L’ambivalence de la position française au sein de l’Alliance atlantique s'explique par le désir de Paris de privilégier la construction d'une identité européenne de sécurité et de défense, tout en jouant un rôle plus important au sein des structures de l’Otan. En s'imposant comme un nouveau défi sécuritaire, le terrorisme a bouleversé les schémas tactiques traditionnels concernant l'utilisation des outils de l’Otan. Dès lors se trouve posée la double question de la redéfinition de la France dans la structure de l'Otan, et sa perception de la lutte contre le terrorisme et du rôle du tandem UE-Otan pour y faire face.
La France dans une Otan en évolution
France in an envolving NATO
The ambivalence of the French posture within the Atlantic Alliance can be explained by the desire, in Paris, to favour the construction of a European security and defence identity while at the same time playing an important role within the NATO structures. By imposing itself as a new security threat, terrorism has thrown NATO’s traditional tactical scenarios into disarray. This in turn poses a double question, of the redefinition of France’s role in NATO, and of its perception of the fight against terrorism and the role of the EU-NATO tandem in confronting it.
Depuis la fin de la guerre froide, la France occupe une position ambiguë au sein de l’Otan, avec la tentative de rapprochement du commandement unique en 1995, le contrôle systématique du ciblage au Kosovo, la crise irakienne et la création d’un état-major européen. Illustration de cette ambiguïté : le désir manifesté par Paris de développer une Europe de la défense, sans pour autant tourner le dos à l’Otan. « Pour que notre Alliance soit toujours forte et solide, pour qu’elle soit respectueuse des positions de ses membres, encore faut-il que l’Europe acquière une véritable réalité militaire. Œuvrer à l’Europe de la défense, c’est contribuer à la vitalité du lien transatlantique. C’est préserver notre avenir commun. Une Europe plus forte, c’est une Alliance plus forte » (1). Une Otan « boîte à outils » en quelque sorte, mais sans que soient précisées les conditions selon lesquelles la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD) s’articule avec l’Otan. En fait, à mesure que l’Europe de la défense devient une réalité, l’Alliance s’adapte simultanément dans le sens souhaité par la France, ce qui explique le soutien de Paris à une Otan qui évolue, notamment sous l’effet des réformes qui ont suivi le choc du 11 septembre 2001. Après avoir rappelé comment la France conçoit les rapports entre l’UE et l’Otan, on s’interrogera sur leurs compétences respectives face au terrorisme : car le futur des relations transatlantiques dépend au fond de la réponse à cette question.
Après le 11 septembre 2001
Dans le processus de construction d’une Europe de la défense, les Alliés européens ont dans leur ensemble plaidé pour un plus grand équilibre entre les deux organisations en matière prise de décision. L’attribution de responsabilités à l’adjoint européen du Saceur a permis de mettre à la disposition de l’UE la direction d’opérations. Il s’agit de la réforme la plus importante définie dans le nouveau concept stratégique de l’Alliance de 1999. Depuis la rencontre franco-britannique de Saint-Malo, le 4 décembre 1998, l’UE a progressé dans le sens d’une intégration des forces armées européennes, sans se démarquer des structures existantes de l’Alliance atlantique.
Défendant sa position singulière dans l’Otan, la France a simultanément promu le développement des capacités européennes de sécurité et de défense, afin d’être en mesure d’apporter une réponse dans le cas où l’Otan ne serait pas utilisée. Cette tendance paraît être le résultat d’un choix politique visant à une plus grande autonomie stratégique vis-à-vis des États-Unis. Accentuée par la crise irakienne et les choix stratégiques de Washington, cette tendance a de façon plus large marqué les grandes rencontres européennes depuis la chute de l’URSS. Ces efforts, qui se heurtèrent souvent au refus des partenaires européens, par ailleurs membres de l’Otan, reçoivent aujourd’hui un écho plus favorable.
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