Le défi lancé à l’Europe ; par l’évolution du monde, par le destin ; est de réaliser, malgré ses innombrables contradictions internes actuelles, le premier État moderne adapté au monde de l’ère nouvelle. Ce défi, l’Europe est en état de le relever, mais en respectant de nombreuses conditions et en tenant compte de ses propres structures. Heinz Kuby, qui publia cet ouvrage en Allemagne en 1965, voit une solution dans la constitution d’une Europe fédérale, selon une formule susceptible, à ses yeux, d’apporter un résultat bénéfique pour l’Europe elle-même, mais aussi pour l’ensemble du monde.

Tout au long de cette étude fort dense, d’une lecture souvent austère, l’auteur aborde la quasi-totalité des problèmes européens et mondiaux essentiels, qu’il s’agisse de défense, d’économie, de coexistence, de leadership d’une puissance sur les autres. Il emprunte souvent au Général de Gaulle des idées qu’il adopte, transforme ou nuance. On trouve donc dans cet ouvrage une sorte de condensé raisonné de toutes les solutions envisagées ; à ce titre, il est évidemment intéressant de le lire.

Mais cette analyse révèle souvent, à notre avis, l’anxiété d’un penseur vigoureux devant les transformations du monde actuel et son désir de voir l’homme surmonter ses propres découvertes et devenir capable de les maîtriser et de les utiliser à des fins bénéfiques. C’est une anxiété qui se manifeste dans de nombreux ouvrages actuels, quel que soit leur sujet. Ici, elle est traduite en termes économiques et politiques. Mais il s’y ajoute, au-delà de l’analyse, le désir d’apporter une solution précise à un problème capital, dont chacun sait qu’il sera résolu mais ignore comment il le sera : l’unification européenne.