L’African Mission in Sudan (AMIS) a été mise en place au Darfour seulement deux ans après la création de l’Union africaine (UA). Initialement conçue comme une mission d’observation d’une centaine d’hommes, elle est progressivement à 3 000 puis à plus de 7 000 hommes, sans empêcher la dégradation sécuritaire de ces derniers mois. Cette opération n’est pas une entière réussite, mais l’échec doit surtout être imputé aux négociations politiques qui n’ont pu établir d’accord inclusif. Sur le plan des relations UE/UA, le bilan est également mitigé, mais des pistes d’amélioration existent.
Premier bilan de l'AMIS et de la coopération UA/UE dans la crise du Darfour
A first assessment of AMIS and AU-EU cooperation in Darfur
The African Union Mission in Sudan (AMIS) was set up in Darfur just two years after the creation of the African Union (AU). Initially intended as a 100-strong observation mission, it increased progressively to 3,000 and now numbers over 7,000 yet has been unable to prevent the degradation in the security situation seen in recent months. The operation has been less than a complete success but the failure stems largely from the inability of political negotiations to arrive at an inclusive agreement. Relations between the EU and the AU are not what they might be but there are possibilities for improvement.
Malgré la conclusion à Abuja, le 5 mai dernier, d’un accord de paix (Darfur Peace Agreement) par une des composantes de la rébellion (Minni Minawi, MLS) (1), les combats se sont amplifiés au Darfour entre gouvernement et non-signataires et la situation humanitaire se détériore à nouveau. La force d’observation mise en place par l’Union africaine (UA) en 2004, l’African Union Mission in Sudan (Amis), est accusée d’inefficacité et son remplacement par l’ONU a été décidé par le vote de la résolution 1706 du Conseil de sécurité. Même si le mandat a été prolongé de six mois en novembre 2006, il paraît opportun de dresser un premier bilan, nécessairement partiel (2), de cette première opération importante de l’UA. C’est en outre la première application d’un dispositif de gestion des crises nouveau, utilisant le principe de subsidiarité : opération et médiation de l’UA, appui logistique de l’UE et de l’Otan, appui politique de l’ONU. Cet édifice, rendu fragile par les divergences entre les agendas des différents acteurs, a cependant été mis à rude épreuve par le durcissement des positions des parties au conflit.
Les difficultés d’Amis sur la durée
Vers une force toujours plus importante
L’Amis est le fruit de la transformation de l’OUA en UA et la première concrétisation de l’engagement de l’Afrique à gérer elle-même ses conflits après la création du Conseil de paix et de sécurité (CPS). Soucieuse d’être présente dans le règlement d’une crise que le Congrès américain décrit comme un génocide, l’UA s’est invitée dès la fin 2003 dans les négociations menées, sans succès durable, par le Tchad. Le 8 avril 2004, un « cessez-le-feu humanitaire » est signé. Il prévoit la mise en place d’observateurs chargés de surveiller son application ; au nombre de 138, dont 18 Occidentaux, ils sont mis en place dès le mois de mai. L’UE décide alors de financer cette force grâce à la toute nouvelle Facilité de paix pour l’Afrique (3) qui vient d’être mise en place à partir des fonds de développement européens.
Pour l’UA, ce n’est qu’un premier pas, destiné à faire progressivement accepter par Khartoum, une présence extérieure. Rapidement cependant, l’extension en hommes de la mission va devenir la seule réponse à la poursuite des exactions. Ainsi, en août 2004, les observateurs se voient adjoindre une force de protection de 300 hommes. Dès septembre, l’extension de la mission à 3 300 hommes est décidée, sous le nom d’Amis II. Le financement européen est augmenté à 80 millions d’euros et plusieurs pays européens fournissent une aide logistique. Une troisième vague de renforcements est ensuite jugée nécessaire en avril 2005, alors que la communauté internationale se mobilise pour le Darfour : en mars ont été votées au Conseil de sécurité deux résolutions qui menacent Khartoum de sanctions et les responsables d’exactions d’un jugement par la Cour pénale internationale. La conjonction entre cette pression, l’augmentation de l’Amis IIE (pour enhanced) jusqu’à 7 700 hommes (une quatrième extension à 12 300 hommes est prévue en cas de nécessité) et l’élan d’optimisme suite à la conclusion de la paix au Sud-Soudan (9 janvier 2005, accord de Naïvasha), permet une véritable accalmie.
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