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  • La France face aux nouveaux enjeux de sécurisation de l’économie maritime (T 1721)

La France face aux nouveaux enjeux de sécurisation de l’économie maritime (T 1721)

Thomas Ciborski, « La France face aux nouveaux enjeux de sécurisation de l’économie maritime (T 1721)  », RDN, 17 juin 2025 - 8 pages

© Marine nationale
© Marine nationale

Le lieutenant de vaisseau Thomas Ciborski analyse les problématiques de la sécurisation de l'économie maritime à l'heure où, comme l'avait prédit le professeur Hervé Coutau-Bégarie, « la mer est devenue objet de conflit » dont il faut saisir les enjeux dans toutes les dimensions, de la surface aux grands fonds marins.

France faces new challenges in securing the maritime economy

Thomas Ciborski analyses the issues of securing the maritime economy at a time when, as Professor Hervé Coutau-Bégarie predicted, "the sea has become an object of conflict" whose stakes must be understood in all dimensions, from the surface to the deep seabed.

Depuis plus d’un demi-siècle, le monde maritime est en perpétuelle évolution. Celle-ci s’observe d’abord avec le gigantisme imposé par la mondialisation, qui dessine les axes d’échanges intercontinentaux dont chaque pays dépend, puis dans l’exploitation croissante des ressources halieutiques. Désormais, il faut aussi compter sur la course aux ressources minières tapies dans les grands fonds marins, ainsi que sur le développement des énergies marines renouvelables répondant aux nouveaux objectifs environnementaux mondiaux. Ces bouleversements commerciaux, industriels, technologiques ou écologiques imposent aux États maritimes des stratégies novatrices en matière de souveraineté des espaces maritimes et de développement d’une économie littorale. Afin de répondre à ces deux enjeux, quelles solutions peuvent être apportées par la France, qui détient le deuxième espace maritime mondial et qui figure parmi les dix plus grandes marines du monde ? L’analyse du triptyque illustré par le défi des énergies marines renouvelables, par la stratégie nationale de maîtrise des fonds marins ainsi que par une sécurisation modernisée des approches maritimes met en lumière trois enjeux majeurs incarnant les défis à venir des puissances maritimes.

Le défi des Énergies marines renouvelables (EMR)

L’objectif de neutralité carbone en 2050, fixé par la Stratégie nationale bas carbone (1) (SNBC) et adoptée en 2020 à la suite d’une consultation publique, vise à redessiner significativement le littoral français. À cet effet, le président de la République rappelle le 10 février 2022 dans son discours de Belfort (2) sa volonté de mettre en service cinquante parcs éoliens en mer (EMR) représentant 40 Gigawatt (GW) de production électrique issue de la technologie de l’éolien en mer (3). À titre de comparaison, les 56 réacteurs nucléaires disponibles, composant l’ensemble du parc civil français, produisent un peu plus de 61 GW. Ainsi, deux tiers de la production électrique nationale proviendraient d’ici vingt ans de l’exploitation d’éoliennes en mer, transformant alors un secteur en cours de développement vers un secteur vital pour l’industrie et l’État.

Dès lors, comment garantir l’entière sécurité des sites éoliens, implantés sur les trois façades métropolitaines, face à un espace maritime de plus en plus sous pression ? La multiplication des acteurs tels que la grande plaisance et les croisiéristes, ou encore l’augmentation des flottes de pêche et commerciales, engendrent de fait une cohabitation complexe associée à un accroissement des risques. Le seul exemple du détroit du Pas-de-Calais, emprunté par un quart du trafic maritime mondial, soit presque 70 000 navires par an, recense 208 situations d’avaries ou d’incidents reportées en 2023 dans les bilans des Centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (Cross) Gris-Nez et Jobourg. Ces mêmes bilans reportent également 222 situations dangereuses avec un risque avéré de collision entre deux navires. La vigilance permanente des centres de secours, ainsi que la capacité quotidienne des marines littorales à conduire des opérations d’assistance aux navires en difficulté, revêtent ainsi un caractère essentiel dans un environnement qui comptera bientôt six champs éoliens, s’agissant uniquement de la Manche.

