La relation entre la Russie et l’Algérie reste marquée par des ambiguïtés. Certes, Alger est un bon client de l’armement russe mais les intérêts stratégiques des deux États ne convergent pas, malgré les déclarations d’intention des autorités. L’activisme russe au Sahel déstabilise ainsi l’approche algérienne notamment vis-à-vis des populations touaregs.
La Russie et l’Algérie : une proximité en trompe-l’œil
Russia and Algeria: a Trompe-l’œil Relationship
Relations between Russia and Algeria are notable for their ambiguity. Whilst Algiers is a good customer for Russian arms, the strategic interests of the two countries do not align despite official declarations of intent on both sides. Russian activism in the Sahel is destabilising Algerian policy, in particular with regard to the Tuareg population.
Quelques mois après l’invasion de l’Ukraine, la Russie a lancé une offensive diplomatique en dénonçant le « néocolonialisme occidental » en Afrique. Ses relations avec l’Algérie ont dès lors semblé prendre un nouvel envol à la faveur de rencontres au sommet et d’exercices militaires. Pour Moscou, l’Algérie, puissance régionale de 46 millions d’habitants, bénéficie de nombreux atouts : elle appartient à la Ligue arabe, à l’Union africaine et à l’Opep+ (1), entretient une relation historique avec la Russie et dispose du port de Mers el-Kébir que la marine russe convoite en Méditerranée. Pour Alger, la coopération avec la Russie constitue un pilier de sa défense et un contrepoids utile dans une période marquée par une forte contestation populaire et de sévères déconvenues diplomatiques.
Élu en décembre 2019, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a pu voir dans ce rapprochement un moyen de conforter son assise politique et sa stature d’homme d’État. Membre du Front de libération nationale (FLN) depuis 1970, il venait d’essuyer deux revers politiques. Sur le plan intérieur, sa réforme constitutionnelle de 2020 visant à récupérer le Hirak – un mouvement de protestation pacifique réclamant d’abord le départ du président Bouteflika grabataire, puis exigeant des réformes d’ampleur et une réelle séparation des pouvoirs – n’a suscité aucune adhésion dans la population. Sur le plan extérieur, le Maroc, rival traditionnel de l’Algérie, venait de rétablir ses relations avec Israël et de voir les États-Unis reconnaître sa souveraineté sur le Sahara occidental.
Sensible au discours anti-impérialiste russe pour des raisons historiques et idéologiques, Alger reste néanmoins fidèle à sa politique de non-alignement. L’Algérie ne peut ignorer la faiblesse relative de la relation économique et commerciale avec la Russie, ni les effets des actions militaires de groupes paramilitaires russes au Maghreb et dans le Sahel. Non seulement celles-ci portent atteinte à ses intérêts de sécurité, mais elles renforcent dans la région les positions des Émirats arabes unis (EAU), alliés du Maroc.
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