Défense dans le monde - Institution militaire et démocratie en Amérique latine
L’évolution des rapports entre l’institution militaire et les pouvoirs civils en Amérique latine domine l’histoire du continent sud-américain depuis les guerres d’indépendance. À une période de militarisation généralisée, dans les décennies 60 et 70, a succédé, depuis une quinzaine d’années, un retour progressif à des régimes démocratiques dans l’ensemble des pays de la zone.
Cette étude propose une appréciation des rapports actuels forces armées-gouvernements civils en Amérique latine, qui doit certes être modulée pays par pays. Elle évoque le nouveau contexte régional (1), qui semble éloigner, sinon toute possibilité de coup d’État militaire isolé, du moins la perspective d’un retour généralisé du « pouvoir militaire » dans le continent.
La démocratisation de la décennie 80 et ses limites
Après l’expérience de différents modèles socio-économiques instaurés ou soutenus par les forces armées (coup d’État militaire « industrialisant » au Brésil en 1964 (2), « national-populiste » au Pérou en 1968, de « droite-nationaliste » au Chili en 1973 et en Argentine en 1976…), les nouvelles politiques mises en œuvre localement ont conduit à un retour aux normes démocratiques traditionnelles. Incapables, dans leur grande majorité, de résoudre les problèmes socio-économiques de leur pays, peu préoccupés du respect des droits de l’homme, les dictateurs ou les juntes militaires ont succombé à un double phénomène de rejet et d’usure. Ainsi, entre 1979 et 1990, quatorze États latino-américains ont opté pour le retour à une administration civile. Ce processus, comparable à une réaction en chaîne, constitue un phénomène difficile à analyser. Si un effet de cycle et d’entraînement a joué son rôle dans cette évolution, les éléments propres à chaque pays ont également été déterminants. On peut schématiquement distinguer trois catégories de situations qui ont conduit à une transition démocratique : l’aboutissement d’un processus de désengagement voulu et conduit par les militaires eux-mêmes (les exemples brésilien, péruvien et chilien illustrent ce premier type d’évolution) ; l’effondrement du régime militaire provoqué par des éléments divers (défaite militaire dans le cas de l’Argentine, intervention extérieure pour Panama, échec d’une tentative d’institutionnalisation du régime par un « référendum plébiscite » en Uruguay) ; l’arrivée au pouvoir, par le biais d’une « révolution de palais », d’officiers décidés à rétablir, du moins formellement, les institutions démocratiques (Guatemala, Salvador, Honduras, Paraguay).
Il reste 79 % de l'article à lire
Plan de l'article