L’Europe entre défis et réalités géopolitiques. La nouvelle stratégie américaine de 2025 marque un tournant : Washington confirme privilégier ses intérêts, laissant l’Ukraine et l’Europe face à des choix difficiles. Entre pressions russes et reconfigurations transatlantiques, l’Union européenne doit renforcer son unité et sa défense pour préserver sa souveraineté face aux menaces croissantes.
Éditorial – Peur sur l’Europe (T 1779)
Editorial —Fear in Europe
Europe faces challenges and geopolitical realities. The new American strategy for 2025 marks a turning point: Washington confirms its prioritization of its own interests, leaving Ukraine and Europe with difficult choices. Between Russian pressure and transatlantic realignments, the European Union must strengthen its unity and defense to preserve its sovereignty in the face of growing threats.
La publication, vendredi dernier, de la nouvelle version de la Stratégie nationale américaine marque une rupture profonde, brutale et certainement durable entre l’Europe, le Vieux continent, et la « Nouvelle Amérique » selon Donald Trump. Ce texte très idéologique et très agressif notamment à l’égard des Européens ne peut qu’accroître le désarroi de ces derniers, tandis que Moscou accueille avec satisfaction ce document qui lui « convient ».
Et au milieu, l’Ukraine, que le Président américain lâche chaque jour un peu plus, recherchant effectivement un nouveau Yalta avec Vladimir Poutine, tout en entérinant, de facto, un nouveau Munich. Il ne faut pas se faire d’illusion et bien comprendre qu’en cette fin d’année 2025, la sécurité de l’Europe a totalement basculé et se retrouve dans une situation inédite comme personne ne l’avait connu depuis des décennies. C’est donc une épreuve de vérité face à un nouveau triumvirat, Trump, Poutine et, ne l’oublions pas, Xi, qui impose sa vision du monde autour du rapport de force et de zones d’influence avec des pays vassaux, où ces trois imperatores veulent dicter leur loi et mettre à bas les normes internationales laborieusement construites depuis 1945.
Pour Washington, la cause de l’Ukraine est définitivement bouclée, avec la volonté d’aller vite, d’autant plus que le Kremlin promet des montagnes de « deals » économiques : la capitulation de Kyiv avec de vagues promesses n’engageant pas militairement les États-Unis. D’autant plus intéressant pour Moscou que cela lui laisserait le temps de reconstituer son potentiel militaire d’ici trois à quatre ans avec des forces très aguerries, c’est-à-dire une fois que Donald Trump aura quitté la Maison Blanche pour achever la tâche historique que Vladimir Poutine s’est fixée depuis des années : rétablir l’empire. Et donc d’ouvrir, ou plutôt de continuer, une période de guerre hybride de haute intensité (un concept que je souhaite développer prochainement) contre l’Europe avec une multiplication des actions de toute nature. Il faut ici rappeler que Vladimir Poutine veut un retour à avant 1997 pour l’Otan, et ainsi rétablir la sphère d’influence du défunt Pacte de Varsovie sur ses anciens membres, ce qui est inacceptable, que l’on soit Polonais, Balte ou Finlandais, notamment. La multiplication des incidents – survol de drones, de ballons, espionnage, sabotage, désinformation, manipulation des opinions et des élections, y compris locales, activation des réseaux pro-russes, ingérence permanente, déstabilisation… la liste est longue – va accroître les tensions avec un objectif clairement assumé par Moscou : la fracturation de l’Union européenne, désormais souhaitée par Washington !
C’est donc bien une bascule historique – sans galvauder le terme – où se referme une certaine conception de l’ordre international dans lequel le projet européen avait toute sa légitimité, fort de ce lien transatlantique qui avait été forgé dans le sang des plages de Normandie et dans la libération du nazisme. Dans lequel, au temps de la guerre froide, ce lien incarnait la démocratie et la liberté face au totalitarisme soviétique et à l’absence de liberté, où progressivement les peuples de l’Europe de l’Est surent gagner leur indépendance, malgré la répression policière. Désormais pour les Européens, la priorité est de rester unis et de faire face, dans un contexte d’adversité de la part de Washington et d’hostilité de la part de Moscou. Cela fait beaucoup ! ♦
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