Politique et diplomatie - Vietnam : Washington et les problèmes du retour à la paix
Pour la Maison Blanche, l’année 1966 s’annonce lourde. Sur le front intérieur, des échéances importantes interviendront : en novembre, les électeurs devront élire une nouvelle Chambre des Représentants et désigner 35 sénateurs. Les résultats des élections sénatoriales à un certain nombre de postes-clés, par exemple dans les États de New York, de Californie, du Michigan, de l’Illinois, permettront de faire des pronostics sur le candidat du parti républicain aux élections présidentielles de 1968. En d’autres termes, l’année 1966 aura des répercussions décisives sur la stratégie qu’adoptera l’Administration en politique intérieure.
D’autre part, dans l’ordre de la politique extérieure, cette même année 1966 sera d’une importance capitale pour l’Administration du Président Johnson. Bien entendu, c’est aux décisions relatives à la guerre du Vietnam et plus généralement à la politique asiatique de Washington que je fais ici allusion. En effet, dans les derniers jours de 1965, il apparaissait évident que, contrairement aux prévisions ou plutôt aux affirmations optimistes des milieux officiels américains, la guerre ne pouvait indéfiniment demeurer au « palier » qu’elle avait atteint. À la fin décembre, les forces terrestres des États-Unis au Vietnam atteignaient près de 200 000 hommes. À défaut d’une cessation des combats, ces effectifs devraient être portés à 300 000 hommes à la fin de janvier, puis, progressivement à 400 000, voire à 500 000 hommes.
Or, l’augmentation de l’effort militaire américain ne peut manquer d’avoir des conséquences financières, économiques et sociales d’ordre interne. Financièrement, l’inflation dont on a déjà signalé les prodromes, pourra difficilement être contenue. Si la guerre devait se poursuivre, les dépenses militaires des États-Unis seraient augmentées pour l’année à venir d’au moins 15 milliards de dollars, peut-être 20 milliards. Le marché du travail aux États-Unis se trouverait encore resserré par la mobilisation d’une partie de main-d’œuvre. Or, en 1965, depuis le début de l’engagement massif des États-Unis au Vietnam, le nombre des chômeurs aux États-Unis a atteint son point le plus bas depuis 1957. Une restriction des disponibilités de main-d’œuvre accentuerait la tendance à l’inflation. D’une manière générale, si la guerre exigeait dans les mois qui viennent la mobilisation de ressources nouvelles matérielles et humaines, la promesse de réaliser aux États-Unis une « grande société » pourrait être retardée sinon compromise. Les impôts devraient être augmentés en même temps que le Gouvernement s’efforcerait de bloquer les prix pour résister à l’inflation, toutes mesures impopulaires.
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