D’une autre manière, les sites éoliens, souvent éloignés à une dizaine de kilomètres des côtes et nativement dépourvus de moyens de surveillance robustes, présentent des vulnérabilités spécifiques par rapport aux sites terrestres. En effet, ces derniers bénéficient d’un dispositif de sûreté éprouvé associé à une réactivité des forces de l’ordre. En revanche, s’agissant d’un site en mer, et bien que la chaîne sémaphorique métropolitaine permette de caractériser et suivre une potentielle menace venant du large, le risque de dilution ou d’intrusion d’acteurs malveillants dans un complexe d’EMR est à prendre en compte. Ces menaces, à la fois diverses et diffuses, telles que les activistes ou terroristes agissant par piratage ou sabotage et les narcotrafiquants en quête de nouveaux points de réception, constituent de nouveaux défis pour les moyens de patrouilles maritimes déjà sous tension. Si une installation en mer ne représente pas nécessairement une technologie de pointe pouvant susciter la convoitise, son sabotage demeure toutefois une action déstabilisatrice largement envisageable, pouvant générer des dégâts considérables sur l’économie locale à la suite d’une coupure d’alimentation électrique.

Dans un contexte de compétition stratégique accru, l’endommagement ou la destruction d’installations en mer paraissent plus crédibles, à l’image du pétrolier Eagle-S battant pavillon des îles Cook, arraisonné le 26 décembre 2024 par la garde côtière finlandaise en mer Baltique et suspecté d’avoir sciemment laissé trainer son ancre pour endommager le câble sous-marin de télécommunication Estlink 2 (4). C’est pourquoi une plus large permanence à la mer, permettant d’anticiper ou de caractériser ce genre de situation, doit encourager une accélération majeure des programmes de drones, tant de surface qu’aérien. Actuellement, les seuls exemplaires aériens opérationnels ont un rayon d’action permettant de balayer une zone de plusieurs kilomètres carrés (les drones S-100 de la société autrichienne Schiebel et le Système de mini-drones aériens embarqués pour la Marine nationale (SMDM) de l’industriel français Survey Copter), tandis que des installations EMR offshore représenteraient a minima des dizaines de km2. L’étendue des surfaces milite désormais pour une mobilisation de notre base industrielle de défense, autour de solutions de surveillance téléopérées largement standardisées, suffisamment robustes et en nombre suffisant.

Du point de vue de la cybersécurité, le piratage en avril 2022 de trois leaders du secteur éolien en mer en Allemagne démontre également une résilience perfectible des systèmes (5). Les installations, par nature assez éloignées des côtes, nécessitent des infrastructures cybernétiques plus étendues que leurs homologues terrestres. Ainsi, la sécurisation des réseaux informatiques devient un enjeu de premier ordre face à des acteurs malveillants cherchant à exploiter les failles des systèmes dans le but d’altérer voire de paralyser la distribution d’électricité dans le réseau terrestre national. Là encore, les conséquences d’une mise à l’arrêt des services ont un impact difficilement quantifiable sur les abonnés et sur la stabilité du marché de l’énergie. À l’heure où l’offre énergétique cristallise les tensions et où les besoins s’avèrent toujours plus importants, l’exploitation d’une faille de sécurité au sein d’un réseau informatique pilotant la distribution électrique serait une menace directe pour les intérêts vitaux de la nation. Dès lors, industriels et acteurs étatiques n’ont d’autre choix que celui de partager les données issues des capteurs de sûreté à dessein de protéger des installations en mer hautement sensibles.

