Aéronautique - Le Salon de Farnborough - Les forces aériennes stratégiques dix ans après - 3 000 heures de vol pour Concorde - Point des essais pour l'Alphajet - CFM56 : moteurs de démonstration en fonctionnement cette année - Un rotor de conception nouvelle
Le Salon de Farnborough
Cette manifestation traditionnelle s’est déroulée du 1er au 8 septembre 1974. Strictement réservé jusqu’alors aux productions britanniques, le « Display » était, pour sa troisième édition, ouvert aux exposants étrangers. À cette invitation internationale ont répondu environ cent cinquante firmes étrangères, le reste des quatre cents stands étant constitué par les firmes britanniques. L’exposition statique regroupait une cinquantaine d’appareils. Des conditions météorologiques particulièrement maussades (rares éclaircies mais nombreuses averses ou plafond bas et pluie continue) n’ont cependant pas empêché les présentations en vol de se dérouler comme prévu chaque après-midi. Un accident mortel a endeuillé la présentation des hélicoptères, celui du S-67 Blackhawk qui s’est écrasé au sol après deux tonneaux exécutés à très basse altitude. Deux faits particulièrement remarquables ont été le vol record de l’avion de reconnaissance stratégique américain Lockheed SR-71 Blackbird qui a effectué le trajet New York-Londres en une heure cinquante-cinq minutes, soit à la vitesse moyenne de 2 924 km/h. et la traversée sans ravitaillement en vol de l’Atlantique, soit 5 000 km, par le McDonnell Douglas F-15 Eagle biplace (TF-15) grâce à de nombreux réservoirs supplémentaires plaqués sur le fuselage qui ont en particulier l’avantage de ne pas modifier sensiblement les performances de l’appareil. La présentation en vol de l’avion américain a été particulièrement remarquable, sans éclipser toutefois celles des Hawker Harrier et de l’Alphajet ou des SAAB Viggen, également qualifiées de brillantes par les commentateurs. L’avion d’entraînement anglais Hawk, au nombre d’heures de vol limité, fit une présentation prudente. Au sol on pouvait remarquer les panoplies d’armement du Jaguar dans sa version « internationale », de l’Alphajet et le Lockheed SA-3 Viking.
Les hélicoptères remarqués ont été le Dauphin de l’Aérospatiale, le Bo-105 de MBB, l’Augusta A109 Hirundo biturbine italien, la version militaire du Lynx de Westland. Côté avions de transport civils et militaires, outre le Concorde, l’Airbus et la série des Dassault Mystère 10, 20 et 30, on remarquait la version militaire du Boeing 747 (B-747 MF) capable de transporter plus de 110 tonnes sur 6 800 km, le Short SD3-30 Skyvan, le Nimrod MK-2 de reconnaissance maritime.
On notait enfin la présence de missiles tels que la version submersible du Martel ou Submartel, le Matra Magic R-550, le Jumbo air-sol de MBB pour le MRCA (Multiple Role Combat Aircraft) [NDLR 2024 : Futur Panavia Tornado], le Harpoon missile antinavires de McDonnell Douglas, et les missiles italiens air-air Aspide et mer-mer héliporté Marte.
Les Forces aériennes stratégiques (FAS) dix ans après
Le 17 février 1964 le premier Mirage IV de série, aux mains de l’équipage de marque, atterrissait à Mont-de-Marsan, complétant ainsi l’expérimentation et la mise au point du système d’armes commencées quelques années plus tôt sur les trois prototypes opérationnels.
Le 1er juin 1964 était créé sur cette même base aérienne le premier escadron de Mirage IV et quatre mois plus tard, le 1er octobre, le tandem C-135 ravitailleur et Mirage IV portant son arme nucléaire prenait pour la première fois l’alerte opérationnelle.
Pour célébrer le 10e anniversaire de la mise sur pied effective dans l’Armée de l’air des FAS, une cérémonie s’est déroulée le 13 septembre 1974, sur la base aérienne de Mont-de-Marsan, au sein de la 91e Escadre de bombardement.
Présidée par le général d’armée aérienne Grigaut, Chef d’état-major de l’Armée de l’air (CÉMAA), cette cérémonie, à laquelle assistaient, entre autres nombreuses personnalités civiles et militaires, les anciens commandants de la force, les généraux d’armée aérienne Philippe Maurin et Jacques Mitterrand, fut l’occasion pour le général de corps aérien Saint-Cricq, actuel commandant des FAS, d’évoquer les souvenirs des disparus, dont le général Madon qui le précéda à ce poste, et de rappeler le travail effectué par les « pionniers » qui eurent à œuvrer avec ténacité et efficacité pour donner aux forces aériennes stratégiques leur place dans notre système militaire de défense.
