À l’approche de l’ère du transhumanisme qui pourrait débuter dès 2040, « pourquoi la guerre » est une question qui doit se reposer avec vigueur. Avec un être humain modifié, les causes profondes de la violence semblent se déplacer sans s’éteindre. Cette étude explore deux futurs probables : paix algorithmique ou guerre entre espèces. En sondant les racines anthropologiques de la conflictualité, elle montre que la mutation de l’homme bouleverse les fondements et les ressorts de l’emploi de la force armée. Devant ces ruptures à venir qui soulèvent des problèmes éthiques profonds, elle appelle à tracer sans naïveté une stratégie française ambitieuse à initier dès à présent.
Homo Deus et transhumanisme : mirage de la domestication de la violence, nouvelle source de conflictualité
Depuis L’Art de la Guerre de Sun Tzu, la pensée stratégique s’est beaucoup intéressée à la manière de conduire la guerre, au comment, en vue de mobiliser les troupes, tromper l’ennemi et prendre l’ascendant. Cependant, la question du pourquoi la guerre, ses causes premières, anthropologiques et politiques, demeure moins développée. À l’ère du transhumanisme, cette interrogation devient majeure. Car si l’Homo Sapiens devient Homo Deus selon l’expression de Yuval Noah Harari (1), les sources de la guerre pourraient connaître une inflexion radicale : se tarir ou, à l’inverse, devenir bien plus fécondes.
Thucydide (2) et Hobbes (3) considèrent la guerre comme consubstantielle à la nature humaine, née de la peur, du désir, des passions ou de l’honneur. À l’inverse, Rousseau et Marx la rattachent à l’ordre social et aux inégalités. Cette controverse est désormais reconfigurée par une révolution anthropologique inédite : celle de l’homme modifié technologiquement qui n’est peut-être plus tout à fait un homme ni encore tout à fait une machine. L’augmentation cognitive, biologique ou émotionnelle bouleverse les fondements de la conflictualité.
Face à cette mutation, il ne suffit plus de savoir comment on fera la guerre demain. Il faut s’interroger sur pourquoi on continuerait à la faire. La science-fiction monopolise aujourd’hui le sujet. Il est donc temps que la polémologie et la stratégie s’en emparent avec lucidité, comme le ministère des Armées a commencé à le faire avec la Red Team.
Cette étude partira d’une définition du transhumanisme, proposera deux scénarios prospectifs pour 2060, analysera les nouvelles causes de guerre qu’il pourrait engendrer, avant d’esquisser une stratégie française pour y faire face.
Le transhumanisme, de quoi parle-t-on ?
Le transhumanisme est à la fois un courant de pensée, un projet technologique et une philosophie de la transformation humaine (4). Il repose sur une ambition centrale : améliorer, augmenter, voire transcender l’homme grâce aux technologies convergentes Nanotechnologies, biotechnologies, informatique et cognitive (NBIC). Cette vision s’enracine dans une certaine continuité du progrès moderne, mais en franchit une étape critique : l’homme n’est plus seulement perfectible par l’éducation ou son évolution naturelle telle que décrite par Darwin. Il devient modifiable dans son essence biologique, cognitive et sociale.
Le biologiste Julian Huxley, frère du romancier Aldous Huxley, fut le premier à forger ce terme, en 1957 (5). Il voyait dans le transhumanisme une forme d’auto-transcendance de l’espèce humaine par des moyens rationnels. Cette idée de dépassement de soi par la science trouve une résonance particulière dans un monde dominé par l’accélération technologique. Aujourd’hui, des figures comme Ray Kurzweil (6) ou Elon Musk (7) représentent l’avant-garde d’une vision prométhéenne, où l’humanité doit fusionner avec l’intelligence artificielle (IA) pour ne pas devenir obsolète. Le transhumanisme poursuit plusieurs objectifs : augmentation des capacités physiques (exo-squelettes, implants musculaires), cognitives (interfaces cerveau-machine, IA embarquée), sensorielles (vision nocturne, perception augmentée) ; psychologiques (réduction du stress, contrôle des émotions) ; et biologiques (allongement de la vie, élimination des maladies génétiques). Les premiers signes de modification profonde de l’humanité pourraient apparaître dès 2040.
Ses défenseurs y voient une libération (8) de la maladie, du vieillissement, voire de la mort (9). Ses critiques, eux, dénoncent une fuite en avant techniciste, potentiellement inégalitaire et destructrice. Francis Fukuyama (10) a ainsi qualifié le transhumanisme d’idée la plus dangereuse du monde, car il pourrait bouleverser les fondements de l’égalité et de la démocratie. Il faut, en outre, distinguer le transhumanisme du post-humanisme. Le premier vise à améliorer l’homme existant ; le second ambitionne de créer un être nouveau, radicalement différent, potentiellement dénué de toute référence à l’Homo sapiens. Le premier conserve une part d’humanité alors que le second l’outrepasse. Souvent, le transhumanisme est considéré comme le moyen dont la fin est le post-humanisme.