Stratégie de maîtrise des fonds marins

Forte de la deuxième plus grande zone économique exclusive mondiale avec plus de 11 millions de km2, représentant un potentiel de ressources considérables et convoitées, la France maintient une large connaissance et une expertise reconnue des fonds marins. Cet environnement à la fois discontinu, complexe et hostile pour l’homme – dont un cinquième seulement de la topologie mondiale est connu et dont trois quarts des fonds se situent à plus de 3 000 mètres avec une pression dépassant parfois jusqu’à 300 fois la pression atmosphérique – se définit aujourd’hui comme un nouvel espace de compétition entre États.

Cette compétition s’illustre particulièrement dans la volonté d’accéder aux ressources minières du sous-sol marin contenant des nodules polymétalliques, tels que le cobalt, le nickel et le manganèse, ce dernier demeurant essentiel aux technologies de communication. C’est pourquoi le deepsea retient toute l’attention des industriels de la tech et de la bio-santé, qui conduisent des campagnes d’exploration toujours plus nombreuses et sophistiquées. Cette course effrénée à l’accès aux grands fonds se traduit notamment par le développement des robots sous-marins contrôlés à distance, dits ROV (Remotely opareted underwater vehicle) et autres robots totalement autonomes, dits AUV (Autonomous underwater vehicle). Sur ce segment, l’industriel français Exail technologies, un des leaders du secteur qui propose le drone Ulyx dont la capacité en plongée atteint 5 900 mètres après sa campagne d’essais dans l’Atlantique nord en septembre 2023, intéresse particulièrement le milieu de la défense. Par ailleurs, Naval Group lance une campagne d’essais de son premier démonstrateur de drone sous-marin (6) alors que le sous-marin d’exploration scientifique Nautile de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), lui aussi capable d’atteindre 6 000 mètres, fêtait ses 40 ans d’exploitation en 2024. Le savoir-faire français en la matière n’est donc plus à démontrer. En revanche, il demeure à consolider et c’est bien là tout l’objectif du point 10 du plan France 2023 qui rassemble autour de la Marine nationale le développement de la stratégie globale de « maîtrise des fonds marins » (MFM) dont son spectre d’opérations associé (7). Outre la recherche scientifique, l’intérêt réside particulièrement dans l’acquisition de drones aptes à conduire des opérations militaires (renseignement, surveillance, défense des intérêts nationaux) bien au-delà des profondeurs actuellement exploitées par les sous-marins conventionnels. À cette fin, la Russie poursuit – notamment autour du sous-marin Belgorod – un programme de méga-torpille et de drones sous-marin baptisé Poséidon, dont la capacité d’emport n’est d’autre qu’une charge thermonucléaire (8). Dans une autre mesure, les drones AS-37 et AS-39 opèrent déjà jusqu’à des profondeurs de 6 000 mètres et sont mis en œuvre depuis le navire océanographique Yantar lors de missions « exploratoires ». Par ailleurs, le Yantar croisait en novembre 2024 entre l’Irlande et le Royaume-Uni, dans une zone particulièrement dense en connexions sous-marines et, plus récemment, au large de la Corse. De son côté, la Chine ne demeure pas en reste et vient récemment de compléter sa flotte avec la mise à l’eau en novembre dernier du plus gros drone sous-marin jamais construit (43 mètres et 450 tonnes) dont les performances atteindraient des records. Dans le même temps la réception du brise-glace océanographique multifonctionnel Tansuo-3 (104 mètres et 10 000 tonnes) marque la volonté chinoise de s’imposer dans ce domaine. Ce dernier intègre notamment un véhicule sous-marin habité pour l’exploration profonde, nommé Shenhai Yongshi, littéralement « guerrier des mers profondes ». Alors que la compétition repousse sans cesse de nouvelles limites, la maitrise de ces outils devient un enjeu de développement et de puissance majeur pour les États côtiers souhaitant faire valoir leurs intérêts en mer. Ainsi, dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes, la Marine nationale et la Direction générale de l’armement (DGA) tendent à se maintenir dans la course en développant ses drones d’exploration et de surveillance, actuellement en phase de test depuis 2023 et principalement au cours des missions Calliope.

