Les relations entre Abdelaziz Bouteflika et l'armée algérienne sont tumultueuses, au lendemain de son accession à la présidence de la République en avril 1999. Sa politique et ses déclarations, sa conception et son exercice de la fonction présidentielle suscitent l'hostilité de généraux qui l'ont porté au pouvoir. Le Premier ministre Ali Benflis, fort de ses succès et du soutien d'une partie de l'armée, renforce son contrôle sur le FLN dans la perspective d'une candidature à l'élection présidentielle du printemps 2004. Abdelaziz Bouteflika mobilise les moyens de l'État pour tenter de reprendre la direction du parti et pour remporter ce scrutin. Il est finalement réélu triomphalement, les généraux n'ayant pas réussi à s'entendre pour soutenir un candidat. Cette situation politique inespérée lui permet de reconquérir le FLN, de poursuivre son action de réconciliation entre les Algériens, et d'entreprendre des réformes économiques de grande ampleur, grâce à des revenus pétroliers exceptionnels.
Algérie : l'élection triomphale d'Abdelaziz Bouteflika
Abdelaziz Bouteflika s’est efforcé, dès son accession à la tête du pays, de mettre fin à des années de guerre civile. Il pratique une politique vis-à-vis des islamistes qui va au-delà de ce que souhaitent l’Armée nationale populaire (ANP) et la classe politique. Il exerce la fonction de président de la République, d’une manière autoritaire dénoncée par ses adversaires. Les tensions avec les généraux, à l’origine de son accession à la tête du pays, laissent penser à certains qu’il n’achèvera pas son mandat. Dans ce climat, le Premier ministre Ali Benflis considère que son bilan, à la tête du gouvernement et du FLN, lui permet de se présenter à l’élection présidentielle d’avril 2004, et d’avoir des chances sérieuses de l’emporter.
Abdelaziz Bouteflika et l’Armée nationale populaire
Abdelaziz Bouteflika est élu en 1999 grâce au soutien de l’ensemble des chefs militaires qui l’ont bien connu comme ministre des Affaires étrangères de Houari Boumedienne. Ils considèrent qu’il peut contribuer à sortir le pays de l’isolement diplomatique provoqué par la guerre civile, et pensent pouvoir s’accommoder de sa présence à la tête du pays. Abdelaziz Bouteflika a aussi pu devenir président de la République parce qu’il a accepté de mettre en œuvre l’accord secret, passé en 1997, entre des généraux de l’ANP et les chefs de l’Armée islamique du salut (AIS) pour mettre fin à la guerre civile. Il donne une couverture juridique à l’accord, au lendemain de son élection, en faisant adopter un projet de loi de « concorde civile » par le Parlement, et en appelant la population à l’approuver par référendum. Il fait une large application de la loi, et prend des mesures de grâce amnistiante. Il va encore plus loin en proposant, en février 2001, un projet de « concorde nationale », sans donner de précisions sur son contenu. Cette proposition est considérée par la classe politique et l’armée comme une tentative, inacceptable, de réinsérer dans la vie politique le Front islamique du salut, dissous.
Au printemps 2000, différentes organisations non gouvernementales (ONG) de défense des droits de l’homme sont invitées à revenir en Algérie. Elles veulent, depuis plusieurs années, enquêter sur les violations des droits de la personne commises par les groupes islamistes armés, mais aussi par des membres des forces de sécurité et de l’armée (1). Des délégations de diverses ONG séjournent successivement dans le pays, sans obtenir des autorités de réponses à leurs demandes d’informations, ni à leurs questions précises. Abdelaziz Bouteflika crée, en mars 2001, une Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’homme (CNCPPDH). Chargée notamment d’enquêter sur le sort des quelque 4 000 disparus — imputés aux unités de l’armée, aux forces de sécurité, et aux milices armées par l’État — pendant la période 1993-2000, cette commission ne prend pas de mesures concrètes. En septembre 2003 est créée une commission temporaire, chargée de contacter les proches des disparus, pour la prise en charge sociale et matérielle des familles, nombreuses à être dans le besoin. Le président Bouteflika doit par ailleurs faire face, au printemps 2001, aux émeutes de Kabylie. La sanglante répression des manifestations par la gendarmerie l’oblige à nommer une commission d’enquête, et à prendre des sanctions jugées généralement insuffisantes (2).
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