La puissance aérospatiale s’adapte progressivement aux engagements non conventionnels caractéristiques des « nouveaux conflits » ou « conflits asymétriques ». Composante essentielle d’une force interarmées, elle est optimisée pour traiter avec précision des cibles à haute valeur, incluant les armes de destruction massive. Ses qualités d’endurance et d’ubiquité dans les domaines de la surveillance et de la précision de l’engagement contribueront à soutenir et appuyer les forces de surface contre des adversaires pratiquant des formes de violence collective paramilitaire (guérilla) ou groupusculaire (terrorisme), souvent dans un environnement urbain contraignant. Ses effets consisteront alors à désarmer des organisations paramilitaires s’appuyant sur un réseau discernable d’emprises géographiques et à entraver la liberté de manœuvre des groupusculaires, dans le cadre d’une stratégie globale de lutte contre le terrorisme. Cet article introduit un ouvrage du même auteur : L’ombre déchirée : la puissance aérienne contre la terreur ; L’Harmattan, 2007, 130 pages.
Puissance aérienne et engagements non conventionnels
Air-power and non-conventional operations
Air forces are gradually adapting to the non-conventional characteristics of the ‘new’ or ‘asymmetric’ conflicts. An essential component of any joint force, air power is optimised to engage high-value targets, including weapons of mass destruction, with great precision. Its qualities of endurance and ubiquity in surveillance and precision strikes help support surface forces against adversaries using collective paramilitary violence (guerrilla warfare) or in small groups (terrorism), often in restrictive urban terrain. Its effects will therefore consist in disarming paramilitary organisations making use of geographically identifiable networks and reducing the freedom of movement of terrorists, as part of an overall strategy of fighting terrorism.
Les conflits armés contemporains et ceux prévisibles offrent des caractéristiques particulières auxquelles les armées de l’air, comme d’ailleurs les autres armées, ont dû s’adapter progressivement. Ils sont souvent internes aux sociétés, même si la dernière décennie offre trois exceptions marquantes avec la guerre du Golfe, la campagne de 1999 contre la république de Serbie et plus récemment l’Irak. Les acteurs impliqués sont des entités organisées ; de nature différente des États pratiquant des formes de violence collective non conventionnelles. Les populations elles-mêmes sont devenues les premières victimes des opérations, mais peuvent aussi se transformer en source de violence insurrectionnelle, notamment dans les villes et agglomérations, constituant l’essentiel de l’environnement général des conflits ou guerres civiles.
Durant la même période, la plupart des appareils de défense occidentaux se sont organisés pour l’intervention extérieure, couvrant tout le spectre des opérations, de la mission classique de maintien de la paix, aux campagnes interarmées de coercition contre un adversaire désigné. À cet égard, l’évolution de la puissance aérospatiale n’a pas fait exception à la règle (1). Toutefois, elle subit de nombreuses critiques liées à ce qui est perçu par de nombreux commentateurs comme une perte d’efficacité en face d’adversaires non conventionnels, qui, par une « approche asymétrique » des opérations, conserveraient l’initiative et prendraient l’ascendant moral, sinon physique sur les forces d’intervention. La campagne aérienne israélienne au Liban illustre ces critiques visant aussi bien les résultats (dommages collatéraux avec le bombardement de Cana) que la rationalité de son emploi ; le Hezbollah n’ayant pas rendu les soldats capturés, ni suspendu ses activités de réarmement de missiles et roquettes (2). Ces critiques, au vrai, ne sont pas nouvelles. Elles accompagnaient déjà les campagnes aériennes du siècle dernier. Elles trouvent toutefois une nouvelle vigueur avec les conflits dits « asymétriques », dans lesquels la supériorité technologique n’a que peu d’effet quand elle se heurte à des combattants irréguliers agissant en ville et parmi la population.
Certes, les conditions d’engagement actuelles ne sont plus celles pour lesquelles les grandes flottes aériennes de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre froide ont été rassemblées. Cela ne présuppose pas, cependant, que la puissance aérienne soit dépourvue d’intérêt dans les « nouveaux conflits ». Son rôle évolue, de même que ses missions.
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