Cinéma - Grandeur et dignité
Négligeons pour une fois les vaudevilles et les caricatures plus ou moins spirituelles que le cinéma français se croit obligé de présenter périodiquement en prenant pour cible l’armée et ses serviteurs. Des productions comme La Victoire en chantant, qui vilipende les troupes coloniales de 1914, ou Le Jour de Gloire, où les militaires allemands sont sympathiques et les officiers américains naïfs, ne méritent que l’indifférence et l’oubli. En revanche, on retiendra de la programmation de ces dernières semaines le très beau film allemand de Volker Schlöndorff Le Coup de Grâce, adapté d’un roman de Marguerite Yourcenar. Des images judicieusement composées et des extérieurs remarquablement filmés y reconstituent l’atmosphère dramatique qui régnait à la fin de la Première Guerre mondiale dans les pays baltes.
Les troupes allemandes, prêtes à la débâcle, les débris de l’armée impériale russe, opposaient une dernière résistance aux bolcheviques triomphants. Le film de Volker Schlöndorff nous présente de la manière la plus digne et la plus pathétique ces militaires désemparés et désespérés. Sans avoir l’air d’y toucher, fauteur rappelle en même temps la responsabilité des Alliés qui n’ont pas voulu enrayer le péril rouge de l’époque.
C’est un sujet brûlant et beaucoup plus proche de nous qu’évoquent deux œuvres présentées simultanément sur nos écrans. Victoire à Entebbé et Raid sur Entebbé, dont les titres sont éloquents. Dans les deux cas. il s’agit d’une reconstitution plus ou moins « dramatisée » de l’expédition israélienne de juillet 1976 pour la libération des otages détenus en Ouganda. En attendant un troisième « rapport » cinématographique sur cet audacieux exploit connu sous le nom d’Opération Tonnerre (ce sera d’ailleurs le titre du troisième film), nous devons comparer les deux œuvres soumises au public actuellement. Les deux réalisateurs ont évidemment entouré le commando israélien de toute leur sympathie : c’est dans la présentation pratique de l’affaire que les différences apparaissent nettement. Dans Victoire à Entebbé, le metteur en scène Marvin Chomsky, homme de télévision plus que de cinéma, s’est penché avec plus d’attention, et plus de sensiblerie aussi, sur l’aspect humain du problème. Les chants et les prières des otages occupent plus de place que l’exploit militaire proprement dit qui constitue simplement le « clou » final. Certes, l’opération est reconstituée avec soin mais il semble bien que les producteurs aient manqué de moyens financiers. Aussi, Raid sur Entebbé d’Irvin Kershner est beaucoup plus spectaculaire. Les réactions des otages sont montrées avec plus de pudeur et de décence que dans le film de Marvin Chomsky, en revanche l’action militaire se prépare et se déroule pratiquement tout au long du film. Les répétitions de l’Opération Tonnerre et son exécution sont présentées avec minutie et le cinéaste prend soin d’en souligner tous les aspects. L’armée ougandaise joue ici un rôle alors que dans l’autre film elle est pratiquement escamotée. Quoi qu’il en soit, aussi bien dans Victoire à Entebbé que dans Raid sur Entebbé, les militaires israéliens sont en vedette avec cet exploit qui a stupéfié le monde.
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