L'auteur, docteur en sciences politiques, est spécialiste des questions proche-orientales et africaines. Il analyse les raisons qui ont incité les chefs d'État et de gouvernement africains présents au Caire en juin 1993 à adopter une déclaration créant un mécanisme de prévention, de gestion et de règlement des conflits sur le continent ; il nous fait part de ses espoirs quant à l'efficacité de cette institution, mais ne peut s'empêcher d'émettre quelques réserves.
Un mécanisme apte à prévenir et régler les conflits en Afrique
La clôture du XIXe sommet des chefs d’État et de gouvernement africains a été marquée par l’adoption de la déclaration du Caire proclamant la création d’un mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits en Afrique. Vu l’impact que pourrait avoir une pareille initiative sur la paix du continent, il nous semble important de nous pencher sur la question du règlement des conflits sur le continent noir et d’examiner la place que pourrait occuper un tel organisme au moment où l’Afrique traverse une période de mutation et d’instabilité incontestables.
Beaucoup de questions se posent à ce propos : s’agit-il d’un tournant décisif dans l’histoire africaine ou simplement d’une déclaration d’une portée limitée ? Les dirigeants africains auront-ils la volonté de permettre à cet organe de fonctionner efficacement pour l’intérêt du continent tout entier ou seront-ils tentés de le contourner ? Enfin, ce nouveau mécanisme pourrait-il fonctionner correctement malgré la crise économique qui secoue le continent et l’insuffisance de ressources financières de l’Organisation de l’unité africaine ?
L’état des conflits en Afrique
En abordant l’histoire des conflits en Afrique, l’analyste ne peut pas ne pas relever l’impact très important de l’ordre mondial sur l’Afrique pendant toutes les époques : les puissances européennes en tenaient les rênes. Poussées par de multiples considérations religieuses, politiques, militaires et économiques, elles rivalisèrent pour coloniser l’Afrique. La Conférence de Berlin (1884-1885) a représenté le point culminant de ce processus : Français, Anglais, Belges, Allemands et Portugais se partagèrent le continent africain. Dès lors, des frontières artificielles faisaient leur apparition sur la carte du continent selon des critères obéissant aux intérêts des puissances européennes sans pour autant prendre en compte les réalités ethniques et tribales africaines : on parlait ainsi de l’Afrique francophone, anglophone, lusophone, etc. Durant des siècles, les conflits en Afrique n’ont été que les prolongements des rivalités entre les puissances étrangères.
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