Au regard des évolutions géopolitiques actuelles et des orientations de l’administration Trump II, l’Otan doit réfléchir à son avenir avec des scénarios où la présence américaine serait moindre, voire nulle. Penser l’Otan sans les États-Unis est nécessaire pour affronter le chaos stratégique de demain.
L’Otan sans les États-Unis ?
NATO Without the United States?
In view of current geopolitical changes and of the directions taken by the second Trump administration, NATO needs to reflect on its future and look at scenarios with lesser, or even no US presence. Consideration of NATO without the United States is necessary for confronting future strategic chaos.
Penser l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (Otan) sans les États-Unis paraît une contradiction dans les termes, tant l’Alliance atlantique s’est construite depuis 1949 autour de deux piliers que sont le maintien du lien entre l’Europe et les États-Unis, et la présence militaire américaine en Europe. Robert Schumann déclarait ainsi au moment de la signature du traité de Washington qu’« aujourd’hui, nous obtenons ce que nous avons vainement espéré entre les deux guerres : les États-Unis reconnaissent qu’il n’y a ni paix ni sécurité pour l’Amérique si l’Europe est en danger ».
Même si elle rencontre une réelle tradition isolationniste de la politique étrangère américaine, l’hypothèse d’un retrait des États-Unis d’Europe et de l’Otan est longtemps restée théorique tant l’Alliance atlantique se trouvait au cœur de la « République impériale » pour reprendre l’expression de Raymond Aron qui décrit si bien la politique étrangère américaine pendant la guerre froide. L’élection (2016) puis la réélection (2024) de Donald Trump ont bousculé ces certitudes et justifient aujourd’hui de se livrer à l’expérience de pensée d’imaginer une Otan sans l’Amérique. Une telle réflexion revêt en effet une importance toute particulière tant la problématique des Alliances se trouve testée dans ces premiers mois de la nouvelle administration Trump. Chacun connaît la conception hétérodoxe et transactionnelle des alliances du Président des États-Unis qui se place nettement en rupture avec l’approche traditionnelle de la politique étrangère américaine qui, depuis 1949, voyait dans les alliances américaines le pilier de l’ordre international.
Réfléchir à ce qui pourrait apparaître comme une dystopie exige de poser quelques principes qui peuvent guider notre réflexion et nos conclusions. En premier lieu, l’hypothèse d’une forme de retrait des États-Unis de l’Otan n’est pas la plus probable mais elle n’est plus invraisemblable. En second lieu, un tel retrait n’est pas souhaitable même pour les plus ardents défenseurs d’une Europe puissance compte tenu du contexte stratégique. Enfin, il est cependant nécessaire et utile d’examiner cette hypothèse, a minima afin de se préparer à une forte réduction de l’engagement américain en Europe.
Il reste 88 % de l'article à lire
Plan de l'article