Dans son allocution le général Saint-Cricq souligna que pendant ces dix années écoulées la composante pilotée de la Force nucléaire stratégique (FNS) a maintenu l’alerte opérationnelle sans la moindre solution de continuité sur chacune de ses bases de stationnement, chargée qu’elle fut d’ouvrir la première la reconversion des forces armées sur armement nucléaire dans les domaines de l’emploi, de la maintenance, de la protection et de la mise en condition opérationnelle et d’assumer seule pendant huit ans la dissuasion nucléaire.
Le bilan des résultats publiés fait foi du travail accompli par tous : 200 000 h de vol de Mirage IV, 100 000 h de vol de C-135, 40 000 h de ravitaillement en vol, 300 équipages transformés, autant d’exemples qui sont l’illustration concrète de l’aptitude opérationnelle de cette force dont le taux de disponibilité est du plus haut niveau.
Le général Grigaut retraça l’historique des FAS en indiquant leur évolution constante depuis leur création : en 1964-1965 mise en place des unités Mirage IV et C-135, modification de la flotte Mirage IV en version basse altitude en 1968. À la même époque, dotation des escadrons en armes nucléaires d’une deuxième génération. En 1971, mise sur pied des unités de tir SSBS (Sol-sol balistique stratégique) sur le plateau d’Albion en Haute-Provence, constituant la deuxième composante de la FNS. Enfin, plus récemment, capacité accrue dans le domaine de la pénétration par les Mirage IV dotés d’équipements complémentaires de guerre électronique et, pour partie de cette flotte, possibilité d’effectuer des missions de reconnaissance stratégique.
Dans sa conclusion, le CÉMAA insista devant une nombreuse assistance sur le rôle essentiel que l’Armée de l’air, et singulièrement les FAS, ont joué et doivent continuer à assurer dans notre système de défense, fondé sur la dissuasion, elle-même garante de la paix dans l’indépendance nationale.
3 000 heures de vol pour Concorde
Le deuxième Concorde de série est retourné à sa base de Fairford dans le Gloucestershire, après une tournée très satisfaisante au Moyen-Orient et une visite à Singapour. Au cours de ses 39 jours de séjour à l’étranger, l’avion a effectué 41 vols d’essais ou de démonstration, accumulant au total 75 heures de vol, dont 21 à des vitesses supersoniques, y compris 18 h 30 à Mach 2 et plus. La proportion relativement faible des heures en supersonique est due au fait que de nombreux vols d’essais dans le golfe Persique et à Singapour ne nécessitaient pas des vitesses supersoniques.
L’avion a effectué quatre vols sans escale sur des étapes significatives : Londres-Téhéran, Bahreïn-Singapour, Singapour-Bahreïn, Bahreïn-Londres. À chacun de ces vols, Concorde a de nouveau montré son aptitude à réduire considérablement les temps actuels de vol en subsonique, même sur des étapes où il est nécessaire d’effectuer une bonne partie du vol à vitesse subsonique.
Pendant qu’il était à Singapour, l’avion a effectué plusieurs vols d’essais pour établir les trajectoires à suivre à l’arrivée et au départ.
Ce périple a constitué une autre étape satisfaisante du développement en vol de Concorde, fournissant des éléments très utiles pour le programme de certification, et il a procuré aussi l’occasion de présenter Concorde aux personnalités influentes des milieux gouvernementaux, des compagnies aériennes et des affaires.
Le 13 septembre, alors que l’avion n° 2 rentrait en Angleterre, le cap des 3 000 heures de vol réalisées par les Concorde au cours d’essais en vol a été atteint. Il représente 1 373 vols comportant près de 1 000 heures en régime supersonique.
|
Concorde |
Avion subsonique |
Londres - Téhéran |
3.25 |
5.30 |
Bahrein - Singapour |
3.46 |
7.40 |
Singapour - Bahreïn |
3.40 |
7.40 |
Bahrein - Fairford |
4.12 |
6.30 |
Actuellement, les avions 01 et 02 de présérie ont à leur actif 457 heures (186 en supersonique) en 197 vols et 505 heures (226 en supersonique) en 184 vols, tandis que le prototype 001 a été remis au Musée de l’Air le 19 octobre 1973 avec 812 heures (255 en supersonique) en 397 vols et que le 002 a pratiquement terminé sa mission avec 835 heures (173 en supersonique) en 437 vols.
