Dans la Revue nationale stratégique, le président de la République, chef des armées, nous avertit : « Nous sommes à un point de bascule. » Le mouvement du monde s’accélère, le recours à la force devient la norme, le droit international est de plus en plus souvent bafoué et la violence s’installe inéluctablement. Dans le même temps, les évolutions technologiques s’invitent sur les champs de bataille qu’elles modifient : attaques cyber, usage de l’Intelligence artificielle (IA), recours à des intermédiaires (proxy) et autres cercles criminels. Ces nouvelles conflictualités franchissent les frontières et s’installent au cœur de nos sociétés, où les citoyens deviennent des cibles à part entière.

De fait, différents domaines deviennent de possibles théâtres d’affrontement, parfois en deçà du seuil de déclenchement de la force : le monde économique, le tissu social et informationnel en sont des exemples patents. Ces espaces se transforment en champs de bataille hybrides, où actions numériques et physiques s’articulent et se renforcent mutuellement.

Tout ce qui peut affaiblir la cohésion de la Nation est exploité par nos adversaires : la criminalité organisée et le narcotrafic, le séparatisme et la contestation de notre souveraineté dans l’hexagone et nos outre-mer, les manipulations de l’information, les cyberattaques, les ingérences, les instruments juridiques dévoyés. Face à la généralisation de ces modes opératoires hybrides, nous devons revoir nos cadres de pensée anciens, observer lucidement la réalité du monde et adapter notre pensée, nos méthodes et nos outils.

Cette lucidité acquise, il nous faut agir pour mieux comprendre notre environnement stratégique. Ce défi est majeur et ne peut être relevé isolément. Il impose une mobilisation collective de toutes les forces vives de la Nation : institutions, praticiens, chercheurs. C’est pourquoi la Gendarmerie nationale a choisi, de longue date, de travailler en synergie avec le monde académique, que ce soit au travers de chaires de recherche, de son centre d’études ou encore du MBA de la Gendarmerie.

Aujourd’hui, nous avons l’honneur de porter, avec les Universités de Boulder, de New Ulm, de l’IAE de Paris 1 Panthéon-Sorbonne le colloque académique du Paris Defence Strategy Forum (PDSF), dont l’ambition est de croiser les expertises et de contribuer de façon décisive au renouvellement de la pensée stratégique dans les domaines de la sécurité et de la défense. En attendant son édition 2026, ce numéro vous propose une sélection d’articles issus du colloque académique interdisciplinaire qui s’est déroulé à l’occasion du PDSF 2025. Ces contributions explorent des champs variés et essentiels : stratégies et modalités d’attaques cyber, nouveaux modes opératoires de groupes violents et terroristes, management des ressources humaines, systèmes d’information de pointe, IA ou encore constellations satellitaires. Autant de thèmes étudiés par des chercheurs de plusieurs nationalités, qui enrichissent notre réflexion collective.

Penser la stratégie, c’est savoir innover et s’adapter à la hauteur des périls. C’est le défi que nous devons relever collectivement, afin de préserver la souveraineté et la sécurité de nos nations dans un monde toujours plus incertain. Gardons toujours présent à l’esprit que si seul on va plus vite, c’est ensemble que l’on va le plus loin ! ♦