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Le voyage du président Nixon à Moscou (mai 1972) a consacré l’accord des deux super-Grands sur la nécessité de freiner la course aux armements stratégiques, ouverte par la mise au point des missiles antimissiles et des engins à ogives multiples, les premiers visant à renforcer les potentialités défensives, les seconds à les saturer, donc à redonner la primauté à l’attaque. À la différence du Traité de 1963 sur l’interdiction partielle des essais nucléaires, et de celui de 1968 sur la non-prolifération des forces nucléaires (TNP), celui-ci [NDLR 2021 : Traité ABM] ne concerne que les deux pays, qui ont pris en commun conscience des risques impliqués par les puissances à peu près équivalentes qu’ils détiennent, et qui ont placé cette conscience au-dessus de leurs divergences idéologiques.
Rarement dans l’histoire, pour ne pas dire jamais, des armes n’ont joué un rôle aussi déterminant dans la diplomatie. Étant admis, et l’accord de Moscou le laisse entrevoir, que les deux États améliorent leurs relations directes, concluent des accords qui les concernent seuls, dans quelle mesure peuvent-ils s’entendre à propos des conflits locaux ou intervenir dans la politique des « moins grands » ? On peut faire mille suppositions sur un troc entre des crédits commerciaux accordés par les États-Unis et une pression soviétique sur Hanoï : en fait, on ne sait rien des propos échangés par le président Nixon et M. Brejnev sur le Sud-Est asiatique et le Moyen-Orient.
Comment se manifestera, dans le monde, l’apparente contradiction entre les intérêts opposés et les relations améliorées des États-Unis et de l’Union soviétique ? Cette question s’éclaircira lors des prochaines réunions de certaines instances internationales, et c’est ainsi qu’elle se posera, indirectement, dès la fin de l’été, lors de l’ouverture de la session annuelle de l’Assemblée générale des Nations unies. Ce n’est pas confondre analyse et prophétie que penser que les deux super-Grands auront beaucoup de peine à imposer leurs vues communes (à supposer qu’ils en aient en dehors de leur commun intérêt en matière nucléaire), et la Chine, qui s’est dressée contre « le double impérialisme », ne se fera sans doute pas faute de stigmatiser l’accord de Moscou, en tentant de prendre la tête des « rebelles ». En d’autres temps, on a parlé du « non-engagement » de certains pays, notamment de ceux du Tiers-Monde, à l’égard des deux blocs. À cette structure tripolaire pourrait se substituer une structure bipolaire : les deux super-Grands et « les autres ». La vie internationale est devenue infiniment plus fluide qu’elle n’était il y a quelques années, et cette fluidité aura, à n’en pas douter, une expression dans les institutions internationales.
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