Entre 1991 et 2003, les Kurdes en Irak sont passés du rang de citoyens de seconde zone à celui de partenaires. Depuis la chute de Saddam Hussein, ils ont fait le choix raisonnable de l’option fédéraliste plutôt que de l’indépendance. Le succès économique et politique encourageant de leur expérience autonomiste indispose leurs concitoyens arabes et les pays voisins où se trouvent aussi des Kurdes (notamment la Turquie) qui y voient un danger pour leur souveraineté nationale.
L'autonomie menacée des Kurdes en Irak
Kurdish autonomy in Iraq under threat
Between 1991 and 2003 the status of Kurds in Iraq evolved from second-class citizen to essential partner. Since the fall of Saddam Hussein, they have opted for the reasonable choice of federalism rather than independence. The economic and political success of their experiment in autonomy irritates their Arab fellow-citizens and neighbouring countries that also have Kurdish minorities (Turkey in particular), who see in it a danger for their national sovereignty.
Depuis 1992, les Kurdes d’Irak bénéficient d’une indépendance de fait. La Région autonome du Kurdistan irakien, protégée par les Américains, est aujourd’hui la seule zone en Irak relativement stable et prospère. Souvent présentée par les Kurdes comme « l’autre Irak », elle constitue une expérience encourageante pour le Proche-Orient, malgré la corruption endémique, le taux de chômage élevé, la relative faiblesse des investissements étrangers, l’émigration (notamment féminine) vers l’Occident et l’activisme militaire turc. Les Kurdes irakiens profitent de la paix précaire qui y règne pour reconstruire la région, développer l’économie et consolider une démocratie hésitante.
Cet article s’attache à analyser les ambitions des Kurdes en Irak et les moyens dont ils disposent depuis 2005 pour les réaliser. Il cherche ensuite à identifier les enjeux régionaux et internationaux auxquels les Kurdes irakiens sont confrontés pour conserver leur indépendance, déjà compromise.
Les ambitions kurdes
Les Kurdes en Irak se sentent plus que jamais kurdes et moins que jamais irakiens. Les signes extérieurs d’une prise de conscience le confirment : au Kurdistan, le mépris des Arabes est grand, la langue arabe n’est plus guère apprise par la jeune génération, les études ne s’effectuent plus à Bagdad, les « mariages mixtes » sont rares. La démocratisation s’accompagne souvent du nationalisme, donc du rejet de l’autre ; surtout lorsque l’autre a été le persécuteur.
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