Le monde en 2060 : pacification algorithmique ou guerre anthropotechnique
À l’horizon 2060, deux futurs contrastés se dessinent pour l’humanité augmentée. L’un décrit une forme de pacification technologique quand l’autre voit l’avènement d’une nouvelle barbarie, alimentée par la rupture anthropologique du transhumanisme. Ces deux scénarios qu’aurait pu écrire la Red Team Défense permettent de dégager des tendances sur les potentielles nouvelles sources de guerre.
Scénario 1 – « Pax transhumanistica » : vers une paix augmentée et régulée (11)
En 2060, la convergence entre biotechnologies et IA a permis de stabiliser l’humanité. Les interfaces neuronales, la gestion émotionnelle améliorée et l’accès universel aux neurotechnologies instauré en 2048 par l’ONU, grâce à une volonté politique forte et unanime de ses membres, ont atténué les rivalités. La dissuasion repose sur des IA géopolitiques prédictives appelées « Oracles Stratégiques », des casques bleus préventifs capables de désamorcer toute crise avant son déclenchement. La guerre devient obsolète car immédiatement neutralisée.
Dans ce monde post-national, la démocratie se digitalise via des référendums cognitifs. L’ordre social repose sur des algorithmes de régulation douce. Le crime existe encore mais est circonscrit par des forces non létales. Toutefois, une critique monte : cette paix algorithmique, en éliminant le conflit, aurait également réduit l’humanité à un état de domestication cognitive. Le mouvement international des « Romantiques de l’humanité » revendique le retour du libre arbitre, même au prix de l’instabilité.
Scénario 2 – Guerre anthropotechnique : une fracture géopolitique entre espèces
L’humanité est divisée entre post-humains et humains organiques. Depuis 2045, les améliorations génétiques héréditaires ont produit une rupture irréversible que l’ONU n’est pas parvenue à juguler. En 2057, un embargo technologique aggrave les tensions. En 2059, un acte de sabotage contre une banque d’ADN en Argentine déclenche une escalade : cyberattaques, ripostes automatisées par IA, activation des hyper-soldats et des robots de combat…
Une guerre oppose désormais deux espèces appuyées par des robots : les « transhumains » affrontent les « bioconservateurs ». Le conflit n’est plus idéologique mais ontologique. Chaque camp revendique la légitimité de l’humain, chacun perçoit l’autre comme une menace existentielle.
Ces deux scénarios opposent deux visions radicales. Le premier imagine une pacification du monde par la technologie, au prix d’une régulation algorithmique de la pensée et du comportement humain. Le second révèle la guerre comme conséquence inéluctable de la divergence anthropologique, où l’humanité se scinde en castes incompatibles. Ces deux futurs ne sont ni improbables ni certains, mais ils illustrent les tensions fondamentales entre la promesse et le péril du transhumanisme.
La pacification grâce à l’augmentation humaine, la vision optimiste des partisans du transhumanisme
Alors que la guerre est souvent vue comme un trait immuable de la nature humaine, des penseurs estiment, à l’inverse, qu’elle est une construction sociale (12). En transformant l’humain à la fois dans sa nature et ses rapports sociaux, le transhumanisme pourrait donc mener à une ère de paix inédite.
Les optimistes espèrent que l’augmentation technologique de l’homme pourrait instaurer une paix durable. Yuval Noah Harari note que l’humanité a réussi à domestiquer des fléaux comme la famine, les épidémies et la guerre (13). La dissuasion nucléaire, la prospérité économique et l’interdépendance des nations ont contribué à réduire la violence. Une humanité améliorée, plus intelligente et empathique, pourrait instaurer une paix fondée sur la raison et la maîtrise technologique. Cette vision du transhumanisme imagine un Homo Deus devenu suffisamment sage et « empêché » (14) pour faire la guerre : capable de moduler ses émotions, débarrassé de ses mauvaises pulsions, connecté en permanence à des systèmes d’alerte avancés, il répugnerait à la violence physique jugée archaïque. La convergence Nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives (NBIC) permettrait de domestiquer définitivement la violence, par exemple en augmentant l’empathie des individus ou en neutralisant préventivement les comportements agressifs grâce à l’IA.
Parmi les penseurs transhumanistes défendant une vision optimiste, James Hughes (15), fondateur de l’Institute for Ethics and Emerging Technologies (IEET), promeut un transhumanisme démocratique, aussi appelé technoprogressisme. Il considère que les technologies d’augmentation peuvent être un puissant levier de paix, à condition d’être insérées dans un cadre politique, social et éthique clair. Selon lui, la violence et les conflits naissent de l’injustice, de la peur et de l’ignorance. À l’ère transhumaniste, ces trois déterminants de la guerre pourraient être notoirement affaiblis. D’abord, la réduction des inégalités d’accès aux technologies, notamment par la mise en place de politiques publiques redistributives, peut empêcher l’émergence de sociétés à deux vitesses. Ensuite, l’amélioration cognitive et morale des citoyens, rendue possible par les neurotechnologies, pourrait favoriser l’empathie, la tolérance et la capacité à résoudre pacifiquement les différends. Enfin, le partage démocratique du pouvoir technologique, par la transparence, la participation citoyenne et la régulation internationale, réduirait le risque que des élites technologiques imposent un ordre coercitif ou totalitaire.
