Les alliances militaires sont en pleine évolution. L’Otan en constitue un exemple le plus abouti, avec une efficacité reconnue et recherchée. Ce modèle est cependant remis en cause de l’intérieur suite au choc Trump. Les Européens se retrouvent désormais en première ligne, sans savoir si les États-Unis seront toujours disponibles pour garantir leur sécurité.
La recomposition des alliances militaires au XXIe siècle
Changes in Military Alliances in the 21st Century
Military alliances are rapidly evolving. NATO has gone furthest in this, its effectiveness being both recognised and sought after. The NATO model is nevertheless being questioned from within as a result of the shock delivered by Trump. Europeans now find themselves on the front line without knowing if the United States will always be available to guarantee their security.
« L’Otan est la dernière alliance militaire sur terre. Tout le reste se fait sous forme d’intégration régionale, de clubs ou d’alliances légères », pouvait-on lire fin 2024 sous la plume d’un expert reconnu des relations internationales (1). Cet expert oubliait ainsi l’existence de l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), les engagements de défense pris dans le cadre du Traité de Lisbonne et surtout les alliances bilatérales formelles des grandes puissances qui ont tendance à se multiplier plutôt qu’à disparaître.
Il est vrai que le terme « alliance » est ambigu, en tout cas qu’il a un sens général et un sens strict, et c’est ce dernier qu’on utilisera ici : celui d’un engagement de défense formalisé. Une alliance n’est ni une coalition, ni une organisation de sécurité collective. Un traité d’alliance n’est pas un simple accord de défense. Un partenariat stratégique non plus : l’AUKUS n’est pas une alliance, même si c’est un tissu d’alliances bilatérales formelles. Cependant, la sémantique reste, il est vrai, source de confusion. « L’Alliance des États du Sahel » n’est pas une alliance militaire. Lorsque vous êtes un « allié majeur non Otan », ce qui est un concept américain, vous n’êtes pas un allié militaire des États-Unis. En revanche, Israël, l’Arabie saoudite et Taïwan sont des « cas limites » : dans les documents officiels américains, on lit ainsi que la protection des États-Unis est conférée non seulement aux « alliés » mais aussi aux « partenaires ».
Par ailleurs, l’existence même d’un traité d’alliance en vigueur ne garantit pas sa pérennité dans les faits. Il y a quelques années, on pouvait lire sur le site du Pentagone que le plus vieux traité d’alliance conclu par les États-Unis qui soit encore en vigueur est… le « Traité d’amitié américano-marocain » (1786), où il est question de « vaisseaux mauresques » et de « puissances chrétiennes ». Il n’est pas certain qu’il soit encore pleinement d’actualité. Il reste que depuis 1945, les principales alliances militaires ont été remarquablement stables : l’Otan, les alliances américaines en Asie, le Pacte de Varsovie jusqu’en 1991. Cette stabilité de la guerre froide s’expliquait par la bipolarité du système, mais aussi par la capacité de ces alliances à planifier en commun, souvent à partir des mêmes matériels. On constate ainsi que ces alliances ont survécu à la fin de la guerre froide, même si l’OTSC n’est qu’un pâle ersatz du Pacte de Varsovie. Nous connaissons aujourd’hui une recomposition importante des alliances, dans un paysage marqué par la multiplication des partenariats de sécurité. On assiste d’une part, à une rétraction et un renouvellement des alliances à l’Est et d’autre part, à une consolidation et un élargissement des alliances à l’Ouest, mais qui pourrait bien sûr être mis en cause par Donald Trump. Cette recomposition des alliances est-elle bénéfique ou non à la stabilité internationale ?
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