La pression militaire et les promesses de Trump échouent face à Poutine. La Chine et la Russie réécrivent l’histoire, tandis que l’Ukraine subit des frappes ciblant son gouvernement. Washington doit agir pour rester crédible.
Éditorial — Washington au pied du mur (T 1747)
Kremlin.ru (via Wikimedia Commons)
Editorial —Washington with its back against the wall
Trump's military pressure and promises are failing Putin. China and Russia are rewriting history, while Ukraine is suffering strikes targeting its government. Washington must act to maintain its credibility.
Il ne suffit pas de rebaptiser le Département de la défense en War Department pour imposer sa volonté sur la scène internationale. Certes, il est assez facile d’exercer une pression militaire sur le Vénézuéla en y projetant plusieurs navires de l’US Navy et des F35 à proximité. Il est également aisé de déployer la Garde nationale dans certaines villes américaines tenues par des Démocrates ; face à Vladimir Poutine, c’est beaucoup plus compliqué.
Il est vrai que pour Donald Trump, ce conflit qu’il devait régler en 24 heures n’était pas vraiment existentiel pour lui. Au mieux, un locataire – l’Ukraine – refusant de payer son loyer à son propriétaire, la Russie. Un conflit marginal, compliqué à comprendre en l’absence de culture historique et géopolitique de la part du locataire de la Maison Blanche. Au pire, un problème pour des Européens qu’il n’aime pas et qui devait donc se traduire par la reconnaissance des revendications de Vladimir Poutine. Il faut également rajouter que Donald Trump considère qu’il s’agit de la guerre de Joe Biden, responsable, selon lui, de tous les maux de l’Amérique.
Mais voilà, rien ne fonctionne comme prévu et, avec le recul du temps, la séquence inaugurée par le sommet d’Anchorage, le 15 août dernier, avec de vagues promesses de la part du Tsar de toutes les Russies s’est poursuivie avec l’apothéose de la parade militaire à Pékin la semaine dernière où l’histoire a été réécrite et où le futur a été écrit. Réécriture de l’histoire dans la mesure où Pékin fêtait les 80 ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale – commencée en 1937 dans la région – en occultant complètement le fait que l’aide américaine fut essentielle pour la république de Chine (pas encore « populaire »). L’URSS n’est entrée en guerre contre le Japon que le 8 août 1945, soit moins d’un mois avant la capitulation de Tokyo ; mais c’est Vladimir Poutine qui a raflé la mise en étant sur la photo.
Par ailleurs, même si l’Armée populaire de libération (APL) n’a pas de véritable expérience opérationnelle depuis la guerre perdue contre le Vietnam en 1979, il s’agissait d’une véritable démonstration de force et d’unité. Avec une cérémonie au millimètre et des déploiements de matériels conséquents dont des vecteurs balistiques à capacité nucléaire. Et les images de rigueur et de masse faisaient contraste par rapport à la pitoyable parade de juin dernier à l’occasion des 250 ans de l’US Army et, surtout, de l’anniversaire de Donald Trump.
Au défilé chinois, il faut rajouter la présence de Kim Jong-un. Trois dirigeants de pays à capacité nucléaire présents Place Tien An Men. Sans oublier que le Premier ministre indien Narendra Modi avait participé, la veille, au sommet de l’Organisation de coopération de Shanghaï (OCS) à Tianjin mais que, pour des questions diplomatiques, il s’est abstenu de participer au show de Pékin.
Et ce dimanche 7, le Kremlin a lancé sa vague de bombardement la plus intense depuis le début de la guerre sur une grande partie du pays mais surtout en ciblant le palais du gouvernement en plein cœur de Kyiv. Un signal fort, dans la logique de vouloir la capitulation de l’Ukraine, dont Moscou par ailleurs conteste la légitimité politique avec des arguties juridiques tellement typiques de la diplomatie soviétique de Molotov puis de Gromyko.
Cette frappe volontaire marque le franchissement d’une ligne rouge car ciblant délibérément le gouvernement ukrainien. Certes, les dirigeants européens dont le président Macron ont immédiatement condamné cette attaque injustifiée et cruelle. Désormais, la vraie réponse sera celle de Washington. Après tellement de concessions et de reports d’ultimatum, il ne suffira plus à Donald Trump de dire qu’il n’est pas content de son ami Vladimir. Il faut passer aux actes pour que le président des États-Unis reste un minimum crédible sur la scène internationale. Cela peut passer par de nouvelles sanctions pour réellement asphyxier l’économie russe totalement dépendante de ses exportations d’hydrocarbures. Les Européens ont fait beaucoup et dépassent depuis plusieurs mois les États-Unis quant à l’aide fournie à l’Ukraine. Maintenant, c’est Washington qui doit assumer ses responsabilités, quitte à frustrer les militants MAGA, isolationnistes et aveuglés par le bling-bling trumpien.
L’épreuve de force est engagée. Et ce ne sont pas les images générées par l’IA d’un Trump triomphant qui suffiront à restaurer celle de l’Amérique.