Les deux premiers avions de série, le n° 1 et le n° 2, comptent à la mi-septembre respectivement 187 heures (53 en supersonique) en 76 vols et 201 heures (59 en supersonique) en 84 vols ; deux autres Concorde de série voleront dans deux ou trois mois.
Concorde impressionne par la précision de sa navigation qui lui confère une ponctualité sans précédent chez les long-courriers. Ses excellentes performances augurent bien de son avenir ; mais même si l’on est tenté d’en conclure qu’il est désormais bon pour le service, il ne faut pas oublier qu’il doit d’abord compléter ses épreuves de certification. Dans le cas d’un avion à la technologie aussi poussée, cette phase finale des essais suit un processus rigoureux qui doit établir point par point la fiabilité de chaque élément et de chaque système et qui, par conséquent, s’étend sur une période de plusieurs mois.
Les services officiels et les constructeurs français et britanniques ont tenu à faire de Concorde un avion dont la sécurité est au moins aussi grande que celle des appareils subsoniques actuellement en service. De ce fait, lorsque Concorde recevra son certificat de navigabilité l’an prochain, au terme d’un long et minutieux programme d’essais de l’ordre de 4 000 heures de vol qui aura permis de défricher le domaine du vol supersonique appliqué à l’aviation commerciale, ce sera l’avion le plus testé du monde !
Une bonne partie de la certification est déjà acquise grâce aux essais de fatigue et aux essais statiques, ainsi qu’aux épreuves en vol ; mais le certificat de navigabilité n’est délivré que lorsqu’un avion a entièrement satisfait aux examens de ses qualités qui portent sur les cas normaux de vol et de vie à bord, les cas de pannes dans tous les systèmes et les procédures de secours.
De façon générale, on peut dire que les tâches qui restent à accomplir reposeront essentiellement sur les deux premiers avions de série, certaines épreuves pouvant être confiées aux 01 et 02 de présérie, tandis que les 3 et 4 de série auront la charge des vols d’endurance et de l’entraînement des équipages d’Air France et de British Airways.
Par exemple, le premier appareil de série s’emploiera à la définition finale et à la certification de la régulation des entrées d’air des réacteurs dont l’ajustement automatique aux conditions de vol, beaucoup plus étendues que pour les subsoniques, a constitué le problème le plus complexe des aérodynamiciens et des électroniciens. Le 01 de présérie a beaucoup travaillé pour la mise au point de la loi de régulation des entrées d’air, mais le 1 est le premier avion à être équipé du système complet comprenant en particulier le dispositif automatique de test embarqué.
Le système de carburant, qui a des fonctions toutes nouvelles dans Concorde, servant en quelque sorte de radiateur pour le refroidissement de certaines parties de l’avion en vol bisonique tandis que l’on utilise le déplacement de l’avant vers l’arrière ou vice-versa de quantité de combustible pour recaler le centre de gravité de l’avion selon les phases du vol, doit aussi être certifié. Il en va de même pour les centrales inertielles de navigation, les commandes de vol, la génération hydraulique, les installations électriques, la radio, le dégivrage, le drainage, le conditionnement d’air, la protection contre les incendies et contre les projections d’eau.
On consacrera par exemple 10 heures à des essais par temps froid humide, visant notamment le comportement sur neige fondante. C’est très important, car l’eau projetée sur le train d’atterrissage au décollage se transforme rapidement en glace et risque de gêner son fonctionnement. Pour ces essais, le train sera muni de protections anti-projections qui auront été certifiées auparavant sur piste inondée.
Une soixantaine d’heures seront affectées à la certification du système d’atterrissage tout temps catégorie 3 avec les centrales Litton et Carousel. On effectuera une trentaine d’heures d’essais en givrage tropical ; il faudra faire également des vols de qualification de bruit.
Autre point important qui est sans doute la première étape d’une technologie nouvelle : Concorde peut voler avec des freins en acier, mais on a trouvé qu’avec les freins au carbone l’usure était moins rapide et, surtout, on pouvait réaliser un allégement de 300 kg. Le 02 a été équipé de ces freins et des essais ont débuté à la fin du mois d’août. Ils dureront environ 150 heures.
Le n° 2 de série, au cours de sa tournée au Moyen-Orient, a subi des températures au sol s’élevant à 47° centigrades pendant lesquelles on a pu vérifier le bon fonctionnement des réacteurs, de la climatisation et de tous les systèmes ; de même le 02 avait été soumis aux grands froids de l’Alaska l’hiver dernier.
