François Thual, qui avait publié l’an dernier Géopolitiques au quotidien, s’est intéressé à la morphogenèse des États (c’est-à-dire le processus de formation d’un territoire dans le cadre d’un État) dans son dernier livre Mémento géopolitique.

Cet ouvrage passe en revue la formation des États contemporains. Avec simplicité, il décrit les mouvements territoriaux, souvent complexes, qui ont abouti à la configuration actuelle du champ des relations internationales. Il réussit la gageure de passer tous les États en revue, consacrant quelques lignes aux plus petits ou à ceux dont la formation fut la plus simple, et de plus larges développements pour les autres.

Cependant, il ne s’agit pas là d’une nomenclature ou d’un simple catalogue, d’abord parce que les pays ont été regroupés par blocs de cohérence géopolitique, c’est-à-dire, selon l’auteur, en tenant compte des héritages de l’histoire et des contraintes de la géographie ; ce qui a abouti à des reclassements originaux comme le chapitre sur le monde indo-anglais. Les textes, pour chacun des pays, dans une présentation schématique, dressent en quelque sorte un bilan territorial qui lui-même est replacé dans une région, voire un continent. D’autre part, cet ouvrage semble sous-tendu par une problématique : la prolifération contemporaine des États, issue soit des décolonisations, soit de la désintégration d’empires (Autriche-Hongrie, Empire ottoman, URSS). En 1945, on comptait encore quarante-cinq États, aujourd’hui on n’est pas loin de cent quatre-vingt-dix, et tout indique que le phénomène va se poursuivre.

Regrettons seulement que l’auteur n’ait pas eu le temps d’approfondir tous les mécanismes de ce phénomène majeur de la fin du XX^e siècle ; souhaitons qu’il le fasse dans un prochain ouvrage. On peut également regretter l’absence de cartes.

À l’heure où la prolifération étatique semble devenir un phénomène aussi déstabilisant dans les relations internationales que le sont les proliférations nucléaire, balistique ou chimique, ce petit livre (par la taille) est fort bienvenu. Comme l’auteur allie élégance de la plume, érudition et simplicité dans la formulation, la lecture en est de plus agréable. ♦