L’obsession est un mal qui ronge l’âme jusqu’à son noyau. Dans un registre proche de la passion, elle éloigne de la réalité ceux qui la laissent diriger leur vie. Le personnage décrit par l’Iranien Sadegh Hedâyât dans son roman La chouette aveugle est de ceux-là ⁽¹⁾. Persuadé, entre autres choses, que sa femme, « la garce », le trompe avec un vieux brocanteur, il finira par l’assassiner et s’apercevra, bien trop tard, que la mélancolie qui le rongeait trahissait surtout sa perception du monde alentour. De la même manière, l’obsession qu’ont les États-Unis et l’Iran l’un pour l’autre ne laisse pas non plus, pour l’instant, de chance à la clairvoyance ni au dialogue.

Si la situation est telle depuis 1979, il devient de plus en plus clair qu’aveuglées par leurs idéologies, mais surtout par leurs peurs réciproques, en proie à l’irrationnel, ces deux chouettes (capable de voir à travers la pénombre, la chouette symbolise notamment la sagesse, on la retrouve souvent associée à la déesse grecque Athéna et à la cité antique d’Athènes) pourraient bien s’anéantir ensemble, au même instant, à la faveur d’un environnement économique désastreux. L’une symbolise un « empire » jeune, déjà inscrit sur une pente descendante et campé sur ses positions, l’autre un empire du passé, mais souhaitant s’engager sur la voie du retour.

Courbe descendante et courbe ascendante d’empires qui, à la croisée des chemins, pourraient entrer en collision. À moins qu’un geste soudain de lucidité ne vienne modifier leur perception des choses.