Institutions internationales - La Communauté européenne courtisée - La question allemande - L'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale et l'actualité
Les événements qui se sont accélérés au cours de l’automne dernier en Europe de l’Est ont donné lieu à bien des commentaires avant d’être examinés lors de multiples rencontres : celle de M. Gorbatchev, président de l’URSS, et du souverain pontife, Jean-Paul II, sommet de Malte (2 et 3 décembre 1989), conférence de l’Alliance atlantique (21 mai 1989), Conseil européen (8 et 9 décembre 1989), etc. Est-on dès lors en mesure d’interpréter correctement ce qui se passe ? N’oublions pas la mise en garde de Fernand Braudel : « Le temps court est la plus capricieuse, la plus trompeuse des durées ». En attendant qu’une longue durée donne toute leur signification aux changements intervenus, fions-nous aux faits qui sont les seuls témoins irrécusables.
La communauté européenne courtisée
C’est tout d’abord M. Gorbatchev, début décembre 1989 à Milan, qui souhaite la création d’un organisme permettant une consultation permanente entre la Communauté économique européenne (CEE), l’Association européenne de libre-échange et le COMECON (Conseil d’assistance économique mutuelle) (1). L’objectif du président soviétique est de soulever l’intérêt des industriels européens pour son pays sans paraître rechercher une situation privilégiée. Cette initiative prolonge l’accord signé à Bruxelles en 1988 aux termes duquel la CEE et le COMECON reconnaissaient leur existence réciproque. Pourquoi, cependant, s’être adressé à des industriels italiens ? En partie sans doute parce que l’Italie n’a jamais obéi aux injonctions américaines du temps de la guerre froide ; surtout parce que la haute finance de la péninsule a toujours eu les yeux tournés vers l’Union soviétique. M. Carlo de Benedetti (financier italien), invité surprise de l’émission « Questions à domicile », le 27 mars 1988, n’y avait-il pas prôné le lancement d’un plan Marshall en faveur de l’Europe de l’Est ? Une suggestion que l’éditorialiste du Monde soutenait avec vigueur le lendemain. De plus, un consortium de banques transalpines, animé par la Mediocredito Centrale, opérant avec certains instituts ouest-allemands et notamment la Deutsche Bank, avait ouvert la voie à l’octroi de crédits à Moscou. Dans ces conditions, M. Gorbatchev était assuré d’obtenir sans difficulté l’assentiment de son auditoire.
Une dizaine de jours plus tard, dans un discours programme à Berlin-Ouest, le chef de la diplomatie américaine, M. James Baker, encourageait le renforcement de l’intégration européenne et proposait que « les États-Unis et la CEE travaillent ensemble pour établir, que ce soit sous la forme d’un traité ou sous toute autre forme, un ensemble nettement renforcé de liens institutionnels et économiques ». Quand on sait l’irritation qu’ont toujours manifestée les Américains face à la construction européenne et ses impératifs (au cours des négociations GATT – General Agreement on Tariffs and Trade –, cela allait jusqu’à l’épreuve de force), la démarche de M. James Baker avait de quoi étonner. Probablement faut-il y voir un premier pas vers cette transformation de l’Alliance atlantique en organisme de coopération économique et politique annoncée par le président George Bush. Mais d’autres considérations ont certainement joué : heurtée de plein fouet par le dynamisme de l’industrie japonaise, l’Amérique éprouve le besoin de se réserver d’autres débouchés.
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