Dans cet article en deux parties, Philippe Le Corre analyse la teneur des relations entre l'Union européenne, la Chine et l'Inde. L’UE, confrontée à une Chine perçue comme un rival systémique et à des relations tendues depuis 2020, se tourne vers l’Inde comme partenaire stratégique alternatif. New Delhi, en pleine ascension économique et géopolitique, devient un pivot pour diversifier les alliances face à Pékin et Washington.
A new triangle: The interaction between China and EU-India relations (1/2)
In this two-part article, Philippe Le Corre analyzes the nature of relations between the European Union, China, and India. Faced with a China perceived as a systemic rival and strained relations since 2020, the EU is turning to India as an alternative strategic partner. New Delhi, experiencing rapid economic and geopolitical growth, is becoming a pivotal player in diversifying alliances in the face of Beijing and Washington.
Si la Chine – géant asiatique qui n’a cessé de monter en puissance – a façonné la relation entre les États-Unis et l’Inde pendant des décennies (1), une nouvelle dynamique trilatérale significative émerge aujourd’hui entre l’Union européenne (UE), la Chine et l’Inde. Depuis plusieurs années, les dirigeants indiens et européens renforcent en effet leurs liens. Ils considèrent la Chine comme un rival économique et sécuritaire redoutable, tout en voyant les États-Unis comme un partenaire-clé en matière de sécurité et, dans le cas de l’Europe, un allié de longue date.
Quel est l’état actuel des relations UE-Chine et UE-Inde ? Alors que l’influence et l’attrait économique de l’Inde augmentent, pourrait-elle devenir une alternative viable à la Chine pour les dirigeants d’entreprises et les décideurs politiques européens ? Comment Bruxelles intègre-t-elle l’Inde dans ses stratégies pour faire face à une éventuelle crise en Asie ou en Indo-Pacifique plus largement ?
Il y a vingt-cinq ans, l’Union européenne considérait la Chine comme une priorité absolue pour le commerce, les échanges culturels et la diplomatie. À la suite de l’introduction de la « politique de la porte ouverte » de Pékin en 1978 et le fort encouragement des autorités chinoises, les entreprises européennes ont afflué en Chine. Initialement, de nombreuses entreprises utilisaient Hong Kong comme intermédiaire pour les affaires, mais dès le milieu des années 1990, la province de Guangdong et la municipalité de Shanghai sont devenues des portes d’entrée clés sur le marché chinois, en particulier pour l’Allemagne et la France (2). Le commerce et les investissements ont fortement augmenté, notamment après l’adhésion de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en 2001, largement soutenue par les élites politiques et économiques européennes. Aujourd’hui, la Chine est le troisième partenaire commercial de l’UE, avec des investissements européens substantiels dans le pays.
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