Hughes ne nie pas les risques du transhumanisme. Il affirme qu’en l’absence d’un encadrement politique fort, ces technologies pourraient amplifier les tendances guerrières de l’humanité. C’est pourquoi il plaide pour une gouvernance mondiale des technologies NBIC, reposant sur des principes de justice et de dignité humaine.
Le projet de James Hughes rejoint ici l’idée d’une « paix augmentée », fondée non pas sur la seule dissuasion ou la neutralisation algorithmique de la violence, mais sur un progrès éthique co-construit. Un tel projet nécessite toutefois un consensus politique fort et inédit, qui peut sembler hors d’atteinte en cette année 2025 riche en contestations et affrontements…
Le transhmunanisme, amplificateur des causes de la guerre
Sélection dirigée et carburant des guerres futures : relire Darwin pour imaginer l’Homo Deus
L’héritage de Darwin (16) nous invite à considérer le transhumanisme non comme une simple avancée technique, mais comme une mutation du cadre évolutif lui-même. En prétendant piloter son évolution par les NBIC, l’humanité entre dans une logique de sélection artificielle. Or, toute sélection produit des exclus. Le darwinisme social a montré que toute hiérarchie fondée sur l’aptitude nourrit la conflictualité. Ainsi, le transhumanisme pourrait engendrer un nouveau front, non plus entre nations, mais entre castes biologiques : les augmentés contre les « chimpanzés du futur » (17) ou « bioconservateurs », en entretenant une nouvelle forme d’eugénisme.
Darwin a décrit la guerre comme un outil de sélection collective : les groupes les plus solidaires triomphent. Toutefois, si les capacités transhumanistes renforcent l’individualisme ou creusent les inégalités, elles alimenteraient des conflits internes, où la coopération cède la place à la domination. Loin d’un progrès moral, l’augmentation pourrait amplifier les passions anciennes (orgueil, jalousie, peur) et raviver les luttes pour la reconnaissance ou la survie.
Enfin, le transhumanisme pourrait faire émerger une nouvelle espèce, l’Homo Deus. Darwin l’aurait interprété comme un processus de spéciation. Or, dans la nature, deux espèces proches cohabitent rarement sans violence. Une guerre entre humanités devient alors quasi inévitable : une guerre d’exclusion, de domination ou de survie entre l’homme et son successeur technologique.
Vers une fracture irréversible entre augmentés et non augmentés
La fracture entre « augmentés » et « non-augmentés » présente le risque majeur d’une guerre anthropologique tel qu’aurait pu l’imaginer Darwin. Par ailleurs, le champ politique pourrait exploiter cette fracture. Le juriste et philosophe allemand Carl Schmitt (18) voyait dans la distinction ami/ennemi le cœur du politique : ici, chacun pourrait percevoir l’autre « augmenté » ou « naturel » comme ennemi existentiel. Cette théorie de Schmitt a encore montré sa pertinence lors de la guerre en Ukraine, laquelle, en désignant la Russie comme ennemi commun, a su résister au choc de l’agression et a construit les fondements d’une forte cohésion nationale jusque-là fragile. Loin de faire disparaître la guerre, le transhumanisme pourrait donc radicaliser la distinction ami et ennemi, en fondant de nouveaux clivages anthropologiques et ontologiques.
Cette différenciation entre humains alimenterait d’autres sources profondes de la guerre. Gaston Bouthoul, fondateur de la polémologie, parlait de la guerre comme « infanticide différé » (19) visant à éliminer l’excédent de population et à limiter les tensions sociales internes. Ici, ce serait un « parricide » : renversement des élites post-humaines jugées responsables de l’injustice. Le philosophe Jean-Michel Besnier (20) avertit que « l’homme augmenté pourrait bien devenir un loup pour l’homme normal », en réactualisant le philosophe moderne Hobbes et sa « guerre de tous contre tous » (21). La logique du conflit se renforcerait : rejet, haine, puis violence.
Loin d’atténuer les pulsions humaines violentes, le transhumanisme leur donne une dimension surhumaine
Le transhumanisme va probablement augmenter les pulsions violentes de l’homme en renforçant ses capacités, sans transformer sa nature profonde. Si l’être humain se dote d’une puissance cognitive, physique ou émotionnelle décuplée sans agir sur ses désirs, ses frustrations ou sa rivalité mimétique au sens de l’anthropologue René Girard (22), sa capacité à dominer, humilier et détruire augmentera machinalement. À l’ère du transhumanisme, le désir mimétique identifié par René Girard, mécanisme par lequel les individus désirent ce que désirent les autres, sera décuplé par la visibilité des inégalités biologiques et technologiques. Sans transcendance pour canaliser les rivalités (religion, mythe, rituel), les tensions deviendront incontrôlables, car chacun voudra devenir le modèle de l’autre, jusqu’à vouloir éliminer le rival. C’est cette dynamique qui mène, selon Girard, à une montée aux extrêmes, où la violence éclate faute de mécanisme de régulation symbolique. Par ailleurs, en supprimant les limites naturelles de l’individu (fatigue, douleur, vieillissement), les freins biologiques à l’agression sont atténués. En voulant supprimer la fragilité humaine, le transhumanisme risque d’enlever ce qui limitait la violence.