Dans cette minutieuse tâche de mise au point que constitue le programme des essais de Concorde, le simulateur a joué un rôle très important, tant pour la préparation des équipages que pour l’étude du comportement de l’avion et de ses systèmes. Remis au standard des avions de série, le simulateur continue d’apporter une contribution appréciable. Le travail effectué sur le simulateur de Toulouse pour la certification des qualités de vol et de l’ensemble de pilotage automatique (en route et atterrissage tout temps) est très satisfaisant. Les essais de précertification effectués ont permis de trier, parmi les innombrables cas de vol à examiner d’après les standards du transport supersonique, les points les plus critiques qui devront être soumis à un contrôle en vol ou sur simulateur. Cela représente une économie substantielle de temps et d’argent.
La certification de Concorde sera l’aboutissement d’un travail long et ardu, reflet des qualités de créativité et de réalisation des industries aéronautiques françaises et britanniques qui affirment ainsi leur volonté de reprendre une part du marché mondial des avions long-courriers.
Pour mesurer l’importance de ce marché, rappelons que les achats des compagnies aériennes du monde entier, pour les seuls avions à réaction subsoniques, se sont élevés en une quinzaine d’années à plus de 50 milliards de francs !
Point des essais pour l’Alpha Jet
À la date du 11 septembre, les trois premiers prototypes du biréacteur d’école et d’appui-feu avaient totalisé 202 sorties représentant 249 h 40’ de vol. Le domaine des essais a permis d’atteindre l’altitude de 45 000 pieds, la vitesse de Mach 0,95 et une vitesse de 500 nœuds près du sol. Des essais avec charges ont également été réalisés dans tout le domaine rendu possible par les moteurs Snecma/Turboméca Larzac de la première génération, développant 1 180 deca Newtons. Il convient de noter que, lors de tels essais, des décollages ont pu être réalisés au poids de 6,8 tonnes ; du fait que ces vols ne prévoyaient pas de largage de charges extérieures, des atterrissages ont été faits à plus de 5 t. En juillet 1974 a été effectuée une première tranche d’essais de vrilles. Un deuxième cycle en configuration standard de l’avion-école a repris le 10 septembre et se poursuit à l’heure actuelle. Les moteurs de la première génération (1 180 daN) ont été utilisés seuls jusqu’en juillet. À cette date, deux réacteurs de la deuxième génération ont été livrés par les motoristes et ont permis de commencer des essais en vol avec une poussée portée à 1 250 daN. Une troisième phase d’essais en vol sera entreprise ultérieurement avec les moteurs au stade définitif de performance (1 318 daN). Dès à présent, les essais effectués au banc sur les moteurs dans cette dernière définition ont permis d’atteindre une poussée de 1 340 daN et ont démontré un comportement très satisfaisant. D’autre part, un texte de protocole intergouvernemental, libérant la phase d’industrialisation, a été communiqué et permet d’espérer que la décision d’aborder cette phase industrielle interviendra dans un futur proche.
CFM56 : moteurs de démonstration en fonctionnement cette année
Deux moteurs de démonstration du nouveau moteur civil de la classe des 10 t, CFM56, étudiés par la Snecma et General Electric, commencent leurs essais au banc, l’un à Cincinnati chez General Electric depuis le mois de juin, et le second à la Snecma (Melun-Villaroche), avant la fin de l’année. Les deux sociétés coopérantes annoncent que la certification est actuellement prévue en décembre 1977 pour une mise en service au cours du deuxième semestre de 1978.
Récemment, les caractéristiques principales de ce réacteur ont été précisées : d’un poids de 1 746 kg, le CFM56 a une longueur de 2,32 mètres et un diamètre maximal de 1 813 m. Développant une poussée au décollage de 10 t, ce réacteur a un taux de dilution de 6. Le CFM56 est constitué d’une soufflante frontale à un étage (étudiée et expérimentée par la Snecma et caractérisée par un haut rendement associé à un faible niveau de bruit), un compresseur « basse pression » à trois étages (dont la Snecma a également la responsabilité), un compresseur « haute pression » à neuf étages (General Electric), une chambre de combustion annulaire (General Electric) et une turbine « haute pression » refroidie mono-étage (General Electric), une turbine « basse pression » à quatre étages (Snecma).
Rappelons que ce réacteur est spécialement destiné aux avions de transport subsoniques d’une capacité de 150 à 200 places : courts, moyens ou longs courriers, dérivés de types d’avions existants ou de types nouveaux. Il doit se caractériser par des performances nettement supérieures à celles des moteurs de la génération actuelle : rapport poussée/poids plus élevé, consommation spécifique plus faible, faibles niveaux de bruit et de pollution. La direction du programme et de la commercialisation seront assurées par la société commune CFM International en voie de formation.