Face à la pression exercée par nos compétiteurs stratégiques, le seabed warfare réintègre les états-majors dans la formule « connaître surveiller et agir ». Cet aspect, émanant du concept de guerre hybride dont les actions reposent sur la combinaison d’instruments de puissances conventionnels ou non conventionnels et de méthodes subversives, impose désormais aux États côtiers une vigilance permanente et multi-milieu, nécessitant des ressources importantes. C’est particulièrement le cas de la surveillance du 1,3 million de kilomètres de câble de fibre optique sous-marine, acheminant 99 % du trafic Internet mondial, ou encore des réseaux de gazoducs sous-marins présentant tous deux des vulnérabilités. Pour exemple et rien qu’au cours de l’année 2022, le sabotage des deux gazoducs Nordstream entre l’Allemagne et la Russie en mer baltique (9) et celui des câbles de communications entre l’Écosse et les îles Féroé (10) démontrent la volonté ferme de certains compétiteurs à conduire des actions déstabilisatrices sur ce segment. Le ralentissement de l’approvisionnement énergétique ou des services internet demeurent des types d’attaque probables pouvant efficacement nuire à un pays. « Auparavant simple théâtre de conflits, la mer est devenue objet de conflits » rappelait le professeur Hervé Coutau-Bégarie dès 1983 (11). En novembre 2024, le Yi Peng 3, un cargo chinois a été immobilisé par les autorités danoises, car soupçonné d’avoir lui aussi laissé traîner son ancre afin d’arracher des câbles de télécommunication entre la Finlande et l’Estonie (12). Niant toutes responsabilités dans cet incident, Pékin demeure toutefois ouvert à la coopération tandis que le navire a été autorisé à poursuivre sa route. Par la suite il transitera par la Méditerranée, espace maritime qui accueille notamment le plus gros hub de câbles sous-marin d’Europe, dont la station d’atterrage est située dans les approches de Marseille. Or, si l’évaluation de tels sabotages est difficilement quantifiable sur l’économie globale et malgré une redondance éprouvée des connexions, l’affaiblissement de secteurs de production et de certains services privés constitue une éventualité non négligeable. Ainsi, face à des intérêts souverains directement menacés par d’autres puissances, les États côtiers doivent relever des défis d’investissement, de recherche et développement ou de modernisation toujours plus nombreux, en mobilisant pleinement leurs marines.

Numériser et renforcer la sécurisation des approches maritimes

L’accroissement des flux maritimes – par le trafic commercial, la pêche, l’exploration et l’exploitation gazière et pétrolière ou encore l’essor de l’énergie renouvelable en mer – impose une pression constante sur les approches côtières. Dès lors, comment concilier la gestion des espaces, des ressources, des risques environnementaux, la prévention des trafics ou l’assistance et le sauvetage, sans compiler des masses considérables de données issues de multiples capteurs ? Cette équation périlleuse demeure un sujet majeur de préoccupation pour la défense militaire du territoire, reposant notamment sur la chaîne de surveillance du littoral. Les Cross, assurant les opérations de sauvetage et de régulation du trafic, particulièrement en Manche-mer du Nord, ainsi que les 59 sémaphores repartis sur le littoral métropolitain, concentrent de plus en plus d’informations numériques maritimes. La compilation des données est à ce jour effectuée depuis 2002 à partir de l’applicatif Spationav, produit par Airbus et commercialisé comme le service le plus complet d’Europe. Architecturé autour d’un immense réseau couvrant la métropole et les outre-mer, ce système met en relation sémaphores, Cross, centres opérationnels de la Marine, des douanes et de la gendarmerie maritime ainsi que le Centre opérationnel de la fonction garde-côte, coordinateur global implanté à Paris. La visualisation de l’ensemble du trafic maritime est partagée, collectant ainsi des milliers de données AIS (13) et radars issus des capteurs terrestres côtiers. Dès lors, tout l’enjeu réside dans l’amélioration de l’exploitation des données face à la multiplication des acteurs maritimes, des flux, des activités illicites et des situations à risques. Pour comprendre cet océan numérique complexe et pouvoir en analyser les risques et les conséquences, le recours à des experts datascientists – échafaudant la surveillance 2.0 de nos espaces maritimes – est désormais primordial. Le développement d’applications dédiées comme l’applicatif ANAIS, porté par le ministère des Armées depuis 2019, chargé de l’analyse des incohérences de situation maritime en est une bonne illustration (14).