Enfin, quand l’homme prétend dépasser ou contrôler ses pulsions par l’augmentation, il risque de les libérer plus violemment. Le père de la psychanalyse, Sigmund Freud (23) montre que la guerre trouve ses racines dans le conflit intérieur de l’homme, entre ses pulsions primitives et les contraintes imposées par la vie en société. Pour se maintenir, la civilisation exige la répression des pulsions agressives ; mais cette répression, si elle devient excessive, engendre un malaise profond. Ce refoulement nourrit une agressivité latente, un ressentiment prêt à exploser. À l’ère transhumaniste, ce mécanisme pourrait s’exacerber : l’augmentation de l’homme creuse davantage le fossé entre Eros – pulsion de vie, ici portée par la volonté de transcender la condition humaine – et Thanatos – pulsion de mort, que pourrait incarner la violence destructrice des exclus ou la brutalité d’un pouvoir technologique sans limite. Dans sa correspondance avec le scientifique Albert Einstein sur « Pourquoi la guerre ? » (24), Freud évoque déjà la possibilité d’une violence préventive liée à la peur de l’autre. Transposé à l’Homo Deus, ce schéma se rejoue : la survie technologique de l’un peut justifier l’élimination anticipée de l’autre. La guerre pourrait alors naître non plus d’un conflit de territoires, mais d’un conflit d’ontologies, entre ceux qui peuvent « devenir plus qu’humains » et ceux qui n’en ont ni les moyens, ni le droit. On retrouve encore ici la lutte du chimpanzé du futur contre l’Homo Deus.
Le transhumanisme, puissant carburant du dilemme de sécurité
Dans une ère transhumaniste, le dilemme de sécurité prend une dimension inédite. Ce concept des relations internationales, selon lequel les efforts de sécurité d’un acteur sont perçus comme une menace par les autres, s’applique désormais à la course à l’augmentation humaine. Lorsque des États investissent massivement dans l’amélioration des performances physiques, cognitives ou génétiques de leurs soldats, chercheurs ou dirigeants, ils ne cherchent pas nécessairement la domination : ils peuvent agir par peur d’être dépassés. Néanmoins, dans un système international où la compétition est permanente, chaque progrès perçu chez l’un suscite une riposte chez l’autre, enclenchant une spirale de méfiance, d’innovations accélérées et de potentielles confrontations.
Cette dynamique déplace la compétition militaire classique vers le terrain biotechnologique. La puissance ne se mesure plus en force brute, mais en capacité à produire des êtres humains supérieurs (25). Dans ce contexte, ne pas augmenter sa population revient à prendre un retard stratégique, à s’exposer à une forme de déclassement ontologique. La compétition devient donc totalisante : elle concerne le corps, l’esprit, la longévité, la maîtrise des émotions, l’aptitude à la guerre et à la décision. Cette course à l’augmentation nourrit un nouveau paradoxe : plus les nations cherchent à renforcer leur sécurité en dopant leurs capacités humaines, plus elles sapent la confiance entre elles, donc la stabilité du système international. Le transhumanisme, en prétendant dépasser les vulnérabilités humaines, accroît le sentiment de vulnérabilité globale, car il redéfinit les seuils de puissance et rend toute paix instable face à la crainte du « saut qualitatif » adverse.
La course aux ressources nécessaires à l’augmentation humaine alimenterait subséquemment la compétition entre nations. Les terres rares (26), ADN, les données et l’IA deviendront davantage stratégiques. Aujourd’hui, la Chine contrôle 60 % des terres rares. L’intérêt porté par les États-Unis sur celles de l’Ukraine (27) ou du Groenland (28), ou leurs efforts récents sur les biotechnologies (29), en sont la manifestation. À l’avenir, des conflits pourraient donc éclater pour sécuriser ces ressources. La guerre viserait donc un nouvel « espace vital » : des bases de données, des laboratoires, des savoirs. La cupidité et la peur, éternelles causes de guerre selon Thucydide, trouveront ici des objets nouveaux : le code, l’implant, le génome.
Les risques de l’hybridation entre l’homme et la machine, bouleversement des fondements de la stratégie
À l’ère du transhumanisme, l’homme risque de déléguer une part croissante de ses décisions à des IA capables de traiter plus vite l’information, mais incapables d’appréhender les dilemmes moraux ou politiques dans toute leur complexité. Ces IA seront par ailleurs souvent intégrées directement dans les cerveaux d’hommes augmentés. Selon le diplomate américain Henry Kissinger, l’essor de l’IA appliquée au transhumanisme représente une rupture comparable à l’invention de l’imprimerie ou de l’arme nucléaire (30).
