Retourné en Chine pour un quatrième voyage, Robert Guillain note ses impressions avec une précision et une netteté qui lui font honneur ; son opinion se résume essentiellement dans une phrase de l’avant-propos : « Quand les dirigeants de Pékin affirment qu’ils ont, dans l’ensemble, réussi, je crois qu’ils disent la vérité ». Le livre est un développement de cette phrase.

Il est d’une lecture fort instructive et passionnante. L’auteur décrit dans un style alerte et clair ce qu’il a vu ; il apporte un témoignage dont le lecteur tirera les conclusions qu’il désirera : Robert Guillain rapporte tout autant les réussites apparentes que les échecs et les insuffisances encore bien nombreuses.

Il peint un peuple de sept cents millions d’hommes entièrement transformé par le communisme, en ayant accepté la discipline et s’étant débarrassé de la tension qu’il subissait autrefois : un peuple qui a recommencé à sourire, mais dont la vie, assurée sur le plan alimentaire, reste encore d’un niveau très bas ; un pays qui, tout en fabriquant des bombes atomiques, se contente de rares automobiles et se sert de « vélopousses » ; une race prolifique qui accepte l’idée de la limitation volontaire des naissances, même si elle éprouve encore pratiquement des difficultés à l’appliquer ; « sept cents millions de Mao » dont l’ambition est de ressembler au maître de la Chine.

Actuellement, ce peuple croit en lui-même, se soucie peu de ce que pense de lui le reste du monde, poursuit sa route et sa tâche avec une foi certaine. Dans trente ans, il sera devenu une des principales puissances, sinon la principale. Ce n’est qu’alors qu’il entrera vraiment en scène. L’auteur souhaite qu’à ce moment le monde soit prêt à l’accueillir et qu’il soit lui-même plus disposé à entrer en contact amical avec les autres nations.

Cette peinture de la Chine d’aujourd’hui, dans laquelle il faut voir ce que sera celle de demain, est indispensable à la compréhension du monde moderne et de ses immenses transformations, qui se produisent sous nos yeux sans que souvent nous sachions ou voulions les voir. C’est pourquoi ce livre nous paraît important ; il explique avec une netteté remarquable, dépouillée de tout pesant appareil statistique, pourquoi la Chine est ce qu’elle est et deviendra bientôt, vers l’an 2000, ce qu’un observateur lucide peut dès maintenant prévoir.

En résumé, un livre qu’il faut lire. ♦