Si l’une des missions d’un État côtier réside dans la maitrise de ses approches par la reconnaissance de tous navires évoluant dans ou à proximité immédiate de sa mer territoriale, certaines failles demeurent. Il est effectivement possible de passer « sous les radars » en éteignant ou en modifiant son transpondeur AIS afin de se dissimuler ou de conduire des activités illégales. C’est particulièrement le cas de la flotte de pêche chinoise, plus importante flotte du monde, qui colonise toutes les eaux poissonneuses du globe et représente à la fois une menace pour les ressources halieutiques mais également pour la souveraineté économique des États dans leurs Zones économiques exclusives (ZEE). Le cas des ZEE françaises en Polynésie et au sud de l’océan Indien ne fait évidemment pas exception à cette règle. Outre la pêche, de discrètes incursions de compétiteurs stratégiques sont également manifestes, visant potentiellement à conduire des opérations de renseignement voire d’ingérence, en employant des navires au statut plus ou moins hybride. Là encore s’illustre le navire scientifique russe Yantar, évoluant sans AIS dans les eaux européennes et dont la présence demeure un sujet d’attention (15). Incursions, surveillance au large ou détection d’activités illicites comme l’immigration clandestine ou le trafic de stupéfiants, militent à la fois pour une augmentation des performances des radars terrestres mais aussi pour le développement de solutions de surveillance novatrices. L’intégration et l’exploitation de capteurs spatiaux, tels que les constellations satellitaires, dans la surveillance maritime fait évidemment partie des solutions.

À ce titre, l’interception de signaux de radiofréquences émis par les navires par une constellation de nano satellites fait partie des outils développés par la startup française Unseenlab, via les réseaux satellitaires européens en service. Or, une société privée disposant de son propre réseau satellitaire, telle que Starlink le propose aujourd’hui, pourrait aussi bien privatiser demain la surveillance spatiale en commercialisant ses services aux États.

Enfin, d’un point de vue technique, l’océan numérique généré par la collecte, le stockage, la fusion et l’exploitation des données, impose aux États de nouveaux investissements dans la génération de super serveurs associés à d’importantes puissances de calcul et de fortes garanties de cybersécurité afin de préserver l’inviolabilité des données. Par ailleurs, si la défense européenne est encore un sujet qui peine à faire consensus, la surveillance maritime européenne a davantage le vent en poupe. À terme, Spationav pourrait être interconnecté avec le système allemand Deutsche Kuste ainsi que les systèmes espagnol, italien et portugais, même si pour l’heure ces systèmes demeurent indépendants. Toutefois, la surveillance du littoral européen se heurte encore aujourd’hui à la compatibilité des systèmes d’exploitation et à la volonté de coopération entre les États. C’est pourquoi afin d’insuffler un nouvel effort, l’Union européenne développe le réseau CISE (Common Information Sharing Environement) qui sera dédié au partage de l’information pour les autorités en charge de la sécurité et de la surveillance (16). Plus de 300 agences pourront alors inter-opérer dans les domaines de la défense, de la protection des approches et des frontières, de la surveillance des pêches, du sauvetage, de la lutte contre les pollutions et les trafics illicites. L’objectif vise davantage de coopération pour plus d’efficacité à travers une mise en commun des bases de données qui procurerait l’avantage d’une vision commune de la situation maritime européenne. En revanche, elle ne garantira pas plus de patrouilles sans une volonté ferme des États à investir dans des unités de surveillance maritime.