Ce bouleversement a des conséquences directes sur la guerre. Kissinger explique que l’IA transforme notre rapport à la vérité, au raisonnement et à la causalité. Or, depuis le stratège Clausewitz (31), la guerre est pensée comme un acte rationnel soumis au calcul politique. Cependant, si l’IA produit des décisions incompréhensibles à l’homme, l’adversaire ne pourra plus anticiper ni dissuader efficacement. Le risque est alors un emballement des conflits sur la base de décisions automatiques ou opaques. Kissinger affirmait en 2018 (32) que si l’IA pense d’une manière étrangère à la nature humaine, mais supérieure en rapidité et en précision, le concept même de stratégie serait remis en cause. Or, comme le rappelle un rapport du Future of Life Institute (33), une IA militaire, si elle n’est pas strictement encadrée, pourrait agir selon des critères d’optimisation insensibles aux normes éthiques humaines, augmentant les risques d’escalade incontrôlée.
La stratégie de dissuasion pourrait également être sensiblement fragilisée. La dissuasion repose historiquement sur la compréhension mutuelle des intentions et des capacités de l’adversaire. Si l’IA ou des soldats augmentés rendent le comportement militaire imprévisible et imprédictible, cela pourrait affaiblir les mécanismes de retenue, rendant la guerre plus probable.
Sur le plan philosophique, enfin, le penseur Emmanuel Kant, dans La paix perpétuelle (34), souligne que seule la raison autonome permet à l’homme de s’arracher à l’empire des passions destructrices, condition nécessaire à la paix. Si cette raison devient instrumentalisée par un raisonnement déshumanisé, alors la base morale du jugement, qui seule peut restreindre le recours à la violence et fonde en partie la stratégie, s’effondre. Le danger n’est pas seulement technologique, il est anthropologique. Renoncer à notre souveraineté rationnelle, c’est ouvrir la porte à des guerres jusqu’à présent évitables par l’intelligence humaine.
« Gagner la guerre avant la guerre » (35) à l’ère du transhumanisme : tracer une stratégie fondée sur l’éthique, la souveraineté et la cohésion nationale
Comme le rappelle Einstein après Hiroshima, « la puissance déchaînée de l’atome a tout changé, sauf nos modes de pensée » (36). À l’ère des NBIC, nos modes de pensée doivent donc vite évoluer.
Anticiper avec lucidité pour ne pas être déclassé
Le principe de précaution doit être pris en compte avec lucidité et sans naïveté dans une stratégie visant à se préparer au transhumanisme. Inscrit dans la Constitution, il présente un risque portant à l’inaction, car les questions éthiques de transformation de l’homme sont naturellement fondamentales. Or, l’éthique sans puissance est un beau principe et la puissance sans éthique est un péril.
La doctrine française se distingue par une claire ligne rouge : préserver la dignité et la réversibilité de l’augmentation humaine. Le rapport du Comité d’éthique de la défense (37) a posé les fondations d’une réflexion française sur l’augmentation humaine : ne pas dénaturer le soldat, ne pas le priver de son libre arbitre et maintenir possible sa réintégration dans la cité sans entrave majeure. En 2020, la ministre des Armées d’alors, Florence Parly, l’avait résumé de la manière suivante : « Oui à Iron Man, non à Spider-Man. (38) » Cette formule traduit l’exigence d’une évolution réversible et maîtrisée.
Face à la montée en puissance des technologies cognitives, seule une éthique à la fois forte et réaliste pourra éviter une nouvelle forme de montée aux extrêmes. Henry Kissinger souligne que l’IA et le transhumanisme appellent une nouvelle époque des Lumières (39), capable d’encadrer la puissance technique par des principes de responsabilité collective. À défaut, l’humanité risquerait de perdre le contrôle de ce qu’elle a créé.
Recommandations pour une stratégie française du transhumanisme militaire
L’émergence des technologies NBIC va transformer à la fois le glaive et le bouclier des nations qui souhaitent ne pas être déclassées. Dans ce cadre, l’usage de la force centré sur la destruction physique et les actions sous le seuil de la confrontation armée doivent être complétés pour prévenir les manipulations de l’esprit, les piratages neuronaux et les altérations biologiques à distance. Dans 25 ans, ces modes d’action n’appartiendront très certainement plus à la science-fiction.
Établir une doctrine de défense neuro-technologique
Clarifier la posture de défense est un impératif à l’ère de l’hybridation homme-machine. La guerre cognitive nécessite une réponse doctrinale forte. Selon le docteur Laurent Alexandre, la guerre du XXIe siècle sera une guerre des cerveaux. Il ne s’agira pas de dominer par la force, mais de manipuler des esprits (40). Il est donc nécessaire d’intégrer à notre doctrine nationale des seuils définis : une tentative de manipulation cognitive d’un soldat, un piratage d’implant cérébral, ou une attaque biologique ciblée sur des augmentés seraient considérés comme des agressions majeures, justifiant une réponse. Comme dans le cyberespace, où la France admet désormais que certaines attaques numériques peuvent entraîner des ripostes militaires, la défense doit s’étendre aux violences invisibles, biologiques ou mentales. Il faut alors inscrire dans notre stratégie que toute opération visant à manipuler l’esprit de nos forces ou de notre population (deepfakes sensoriels, intrusion dans les flux neuronaux, altération pharmacologique ciblée, etc.) est considérée comme une atteinte à la souveraineté et les intérêts nationaux.
