Défense nationale et sécurité collective consacre deux numéros par an à l’Europe de la défense, ce qui traduit un des fondements de la politique de défense de la France. Il reste que cet engagement n’est pas unique, et que les plus hautes autorités civiles et militaires rappellent régulièrement la place de la France dans l’Otan : l’Alliance et l’Union européenne ne sont pas exclusives l’une de l’autre, ainsi que l’a bien expliqué André Dumoulin (1). Cela ne veut pas dire non plus qu’il faille aller vers une fusion, voire une confusion.
La France agit en fait selon une démarche pragmatique, dans l’une comme dans l’autre institution. Ce pragmatisme contraste évidemment avec le dogmatisme qui était prêté à la « grande nation », selon le mot ironique des Allemands. Qu’il s’agisse des opérations, de la NRF ou de l’interopérabilité, les dossiers sont nombreux où la France épouse et soutient les positions de l’Alliance. Celle-ci est en effet un formidable laboratoire de procédures communes qui permettent la progression des armées : la certification à venir du Corps de réaction rapide-France (CRR-Fr) en est le meilleur exemple.
Cela ne veut pas dire pour autant que la France est d’accord sur tout : à l’Otan comme dans les autres organisations internationales, le consensus prévaut. Et si 95 % des remarques françaises sont adoptées par l’Otan, d’abord parce qu’elles améliorent les textes, 5 % font l’objet de débats très vigoureux, voire heurtés.
Il paraît donc utile que DN & SC consacre, une fois l’an, un dossier à l’Otan : cela permettra de mieux connaître ce qui s’y passe, d’identifier les vrais enjeux, de comprendre les positions des uns et des autres. Il s’agira de naviguer entre deux écueils : une opposition systématique et doctrinaire, qui était celle sur laquelle la France s’est cantonnée de longues années : ce temps est révolu depuis les évolutions de 1996 puis de 2003, et notre pays affiche maintenant une relation apaisée avec l’organisation. Cet apaisement ne signifie pas non plus de tout abandonner, ce qui est l’autre risque dans lequel certains tombent parfois : impressionnés par l’efficacité de l’Otan, voulant bonifier une réputation d’éternel opposant, ils transigent pour montrer qu’ils sont de « bons élèves ». On doit continuer de défendre les positions nationales, ce que nos partenaires n’hésitent pas à faire. Finalement, il faut éviter la paranoïa comme le syndrome de Stockholm : c’est l’ambition de ces dossiers que d’y aider.
Ce premier opus paraît avant le Sommet de Riga (qui sera l’occasion d’un article à paraître ultérieurement). Il permettra de faire le point du rôle de l’organisation en Europe et dans le monde. Ainsi, Barthélemy Courmont commencera par rappeler comment la France conçoit l’articulation entre l’Otan et l’Europe de la défense, notamment en matière de lutte contre le terrorisme : cette question-clef est au cœur de l’avenir de la relation transatlantique. Olivier Kempf évoquera les opérations de l’Otan en 2006 et pourquoi ce qui se passe sur le terrain engage l’avenir de l’Alliance. Enfin, l’amiral Jean Dufourcq dialoguera avec Peter Faber afin de comprendre les points de vue qui existent des deux côtés de l’Atlantique, et d’apprécier à quels points ils sont finalement assez proches. Ce plaidoyer en faveur d’un dialogue renouvelé évoque des voies d’amélioration, dont certaines risquent d’ailleurs de susciter la polémique. Au moins cela permettra de féconder le débat, à l’aube d’un sommet important. ♦
(1) « La France et l’Otan, entre méfiance politique et rapprochement doctrinal », DN & SC, mai 2006.
Olivier Kempf
Revue Défense Nationale - Novembre 2006 - n° 691
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