En cours de formalisation dans le cadre du nouveau Livre blanc, la nouvelle fonction stratégique « connaissance et anticipation, incluant le renseignement » est un besoin exprimé depuis plusieurs années et qui a déjà fait l’objet d’expérimentations méthodologiques concluantes au sein du ministère de la Défense. L’anticipation stratégique relève de l’exploration des situations stratégiques futures et se situe avant la décision, politique ou militaire. Elle demande des savoir-faire et des aptitudes particulières qui s’apparentent à un nouveau métier. Savoir comment faire de l’anticipation est une première étape. Reste aujourd’hui à pratiquer l’anticipation en vraie grandeur au sein du ministère de la Défense, à faire adopter la démarche dans un cadre interministériel et à mettre en synergie anticipation et planification — à passer de l’imagination des futurs possibles à la mise en œuvre d’une stratégie ou d’une décision — et, en quelque sorte, faire réellement de la prévention des crises. (Les propos n'engagent que leur auteur)
Connaissance et anticipation
Knowledge and anticipation
The new strategic function of ‘knowledge and anticipation, including intelligence’ is currently being formalised in the new White Paper; this requirement has been articulated for many years and has already been the subject of fruitful methodological research within the Ministry of Defence (MOD). Strategic anticipation involves the exploration of future strategic situations and is undertaken prior to any political or military decision-making process. It demands specific expertise and skills that amount to a new vocation. The first stage is to understand what anticipation involves; it now remains to apply this expertise to the real world of the MOD, to push for its adoption within an interdepartmental framework and to link anticipation and operational planning—to move on from conceiving possible futures to the implementation of a strategy or a decision—and in a way actually prevent crises. (The opinions expressed are his alone)
Le recours à l’analyse prospective et à l’anticipation pour l’aide à la décision stratégique est apparu comme une nécessité au ministère de la Défense au tout début des années 2000. La diversité des situations rencontrées, l’étendue de l’éventail des réponses aux crises et la complexité des effets à produire dans une logique de plus en plus interministérielle demandaient en effet non seulement une approche globale et adaptée, mais également une capacité d’anticipation pour préparer les choix, agir opportunément et avec efficacité, voire prévenir, dans la mesure du possible.
Le chef d’état-major des armées (Céma) de cette époque avait souhaité disposer d’un ensemble d’outils et de méthodes modernes, aussi rigoureuses que possible, lui permettant d’appréhender dans leur globalité des situations de plus en plus complexes, d’en comprendre les dynamiques afin de pouvoir proposer les solutions les mieux adaptées. Il s’agissait de renforcer le rôle du Céma en tant que conseiller du gouvernement. Avec les travaux sur le nouveau Livre blanc de 2008, une nouvelle fonction stratégique se dessine autour de la connaissance et de l’anticipation, validant ainsi l’approche initiale couplant « connaissance pour comprendre » et « comprendre pour anticiper ».
Au-delà de l’analyse stratégique, la prospective
Le défi consiste, dès lors, à dépasser les analyses de situation « classiques » et à se donner les moyens de répondre aux questions inéluctables sur l’évolution de la situation à différents termes ainsi que sur les acteurs et leurs stratégies propres. À ce niveau d’analyse, il est essentiel de pouvoir aider l’autorité à définir son objectif, non seulement militaire mais aussi stratégique, à formuler ce qui, après accord politique, deviendra un « état final recherché » (EFR). Le choix d’un mode d’action devra se faire à partir de critères d’appréciation sur les marges de manœuvre, les risques et les opportunités, non seulement dans les domaines militaire et opérationnel mais aussi économique, diplomatique et politique de façon à inclure au mieux l’action militaire dans un environnement largement interministériel.
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