Construire un bouclier transhumaniste crédible
Déployer une stratégie nationale de sécurisation des implants, des interfaces cerveau-machine et des exosquelettes sera indispensable. L’adversaire doit d’emblée être découragé à désactiver ou retourner nos soldats augmentés ou notre population, à distance. Cela suppose :
– une architecture de cybersécurité biomédicale dédiée ;
– une doctrine de maintenance sécurisée de l’humain augmenté ;
– des tests de résilience dans des wargames hybrides.
Cela implique de former des unités hybrides (psy-ops, neurotechnologie, IA, etc.) capables de détecter, attribuer et riposter à de telles attaques. D’un point de vue normatif, la France pourrait initier un traité international interdisant l’altération non consentie de la cognition humaine par des moyens technologiques. Il s’agirait, en somme, d’un « protocole de Genève mental ».
Préparer la population : renforcer la résilience à l’ère du transhumanisme
Si la population est formée, informée et résiliente aux manipulations cognitives, les attaques hybrides porteront moins d’effets sur le territoire national. Il faut donc :
– éduquer aux risques du transhumanisme malveillant ;
– simuler des attaques hybrides dans des exercices nationaux ;
– créer une unité de défense cognitive dédié à la désinformation, à la guerre psychique et à la détection d’influences.
Considérer le transhumanisme comme enjeu stratégique de Recherche et développement (R&D) dual
L’augmentation humaine est une technologie duale par excellence. Elle concerne la défense (exosquelettes, implants neuronaux, augmentation cognitive) mais aussi la santé, l’industrie, la résilience civile. L’investissement public dans la R&D sur ces sujets doit donc être massif, structuré et interdisciplinaire. Dans son rapport (41), Mario Draghi, ancien président de la Banque centrale européenne (BCE) et ancien président du Conseil des ministres italiens, souligne que l’Europe est en retard sur les technologies de rupture et appelle à la création d’agences capables de financer, tester et faire émerger des projets à haut risque et à fort impact. À l’heure où la Defense Advanced Research Projects Agency (DARPA) aux États-Unis finance la convergence NBIC dans une logique d’avantage militaire, l’Europe ne peut rester à la traîne.
Créer une DARPA européenne pour les NBIC et la défense
L’Europe a besoin d’une agence de recherche capable de penser le long terme, de prendre des risques technologiques et de financer des projets transdisciplinaires à fort potentiel stratégique. L’exemple américain est éclairant : la DARPA a permis des ruptures majeures (Internet, GPS, interface cerveau-machine), en combinant :
– une vision prospective à 10-20 ans ;
– une gouvernance légère et indépendante ;
– des liens étroits avec les startups, les universités, l’armée ;
– des financements rapides et souples ;
– une capacité à rater et recommencer.
L’Union européenne dispose déjà d’entités comme l’Agence européenne de défense (AED) ou le Conseil européen de l’innovation. Toutefois, aucune agence européenne ne semble avoir la souplesse, la rapidité et l’ambition de la DARPA. Dans le même temps, la France ne dispose plus de marge de manœuvre financière. Il est donc urgent de fédérer autour d’un pôle européen de rupture technologique, doté d’un mandat sur les NBIC militaires, financé par un budget européen et orienté vers des cas d’usage concrets (soldat augmenté, guerre cognitive, cybersécurité biologique, etc.).
Construire une synergie franco-européenne autour de la recherche augmentée
La France a une carte à jouer comme moteur intellectuel et stratégique de cette nouvelle R&D européenne. Elle dispose :
– d’un écosystème académique et médical d’excellence (Institut national de la santé et de la recherche médicale, Centre national de la recherche scientifique [CNRS], Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique) ;
– de structures militaires innovantes (Agence de l’innovation de défense [AID], Red Team défense devenue RADAR (42) en novembre 2024, Institut de recherche biomédicale des armées (43)) ;
– d’un cadre éthique structuré (Comité d’éthique de la défense) ;
– d’une tradition de recherche duale (Commissariat à l’énergie atomique, le futur commissariat au numérique de défense avec l’agence ministérielle de l’IA de défense).
Cependant, ce potentiel doit s’européaniser. L’Allemagne (Bundeswehr Medical Service, Fraunhofer Institute), les Pays-Bas, l’Italie, ou la Suède ont aussi des capacités à valoriser. Une alliance NBIC de défense pourrait voir le jour dans le cadre du Fonds européen de défense (FED) ou d’EDIP (44), couplée à un programme doctoral commun sur l’humain augmenté (à l’image d’Erasmus, mais pour les chercheurs militaires). Il s’agirait de créer des clusters européens capables de rivaliser avec le monopole technologique américano-chinois sur les interfaces neuronales, les bio-prothèses, les exosquelettes ou les systèmes IA-soldat. Ces agglomérats associeraient industriels, militaires et scientifiques.
