La bataille victorieuse de décembre 1941 pour Moscou avait permis aux armées soviétiques de reprendre dès lors, dans certains secteurs, l’initiative des opérations et mis les Allemands hors d’état de réaliser sur le front oriental la guerre-éclair menée en Pologne et en France. Ils purent encore concevoir et exécuter, en 1942, des manœuvres offensives de grande ampleur, mais à partir de la reprise de Stalingrad par leurs adversaires et des grandes batailles de Koursk en 1943, ceux-ci les dominèrent nettement.

Le Haut Commandement soviétique se montra capable de relier, par l’unité de sa conception stratégique de l’ensemble de la guerre, ses opérations exécutées simultanément par plusieurs groupes d’armées et se développant sur un front et une profondeur considérables. Les percées profondes exécutées par des fronts offensifs conjugués et orientés de manière à se rejoindre, assurèrent l’encerclement de très gros groupements allemands et leur anéantissement successif dans les principaux secteurs.

Cette stratégie a d’ailleurs été rendue possible par une nette supériorité numérique en hommes et en artillerie, par une tendance de plus en plus accentuée d’abord à l’égalité puis à la supériorité en aviation, à mesure que le bombardement stratégique aérien du Reich et la guerre en Italie et sur le front occidental frappaient durement les ailes allemandes, par une abondante fourniture de matériel anglo-américain, par le développement incessant des forces blindées soviétiques employées en constante combinaison avec des masses de cavalerie et des formations motorisées de toutes armes. Il en résulta, en 1943 et en 1944, toute une série de grandes victoires qui amenèrent les armées soviétiques en Roumanie, en Hongrie, en Pologne, et jusqu’aux frontières de l’Allemagne. Au début de 1945, une de ces grandes opérations combinées de deux groupes d’armées eut pour objectif, avec la conquête de la Prusse orientale, la destruction des forces allemandes considérables chargées de la défense de cette province, en même temps qu’elle assurait la protection du flanc nord des armées du maréchal Joukow, se portant en avant vers l’ouest depuis la Pologne pour conquérir Berlin. C’est cette conquête de la Prusse orientale que nous nous proposons de décrire.