Ce titre est étrange, lorsqu’il s’agit d’un pays qui depuis vingt ans est en guerre, sans savoir dans combien de temps cet état de guerre finira. En fait, Jean Lacouture a repris, soudé et remanié des articles qu’il a écrits sur le Vietnam, de 1959 à 1965, dans le but d’expliquer et de justifier la solution souhaitable, à son avis, de l’affaire vietnamienne. Il est difficile de passer de l’historique à l’actualité. L’imbroglio du Sud-Est asiatique est assez complexe pour nécessiter ou de très longs développements, ou des simplifications extrêmes auxquelles on comprend aisément que répugne un auteur qui est au fait des questions dont il traite depuis de longues années.

L’opinion de Jean Lacouture semble pouvoir se schématiser ainsi. Le Sud Viet-Nam veut être « de droite », craignant que toute concession « à gauche » ne signifie à plus ou moins brève échéance sa disparition au profit du Nord Viet-Nam. Aussi traite-t-il en ennemi l’ensemble des partis qui ont formé en 1960 le Viet-Cong, dans lequel il voit seulement une directe émanation du régime de Hanoï. Les Américains, qui avaient aidé le Viet-Minh en 1945 contre la France et n’avaient pas voulu s’engager militairement alors que nous luttions en Indochine, cherchent à soutenir un gouvernement du Sud qui serait résolument décidé à lutter contre le communisme, mais ne le trouvent pas, malgré les coups d’État, les putschs, les remaniements ministériels qui font de Saïgon un kaléidoscope. Aussi, s’engagent-ils directement dans une guerre militairement sans issue et qu’il faudra bien un jour terminer par une négociation. Celle-ci doit d’abord s’établir dans le Sud Viet-Nam entre les différents partis, y compris le Viet-Cong, puis entre Hanoï et Saigon, enfin entre les grandes puissances intéressées au rétablissement de la paix dans le Sud-Est asiatique. Tout cela est sagesse ; mais il y manque l’indication des moyens à employer pour arriver à cette entente à trois niveaux.

Ceux qui ne connaissent pas l’histoire du Viet-Nam depuis la fin de la guerre mondiale trouveront dans ce livre un résumé, aussi clair qu’il est possible de le faire, des événements qui s’y sont succédé depuis dix ans, au cours de guerres inutiles ou ratées, dont le peuple des campagnes vietnamiennes est la victime la plus directe. ♦