Face à la rupture anthropologique que porte le transhumanisme, la stratégie française doit donc s’articuler autour de trois piliers : la maîtrise éthique et lucide des technologies, la souveraineté cognitive et biologique, la résilience nationale. Cela impose une doctrine claire, des capacités de riposte cognitives et biologiques ainsi qu’une innovation offensive, structurée par une AID européenne des NBIC à la hauteur des enjeux. Gagner la guerre avant la guerre dans un monde transhumaniste, c’est bâtir dès aujourd’hui un bouclier technologique et éthique durci avec une épée davantage trempée. Sans cela, nous serons défaits non pas sur un champ de bataille, mais dans des laboratoires, par des algorithmes, ou par la fragmentation sociale alimentée par la lutte entre augmentés et chimpanzés du futur.
Conclusion
À l’ère du transhumanisme, la guerre ne disparaît pas. Elle change de visage, de causes, de terrain, tandis que les passions demeurent et, parfois, s’exacerbent. Vouloir domestiquer la violence sans interroger ses causes profondes serait une erreur majeure. La question du « pourquoi la guerre » doit donc davantage se poser.
Thucydide, Hobbes, Rousseau ou Freud nous rappellent que la guerre puise ses racines dans la peur, l’orgueil, le désir ou la frustration. Le transhumanisme ne les abolit pas, il les amplifie, les déplace, les technicise. C’est en cela qu’il constitue un puissant carburant de conflictualité. Ne pas suffisamment le voir, c’est risquer d’entrer aveuglément dans une ère de guerre anthropotechnique, où les conflits naîtront moins des ambitions territoriales que des inégalités ontologiques.
L’histoire de l’humanité a connu bien des guerres pour les ressources, la religion ou l’idéologie ; mais dans un monde transhumaniste, un basculement s’opère : l’objet du conflit devient l’homme lui-même. L’Homo sapiens, jusqu’ici sujet de l’histoire, risque d’en devenir un objet obsolète. Le passage à l’Homo Deus devrait réveiller une forme moderne d’eugénisme compétitif, où les États, sous couvert de progrès, se livreraient à une course au meilleur génome, au soldat le plus performant, au citoyen optimisé. Dès lors, l’eugénisme ne serait plus une dérive morale du passé, mais un moteur stratégique du futur.
Dans ce contexte, la lucidité s’impose : le principe de précaution, inscrit dans la Constitution, ne doit pas devenir un alibi pour l’inaction, mais un guide pour un engagement maîtrisé et souverain. Nous sommes donc à l’heure des choix. Les officiers supérieurs qui sont aujourd’hui sur les bancs de l’École de Guerre se retrouveront demain à la tête des armées face à la rupture transhumaniste. Le remplacement de l’Homo sapiens ne sera pas qu’une question biologique ou technique : ce sera une question stratégique, politique et philosophique. Seule une nation préparée et unie autour d’une vision lucide de la guerre et de l’humain à l’ère transhumaniste pourra encore peser dans l’histoire. À défaut, elle en sortira violemment.
(1) Harari Yuval Noah, Homo Deus. Une brève histoire de l’avenir, 2017, Albin Michel, 484 pages. Selon l’auteur, l’Homo Deus grâce au transhumanisme se transforme et remplace l’homo sapiens.
(2) Thucydide, La guerre du Péloponnèse, Ve siècle av. J.-C. Livre III : « La guerre, en supprimant les facilités de la vie quotidienne, est une rude éducatrice, elle ramène les caractères humains à leur état primitif ».
(3) Hobbes Thomas, Le Léviathan (1651). Il y décrit l’état de nature comme un état de guerre de tous contre tous.
(4) Voir la définition de Luc Ferry dans : La révolution transhumaniste : comment la technomédecine et l’ubérisation du monde vont bouleverser nos vies, chapitre 1, « qu’est-ce que le transhumanisme », 2016, Plon, 216 pages.
(5) Huxley Julian New Bottles for New Wine, Harper & Brothers, 1957, 320 pages. Huxley évoque des idées sur l’amélioration de l’humanité à travers la science et la technologie. Il réfléchit à la manière dont l’humain pourrait être transformé au-delà de ses limites biologiques naturelles.
(6) Futurologue et ingénieur chez Google, prédit une fusion homme-machine vers 2045, qu’il nomme singularité.
(7) En janvier 2024, l’entreprise Neuralink d’Elon Musk a implanté pour la première fois son dispositif dans un cerveau humain. Le patient tétraplégique a pu développer des progrès notables. Kleeman Jenny « Elon Musk put a chip in this paralysed man’s brain. Now we can move things with his mind. Should we be amazed or terrified? » The Guardian, 8 février 2025 (www.theguardian.com/).
