Le devenir de l’Alliance atlantique mobilise Européens et Américains pour le prochain Sommet de Strasbourg-Kehl. La France qui normalise spectaculairement sa position militaire dans l’Otan doit contribuer à cet effort conceptuel. Au-delà des idées qui germent sur un nouveau concept stratégique permettant de relancer l’Otan, n’y a-t-il pas des questions plus radicales à se poser sur les alliances et les écueils qui les guettent au moment où la mondialisation façonne une planète diversifiée, une planète de la puissance relative ?
L'Alliance relative
The relative Alliance
The question of the Atlantic Alliance’s future is concentrating European and American minds before the next summit at Strasbourg-Kehl. France, which is radically changing its military position within NATO, must contribute to this conceptual task. Apart from the ideas which are emerging on a new Strategic Concept for the relaunch of NATO, there are more radical questions to be asked on the alliances and pitfalls which threaten these ideas, at a time when globalization is resulting in a diversified planet, one of a web of power relationships
N’est-il pas paradoxal de parler d’alliance en ce début de XXIe siècle, à un moment où se fissure avec le libéralisme la dernière des idéologies conquérantes du siècle précédent ? Que reste-t-il des antagonismes d’hier ? Les grands affrontements nationaux, impériaux puis idéologiques qui ont conduit les siècles précédents aux guerres globales d’hier, se sont estompés depuis longtemps pour faire place au développement désordonné d’une compétition économique mondialisée, un développement effréné sans guerres ouvertes entre puissances militaires mais pas sans combats, vaincus, ni victimes, pas sans humiliations, frustrations, ni antagonismes diffus. Faudrait-il retenir prudemment les schémas d’hier et conserver une alliance de précaution ; soit que les temps à venir nous préparent une résurgence de ces affrontements sanglants de puissances classiques ; soit encore que la compétition mondialisée conduise à des partis aux intérêts fortement antagonistes requérant la classique défense armée d’intérêts communs menacés ? Chacun en jugera par lui-même, mais la notion d’alliance qui renvoie aux jeux de puissances d’hier peut sembler aujourd’hui anachronique.
Il est sûr, en effet, que nous ne sommes plus dans ces temps où les « peuples de la liberté » s’alliaient dans leur lutte sans concession contre les impérialismes nazi et japonais, ni dans celui où le barrage à l’idéologie communiste conjugué à la promotion des vertus occidentales conduisait au traité de Washington de mars 1949. Nous sommes soixante ans après, dans un autre monde en mouvement rapide, en perte d’unité et en « déconstruction » stratégique accélérée, un monde hétérogène qui peine à préserver l’universalité des solutions à apporter à ses problèmes. Et à l’instar de la plupart des instruments développés dans le monde de la fin de la Seconde Guerre mondiale — un monde dont la population a presque triplé depuis — l’organisation qui a donné consistance au Traité de l’Atlantique Nord, l’Otan, vacille. Elle a du mal à faire face à la fluidité stratégique d’une planète incertaine. Alors pour répondre aux défis variés qu’elle rencontre, elle a lancé un processus de transformation continue, une sorte de fuite en avant de sommet en sommet. Prochain rendez-vous, Strasbourg-Kehl, début avril.
La question de savoir si elle parviendra à disposer d’une structure capable de répondre en permanence aux besoins de sécurité collective de ses différents membres est importante. Elle a été largement et méthodiquement traitée ces dernières années ; elle l’est encore dans ce numéro ; elle sera à l’ordre du jour du sommet d’avril.
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