87 % : c’est, selon les calculs du géographe Michel Foucher, la part des frontières africaines dont le tracé est hérité de l’histoire coloniale ⁽¹⁾. La frontière constitue en Afrique un élément à la fois déterminé et déterminant, qu’il est nécessaire d’explorer en profondeur. Ce même Foucher la définit comme « du temps inscrit dans l’espace » ⁽²⁾ – c’est représentatif de l’évolution des frontières africaines. La frontière est un événement historique autant qu’un fait géographique. Elle est construite au fil des transformations politiques, des dominations et des résistances. Sa formation exige une étude sur la longue durée car elle ne relève pas d’une cause unique.

Dans notre étude, nous explorerons cette question du milieu du XIX^e siècle jusqu’à nos jours. Cette période englobe à la fois le développement des empires coloniaux européens et les dynamiques de décolonisation ainsi que la redéfinition des souverainetés. Il s’agit donc de comprendre comment les frontières africaines ont été façonnées, contestées, puis parfois réappropriées, au croisement des logiques extérieures de domination et des aspirations locales à l’émancipation, ce qui conduit à se poser la question suivante : dans quelle mesure le sujet des frontières de l’Afrique depuis le XIX^e siècle constitue-t-il une diachronie complexe entre influence occidentale et volonté d’émancipation ? 

Nous verrons le processus de formation des frontières à l’époque coloniale, puis leur héritage après les indépendances, avant d’aborder les enjeux actuels liés à leur insécurité et recomposition.