Jusqu’en 1994, la puissance sud-africaine n’a pu se déployer du fait de son isolement diplomatique, le régime de Pretoria se contentant d’objectifs géopolitiques limités où prédominaient les impératifs de sécurisation de ses frontières et de ses « populations » blanches.
La nouvelle Afrique du Sud tourne délibérément le dos à cet héritage. La fin de l’Apartheid et l’arrivée de l’ANC aux affaires marquent le double retour de Pretoria sur les scènes mondiale et africaine. Le nouveau régime se pose fréquemment comme médiateur des conflits de l’Afrique subsaharienne et pousse à la réforme de l’OUA (organisation de l’unité africaine) devenue l’UA (Union africaine). Elle fait également montre d’une intense communication politique autour de la Nepad et de la « Renaissance Africaine ». Très présente dorénavant au sein des organisations internationales, l’Afrique du Sud se fait l’apôtre du multilatéralisme et plaide la cause de l’Afrique dans tous les forums internationaux. Cet activisme tous azimuts suscite la méfiance de certains États africains, prompts à voir des velléités d’hégémonie de l’Afrique du Sud. Elle n’est pas également sans susciter des agacements de la part des grandes puissances occidentales. Sans parler du décalage entre les projets ambitieux et leur réalisation.
South Africa's foreign policy
Prior to 1994, South Africa’s diplomatic isolation prevented it from exerting any influence; the Pretoria regime had to content itself with limited geopolitical objectives, dominated by concerns about the security of its borders and of its white ‘populations’. The new South Africa has resolutely turned its back on this legacy. The end of apartheid and the emergence of the ANC mark the return of Pretoria to both the world and African stages. The new regime often presents itself as a mediator in conflicts in sub-Saharan Africa and presses for reform of the Organisation of African Unity (OAU), now the African Union (AU). It is also deeply involved in the wide-ranging political discussions associated with the New Partnership for Africa's Development (NEPAD) and the ‘African Renaissance’. South Africa now has a solid presence in international organisations; it has taken on the role of advocate for multilateralism, and pleads Africa’s cause in all international forums. This wide-ranging activism is viewed with suspicion by certain African nations, who are quick to see in South Africa the stirrings of domination. There are even signs of irritation amongst the major Western powers. And then there is of course the gap between ambitious plans and their implementation.
La mise en place de l’apartheid à partir de 1948 marque le début d’un très long isolement de l’Afrique du Sud, qui limite ses visées géopolitiques à la préservation de ses frontières vis-à-vis des États de la « ligne de front » (Angola, Mozambique, Zimbabwe) suspectés de « visées communistes ». Le rayonnement diplomatique et économique du pays est donc sacrifié à la constitution d’un glacis sécuritaire donnant au pays l’apparence d’une citadelle assiégée.
Les relations se tendent avec Londres (ancienne puissance tutélaire) qui exclut Pretoria du Commonwealth en 1961. L’horizon se dégrade également avec les organisations internationales, ainsi en 1966 l’Assemblée générale de l’ONU déclare illégale l’occupation sud-africaine de la Namibie (ex-Sud-Ouest africain, confiée par la SDN à l’Afrique du Sud en 1920) et place officiellement ce territoire sous sa responsabilité. Ces événements ne sont pas sans rapport avec la dégradation de l’environnement régional. La vague de décolonisation de l’Afrique australe fait émerger des États d’obédience communiste (Angola et Mozambique) et l’arrivée au pouvoir de Robert Mugabe en 1980 en Rhodésie, rebaptisé Zimbabwe, fait tomber le dernier bastion blanc allié de Pretoria qui tombe.
Sur le plan intérieur, l’apartheid entame un repli autour du Laager (camp défensif). Afin de combattre la principale force d’opposition, l’African National Congress (ANC) qui a son état-major à Lusaka en Zambie, Pretoria développe un impressionnant appareil répressif : un arsenal juridique d’exception est mis en place (Public Safety Act en 1953, Terrorism Act en 1967), une police secrète est créée (Bureau of state security) ; les forces armées sud-africaines (South African National Defence Force, SANDF) deviennent une armée redoutée et particulièrement aguerrie pour mener des opérations dans les pays limitrophes et principalement en Angola ; une industrie d’armement autonome puissante émerge.
L’Afrique du Sud de l’Apartheid : glacis sécuritaire et isolement diplomatique
La nouvelle Afrique du Sud : activisme diplomatique et multilatéralisme
Le retour de l’Afrique du Sud sur la scène internationale
L’impulsion de Pretoria dans les initiatives africaines
Les entraves aux projets sud-africains
Afrique du Sud, Apartheid, OUA, Thabo Mbeki