Eugène Berg analyse les principaux atlas stratégiques parus pour l'année 2025. Entre conflictualité mondiale, changements climatiques, interrogations européennes et occidentales et bouleversements de l'économie mondiale, un panorama quasi exhaustif des enjeux de notre temps.
En cet automne 2024, l’actualité s’est une nouvelle fois emballée. D’un côté, l’offensive surprise de l’armée ukrainienne dans la région de Koursk se poursuit sans pour autant avoir atteint les objectifs qu’elle s’était fixés. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’efforçait systématiquement d’obtenir le feu vert de Washington pour frapper le territoire russe en profondeur où le groupe de réflexion américain Institute for the Study of War (ISW) a identifié quelque 225 cibles, tout en présentant son plan de paix, destiné à placer l’Ukraine en position de force afin de contraindre la Russie à négocier la fin de la guerre, ce que celle-ci rejette toujours. Sans baisser la garde, l’aide occidentale semble avoir touché son pic bien que 100 milliards d’euros aient été promis à Kyiv.
D’un autre côté, on assiste à une spirale de la guerre au Proche-Orient où Tsahal, l’armée israélienne, fait pivoter son centre vers le nord et le Hezbollah libanais tout en ayant en ligne de mire l’Iran avec lequel elle se livre à un duel de moins en moins moucheté en s’en prenant à elle et à ses alliés Houthis. Ceux-ci, « paysans en guenilles », infligent grâce à leurs missiles iraniens des dommages progressivement sensibles aux rares navires empruntant encore la mer Rouge.
Fragmentation et hétérogénéité du monde
Ces deux conflits majeurs sont loin d’être les seuls qui fragmentent davantage le tissu international de plus en plus fragile et déchiré. La guerre civile au Soudan provoque la plus grande catastrophe humanitaire depuis des décennies. On trouvera sur ce point de solides entrées dans les divers Annuaires, mettant l’accent sur les mécanismes de cette guerre qui plonge ses racines dans le passé et résulte de causes socioculturelles profondes et durables. Il n’en demeure pas moins que plus encore que pour le conflit syrien, la guerre au Soudan implique bien des acteurs extérieurs. La Russie et les Émirats arabes unis (EAU) aux Forces de soutien rapide (FSR) du général Hamdan Dagalo dit Hemetti ; l’Égypte, l’Iran, le Qatar et la Turquie du côté des Forces armées soudanaises (FAS) du général al-Burhan, installées désormais à Port-Soudan sur la mer Rouge. Dans la Corne de l’Afrique, l’accord annoncé entre l’Éthiopie et le Somaliland (république autoproclamée non reconnue par la communauté internationale) permettrait à l’Éthiopie de se désenclaver (1) et au Somaliland de progresser vers un véritable statut d’État. Cet accord qui bouscule le principe de l’uti possidetis juris, est porteur d’implications régionales, économiques et sécuritaires plus larges, en particulier pour les États du Golfe. La République démocratique du Congo (RDC), elle, n’en a pas fini avec la guérilla du M23 (Mouvement du 23 mars), qui met la main sur des mines de cobalt, dont le pays assure 60 % de la production mondiale. De son côté, la Tatmadaw (forces armées birmanes) ne parvient pas à rétablir son contrôle sur toute la Birmanie aux prises avec une guerre civile qui dure depuis des décennies. Le Grand Atlas 2025 indique que l’armée a perdu le contrôle de deux tiers du territoire, provoquant 3 millions de réfugiés.
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