Mort de l’historien Jean-Pierre Azéma
Le grand historien, spécialiste de la Seconde Guerre mondiale, Jean-Pierre Azéma, vient de nous quitter, ce 14 juillet, à l’âge de 87 ans. Né à Paris en 1937, il était une figure emblématique de l’histoire contemporaine et avait largement contribué à renouveler la vision historique sur la guerre et le régime de Vichy. Régime qu’il connaissait particulièrement bien, car son propre père, Jean-Henri Azéma (1913-2000) avait été un collaborateur et avait fui à la Libération, pour se réfugier en Argentine durant une vingtaine d’années.
Le parcours scolaire puis universitaire de Jean-Pierre Azéma l’amena à côtoyer très vite Michel Winock et à entreprendre ensemble de nombreux travaux sur Vichy, la République et son histoire. C’est ainsi qu’en juin 1970, une recension dans la RDN rédigée par le général Jean Némo (1906-1971) rendait compte de l’ouvrage écrit par les deux jeunes universitaires, Naissance et mort de la IIIe République. Dans la lignée des travaux de René Rémond (1918-2007) puis de Robert Paxton avec son livre capital que fut La France de Vichy, publié en 1973, remettant en cause l’idée d’un maréchal Pétain jouant un double jeu avec les Allemands, Jean-Pierre Azéma va largement contribuer à une relecture rigoureuse de la période et à remettre en cause une vision hagiographique d’une France qui aurait été entièrement résistante.
Avec Marc Ferro qui a dirigé l’émission Histoire parallèle, il a participé à la compréhension de la période de la guerre auprès d’un public large, souvent curieux de mieux appréhender la complexité de l’histoire. C’est aussi ce qui ressortait de la série Un village français (2009-2017) diffusée sur France 3 et dont il avait été le conseiller scientifique. Cette série à succès retraçait la vie d’un village « fictif » situé dans le Jura durant la guerre avec ses habitants confrontés à l’Occupation, les uns choisissant la collaboration, quelques-uns la Résistance et la plupart s’efforçant de passer à travers.
Jean-Pierre Azéma a été aussi un historien engagé participant au débat public. Après la disparition de Jean-Pierre Rioux en décembre dernier, une génération de l’après-guerre quitte peu à peu la scène, ayant largement contribué à avoir un regard lucide sur notre histoire contemporaine, démarche indispensable pour affronter l’avenir. ♦
Publié le 15 juillet 2025
Jérôme Pellistrandi