Pays de l'ylang-ylang et du girofle, l'archipel des Comores connaît une situation paradoxale : trois îles constituent la République fédérale islamique des Comores ; la quatrième ; Mayotte, a décidé de rester dans le giron de la France et possède le statut de collectivité territoriale. Quel est l'avenir de cet archipel ?
Comores : incertitude ou espoir ?
Situées sur la route des pétroliers, aux portes de l’Afrique et de l’Orient, les quatre îles de l’océan Indien (Grande Comore, Anjouan, Mohéli, Mayotte) qui forment l’archipel des Comores, constituent un microcosme d’une étonnante complexité. Dans cette région marquée par un passé tumultueux, l’histoire a permis à la France d’exercer une influence importante. Paris est donc particulièrement intéressé par l’évolution de cette zone. Après de nombreuses incertitudes, celle-ci pourrait connaître un avenir meilleur si les Comoriens réussissent à tempérer leurs divisions et s’attachent à mieux exploiter les atouts de ce pays du bout du monde.
Une histoire agitée dans l’archipel des sultans batailleurs
Pendant longtemps la région connut une succession d’invasions arabes qui aboutirent à l’implantation définitive de l’islam dans l’archipel. Placée sur la route des Indes, la zone fut également visitée à partir du XVIe siècle, mais beaucoup plus calmement, par des navigateurs portugais, hollandais, anglais, puis français. À la fin du XVIIIe siècle, les envahisseurs malgaches vinrent périodiquement dévaster les îles et établirent leurs bases avancées à Mayotte. Leur influence se retrouve aujourd’hui dans de nombreux villages qui parlent encore un dialecte proche du malgache. Les nombreuses razzias venues de l’extérieur incitèrent les gouverneurs des différentes îles à rechercher des protecteurs parmi les grandes puissances. C’est ainsi que la France va s’implanter dans l’archipel dans le courant du XIXe siècle. Dès 1841, Mayotte est placée sous l’autorité de notre pays ; le sultan Andriantsouli la céda moyennant une rente annuelle de 1 000 piastres. L’île est alors gouvernée par le capitaine Fassot qui établit son quartier général à Dzaoudzi. En 1886, des traités de protectorat sont également conclus avec les souverains d’Anjouan, de Mohéli et de la Grande Comore. Ce régime durera jusqu’en 1912, date à laquelle les Comores deviennent une dépendance du gouvernement de Madagascar, alors colonie française. Pendant toute la période d’implantation de la France, de grandes compagnies agricoles, comme la société Humblot dans la Grande Comore, vont participer au développement économique de la zone en favorisant la culture de l’ylang-ylang (plante à parfum), de la vanille, du girofle et du coprah. Jusqu’à une époque récente, l’action de la France fut cependant rendue difficile par les luttes farouches auxquelles s’y livrèrent pendant plus d’un siècle les sultans. C’est pour cette raison que les Comores furent surnommées « l’archipel des sultans batailleurs ».
L’archipel est détaché de Madagascar en 1946 et prend le statut de territoire d’outre-mer. Il est placé sous l’autorité d’un administrateur français résidant à Dzaoudzi, alors capitale administrative du territoire. Sur le plan législatif, les Comores sont représentées à Paris par un député qui siège au palais Bourbon, mais elles disposent sur place d’une assemblée territoriale pour le règlement des affaires locales. Une large autonomie interne est accordée à l’archipel en 1961. À partir de cette époque, la vie politique est dominée par un riche commerçant dans une société d’import-export, M. Ahmed Abdallah, également sénateur au Parlement français. Le développement de son influence coïncide avec l’émergence dans le pays d’une organisation indépendantiste, le Mouvement de libération nationale des Comores (Molinaco), formé à Dar es-Salaam avec le soutien de la Tanzanie et de l’Union Soviétique. Cette revendication va gagner progressivement les esprits d’un certain nombre d’élites locales. Des pourparlers entre le président du gouvernement comorien Ahmed Abdallah et le ministre français des Dom-Tom aboutissent le 15 juin 1973 à une déclaration commune prévoyant les dispositions en vue de l’accession de l’archipel à la souveraineté internationale. Le 22 décembre 1974 à l’occasion d’un référendum, l’ensemble des quatre îles se prononce à 95 % en faveur de l’indépendance, mais à Mayotte 65 % des votants réclament leur rattachement à la France (1). Devant ce résultat, Paris décide que la future Constitution des Comores serait approuvée île par île, ce qui revient à dissocier Mayotte du reste de l’archipel. Le 3 juillet 1975, le président Abdallah proclame alors unilatéralement l’indépendance des Comores et le rattachement de Mayotte aux autres îles.
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