Un rotor de conception nouvelle
L’amélioration des performances, et notamment de la vitesse, constitue depuis toujours un des objectifs majeurs des constructeurs d’hélicoptères car il conditionne un plus grand développement de ce type de machines, séduisant à bien des égards.
De multiples formules ont été imaginées, réalisées et essayées, mais malgré les progrès accomplis au cours des dernières années – progrès souvent importants et qui méritent d’être soulignés – aucun pas réellement décisif n’a été fait dans le domaine des performances qui demeurent souvent en deçà de celles atteintes par les avions, même parmi les plus modestes.
La formule proposée récemment par la Société Fairchild semble particulièrement prometteuse si l’on en croit les performances annoncées par le constructeur. Plus de 400 mph serait une vitesse possible. C’est dire l’éventail extraordinaire de modèles qu’un tel rotor permettrait de développer : modèles civils mais aussi modèles militaires pour lesquels la vitesse est un élément indispensable dans la recherche d’une plus grande efficacité et d’une meilleure sécurité. On comprend dès lors l’intérêt que lui portent les états-majors – celui de l’US Navy notamment – et l’Administration nationale de l’aéronautique et de l’Espace (NASA).
Le fonctionnement d’un rotor est contrarié en permanence par l’apparition de deux phénomènes dus à une composition différente des vitesses sur les pales, à savoir un phénomène de compressibilité sur la pale avançante et un phénomène de décrochage sur la pale reculante. Toute augmentation de la vitesse d’avancement précipite l’apparition des phénomènes de compressibilité et de décrochage. Tout ralentissement de la vitesse de rotation retarde le premier phénomène mais accélère le second.
Avec son nouveau rotor, la société Fairchild a bien entendu essayé d’enrayer ces deux phénomènes. Pour combattre la compressibilité, elle a retenu de réduire la vitesse de rotation du rotor dans des proportions très importantes. Des rapports d’avancement de 2 sont envisagés (rapport de la vitesse d’avancement à la vitesse du rotor). À partir d’un tel rapport, la pale se comporte d’ailleurs comme une aile classique avec tous les avantages que cela suppose.
Pour combattre le décrochage, un procédé nouveau reposant sur une utilisation originale de la pale reculante a été mis au point. Pour une vitesse de rotation donnée, la vitesse résultante sur la pale (différence de la vitesse de rotation et de la vitesse d’avancement) diminue, s’annule puis change de direction si la vitesse d’avancement augmente. Dès lors la pale est attaquée par ce qui était initialement son bord de fuite. Le flux aérodynamique est en quelque sorte « inversé ». Il convient alors de modifier l’angle d’attaque de la pale pour engendrer de la portance et éliminer le phénomène de décrochage, d’autant mieux d’ailleurs que la vitesse d’avancement est plus grande.
La réalisation d’un tel rotor – sur lequel le constructeur est avare de détails – ne manquera pas de poser de difficiles problèmes. Le dessin du profil de la pale ne sera pas un des moindres : le profil doit en effet se comporter de façon identique dans le flux normal et dans le flux « inversé ». La Société a développé plusieurs types de profil aux bords « arrondis » qui ont des caractéristiques de portance et de traînée intéressantes dans les deux « flux ». Le contrôle de la distribution de la portance sur la pale, quelle que soit sa position dans le disque rotor, nécessitera la mise au point d’un système dont on devine aisément la complexité et qui viendra s’ajouter au contrôle de pas existant déjà sur les hélicoptères classiques.
Aux basses vitesses, le rotor Fairchild sera utilisé de façon conventionnelle. À partir d’un rapport d’avancement de 0,5 le nouveau système de contrôle sera progressivement introduit pour donner aux pales l’angle d’attaque qui convient dans le nouveau domaine de vol. Au fur et à mesure que la vitesse augmentera, le nombre de tours du rotor sera réduit de façon à éviter les phénomènes de compressibilité en bout de pale avançante et à augmenter le « flux inverse » sur la totalité de la pale reculante. Parallèlement une partie – ou la totalité – de la puissance des moteurs pourra être soustraite pour accroître la vitesse d’avancement, le rotor étant pour sa part entraîné ou laissé libre.
La Société Fairchild fonde beaucoup d’espoirs sur ce nouveau rotor. Elle compte recevoir en 1975 les crédits nécessaires pour poursuivre l’expérimentation de son matériel qui pourrait être testé en vol sur un appareil spécialement conçu pour les essais de rotor et que Sikorsky réalise au profit de l’US Army et de la NASA. ♦