La recomposition du Sud-Est de l'Europe
Depuis la dislocation de la Fédération yougoslave, tant d’étapes ont été franchies, tant d’affrontements ont eu lieu et tant d’épreuves se sont succédé que le moment est venu de voir comment s’est aujourd’hui recomposé le Sud-Est de l’Europe. C’est à cette tâche que l’on va s’efforcer ici. Elle devrait inciter, il est vrai, à une certaine humilité. Ceux qui ont suivi la tragédie yougoslave depuis bien des années se souviennent des spéculations auxquelles les gouvernements, les spécialistes ou les simples observateurs se livraient sur la survie de la Yougoslavie après la mort du maréchal Tito.
Elle y a survécu, en effet, pendant dix ans. Certains, alors, ont pu croire qu’elle était décidément assurée : au lieu de quoi, c’est à une dislocation irrémédiable et catastrophique que nous avons assisté et aujourd’hui, naturellement, il ne manque pas de « spécialistes » pour affirmer qu’elle était inévitable. On se souviendra aussi qu’alors, c’est-à-dire durant l’année 1990-1991, les trois grands États occidentaux vainqueurs de la guerre, États-Unis, Grande-Bretagne et France, étaient convaincus que le maintien de la Fédération yougoslave était non seulement souhaitable, mais indispensable à la paix et à la stabilité de cette partie de l’Europe : une lettre écrite en ce sens par le président George Bush au Premier ministre fédéral Markovic pour l’inciter à préserver la Fédération tout en y accélérant les réformes économiques et politiques, et dont la substance fut rendue publique, en a été le témoignage le plus significatif. Moyennant quoi, la politique de ces États, et en particulier celle des États-Unis prirent, quelques mois plus tard, une direction radicalement opposée…
La tentation est grande, dans cette affaire, de remonter à ses sources historiques proches et lointaines. D’autant plus qu’il s’agit d’une histoire passionnante et passionnée, où les causes endogènes et exogènes s’imbriquent sans cesse et qui concernent des peuples dont les événements accentuent les différences alors même que leur destin est inextricablement mêlé. Toutefois, si les références au passé sont parfois inévitables, on tentera ici d’analyser la recomposition de cette partie essentielle du Sud-Est de l’Europe en décrivant la position actuelle des acteurs de la crise sur place, c’est-à-dire des cinq États aujourd’hui héritiers de l’ancienne Fédération yougoslave.
Il reste 94 % de l'article à lire






