Asie - Vietnam : vers la fin du tunnel ?
L’annonce, le 3 février 1994, de la levée de l’embargo américain sur le Vietnam a été considérée, bien prématurément, comme le retour du Vietnam dans la communauté économique internationale. Un colloque récent, organisé au Vietnam, a même été intitulé « Vietnam 1994 : naissance d’un nouveau dragon ? » Comme le montre l’exemple chinois, en ce qui concerne les États-Unis, la fin de l’embargo ne veut pas dire le statut de la nation la plus favorisée, seule condition d’un développement rapide des échanges. Malgré une amélioration sensible de la production de certains produits exportables, les infrastructures du commerce restent bien déficientes. La différence entre le Nord et le Sud s’accentue. Le régime qui, quatre ans avant Pékin, a instauré une économie de marché, s’accroche à des institutions et une idéologie dépassées, tandis qu’il durcit le ton avec ses intellectuels et les Églises, laissant les droits de l’homme dans une des situations les plus difficiles.
C’est en avril 1988 que par la décision n° 10 le bureau politique décidait de remplacer l’économie socialiste par « l’économie de marché à orientation socialiste ». Venue à point nommé, cette réforme semble avoir évité au Vietnam le rude contrecoup de la fin de l’aide soviétique et des pays de l’Est. Bien que les paysans aient maintenant l’usufruit des terres qu’ils cultivent sur la base d’un hectare pour trois travailleurs, ils ne peuvent toujours pas devenir propriétaires. La libre entreprise est encouragée. Depuis la loi sur les investissements étrangers, adoptée à la fin de l’année 1988 et plusieurs fois améliorée, les hommes d’affaires occidentaux et surtout ceux des pays dynamiques d’Asie peuvent fonder des sociétés mixtes et même à capitaux 100 % étrangers. Cette libéralisation économique a cependant ses limites puisque l’orientation socialiste est maintenue. Elle se manifeste par le maintien et la volonté de renforcement de lourdes entreprises d’État dans les domaines clés.
Malgré ces entraves, les premiers effets du changement se sont rapidement fait sentir. La production des céréales est passée de 21,4 millions de tonnes en 1989 au chiffre jamais égalé de 24,5 Mt en 1993 ; le riz avec 20 Mt en représente la quasi-totalité. Malgré une faible rentabilité, le Vietnam est devenu en 1990 le troisième pays exportateur mondial derrière la Thaïlande et les États-Unis, et exportateur pour la première fois depuis la réunification. En 1993, les exportations de riz se sont élevées à 1,7 Mt. La croissance de la production industrielle connaît également des taux élevés : 5,3 % en 1991, 14,5 % en 1992 et probablement 16 % en 1993. La production de pétrole, de 4 Mt en 1990, devrait atteindre les 6 M cette année. Ce brut est intégralement exporté vers Singapour et le Japon.
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