Conclusion

L’économie littorale soutient naturellement une multiplication des acteurs favorisant ainsi les échanges. Or, la réalité démontre que c’est via ces échanges que se dissimulent trafic, pillage, espionnage ou sabotage. Identifier les menaces, coopérer et partager la Data maritime deviennent des actions incontournables pour les puissances maritimes. L’intégration de la surveillance multi-milieux (surface, sous-marines, cyber, spatiale), potentiellement couplée à une Intelligence artificielle (IA), incite les États côtiers à sortir des schémas traditionnels, à se tourner vers des technologies nouvelles, et à valoriser la formation d’un échelon de défense côtière robuste, afin de préserver leurs intérêts souverains. C’est un des objectifs prioritaires de la France, qui accueillait cette année à Paris le Sommet pour l’action sur l’IA. ♦


(1) Ministère de la transition écologique et solidaire, Stratégie nationale bas-carbone : La transition écologique et solidaire vers la neutralité carbone, mars 2020 (www.ecologie.gouv.fr/).
(2) Macron Emmanuel, « Discours sur la politique de l’énergie », 10 février 2022 (www.vie-publique.fr/).
(3) Ibidem.
(4) Agence France Presse (AFP), « Panne d’un câble sous-marin en Baltique : le pétrolier suspect en provenance de Russie a été arraisonné », Le Monde, 26 décembre 2024 (www.lemonde.fr/).
(5) Terrasson Benjamin, « Les éoliennes allemandes, nouvelles cibles des pirates russes ? », Siècle Digital, 27 avril 2022 (https://siecledigital.fr/2022/04/27/les-eoliennes-allemandes-nouvelles-cibles-des-pirates-russes/).
(6) « Naval Group va réaliser un démonstrateur de drone sous-marin autonome pour la Direction Générale de l’Armement » (communiqué de presse), Navel Group, 30 janvier 2024 (www.naval-group.com/).
(7) Gouvernement, France 2030, 12 octobre 2021, p. 9 (www.economie.gouv.fr/).
(8) Maitre Emmanuelle, « Torpilles nucléaires : que sait-on du programme Poséidon ? », Fondation pour la recherche stratégique, Observatoire de la dissuasion n°106, mars 2023 (www.frstrategie.org/).
(9) AFP, « Fuites de gaz sur Nord Stream 1 et 2 : ce que l’on sait des soupçons de sabotage en mer Baltique », Le Monde, 27 septembre 2022 (www.lemonde.fr/).
(10) AFP, « Écosse : la rupture d’un câble sous-marin isole les îles Shetland », Le Figaro, 20 octobre 2022 (https://www.lefigaro.fr/flash-eco/ecosse-la-rupture-d-un-cable-sous-marin-isole-les-iles-shetland-20221020).
(11) Coutau-Bégarie Hervé, La puissance maritime soviétique, Ifri-Economica, 1983, p. 10.
(12) « Le Danemark s’intéresse à un vraquier chinois après la rupture de câbles sous-marins en mer Baltique », Le Marin – Ouest France, 22 novembre 2024 (https://lemarin.ouest-france.fr/).
(13) Systèmes d’identification automatique (AIS) : émetteurs obligatoires pour les navires de plus de 300 U UMS et tous navires à passagers selon la convention SOLAS.
(14) Ministère des Armées (Minarm), « ANAIS » (www.defense.gouv.fr/).
(15) Mounier Jean-Luc, « Soupçons d’espionnage : un navire russe nommé Yantar dans les eaux européennes », France 24, 29 janvier 2025 (www.france24.com/).
(16) « Common information sharing environment (CISE) » (https://oceans-and-fisheries.ec.europa.eu/).

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