(8) Bostrom Nick, « Transhumanist values », Review of Contemporary Philosophy, vol. 4, mai 2005 (https://nickbostrom.com/ethics/values.pdf). Le philosophe enseignant à Oxford défend que l’amélioration humaine est souhaitable, voire inéluctable, pour révéler tout le potentiel humain. Il est toutefois prudent et reconnaît que des dangers majeurs existent avec l’amélioration technique de l’homme, si elle est mal accompagnée.
(9) Ny Ando A., « OpenAI a créé une IA qui pourrait nous rendre immortels », Lebigdata.fr, 20 janvier 2025 (https://www.lebigdata.fr/openai-a-cree-une-ia-qui-pourrait-nous-rendre-immortels).
(10) Fukuyama Francis, Our Posthuman Future: Consequences of the Biotechnology Revolution, Picador, 2003, 272 pages.
(11) Ce scénario s’inspire du roman de Michel Houellebecq, La possibilité d’une île, Fayard, 2005, 485 pages. Il y décrit une société transhumaniste en paix : « Les néo-humains avaient supprimé la douleur, mais aussi l’amour, la joie, la beauté. Ils avaient gagné la paix, mais perdu leur humanité. » Cette vision reprend celle d’Aldous Huxley dans Le meilleur des mondes, 1932.
(12) Onfray Michel, « Éthologie de la guerre », La foudre gouverne le monde, Albin Michel, 2024, 320 pages. Il interroge les sources de la guerre. Michel Onfray y distingue les « naturalistes » estimant que la guerre s’inscrit dans la nature humaine foncièrement mauvaise (Hobbes) et les « culturalistes » affirmant que la cause de la guerre se trouve en dehors des hommes (Rousseau).
(13) Harari Yuval Noah, op. cit.
(14) « Un homme, ça s’empêche », ce qu’écrit Albert Camus dans Lettre à Jean Grenier, publiée post-mortem.
(15) Hugues James, Citizen Cyborg: Why Democratic Societies Must Respond to the Redesigned Human of the Future, Basic Books, 2004.
(16) Darwin Charles, De l’origine des espèces, 1859.
(17) Le terme chimpanzé du futur a parfois été utilisé pour décrire les humains qui choisiraient de ne pas adopter les technologies transhumanistes. Le scientifique britannique Kevin Warwick, notamment, considère que ceux qui décideront de rester humains constitueront une sous-espèce et formeront les chimpanzés du futur. Warwick Kevin, I, Cyborg, Century, 2002, 288 pages.
(18) Schmitt Carl, La notion du politique, 1932.
(19) Bouthoul Gaston, L’infanticide différé, 1970.
(20) Besnier Jean-Michel, Demain les post humains : le futur a-t-il encore besoin de nous ? 2009, Hachette Littératures, 2009, 210 pages, p. 129.
(21) Hobbes Thomas, Le Léviathan, chapitre XIII, 1651.
(22) Girard René, La violence et le sacré, 1972. Dans Achever Clausewitz, 2007, Girard lit Clauzewitz à l’envers : là où Clausewitz voit la guerre comme rationnelle et instrument politique, Girard montre qu’elle peut échapper à tout contrôle sous l’effet de la mimesis, c’est-à-dire l’imitation du désir de l’autre qui alimente l’escalade de la violence. Dans ce cadre, la fragmentation des sociétés transhumanistes devrait alimenter la violence.
(23) Malaise dans la civilisation de Sigmund Freud. On peut retrouver également sa vision pessimiste de la nature humaine sur la guerre dans une correspondance avec Albert Einstein intitulée Warum Krieg [Pourquoi la guerre ?]. À l’ère du transhumanisme, Freud pourrait porter l’idée selon laquelle l’augmentation n’est pas un dépassement du tragique humain, mais elle en constitue l’amplification de ses fragilités et de ses pulsions.
(24) Einstein Albert et Freud Sigmund, « Pourquoi la guerre ? », Correspondance, 1933 (https://classiques.uqam.ca/).
(25) George Friedman dans The next 100 years en 2009, décrit la course mondiale aux nouvelles technologies qui déclencheront une dynamique conflictuelle entre puissances rivales. Pour la course aux armements de l’homme augmenté, le rapport Enhanced Warfighters: Risk, Ethics, and Policy publié en 2013 par le groupe Ethics + Emerging Sciences Group de l’Université d’État polytechnique de Californie apporte un éclairage plus précis (https://case.edu/).
(26) Guillaume Pitron, La guerre des métaux rares, la face cachée de la transition écologique et numérique, Les liens qui libèrent, 2019, 296 pages.
(27) Ledroit Valentin, « Minerais, terres rares : pourquoi le riche sol de l’Ukraine est-il stratégique pour les États-Unis ? », Toute l’Europe, 13 mai 2025 (https://www.touteleurope.eu/).
(28) Friedland Jordan, « Pourquoi les États-Unis convoitent-ils tant le Groenland ? », National Geographic, 25 janvier 2025 (https://www.nationalgeographic.fr/).
(29) Les États-Unis ont légiféré régulièrement depuis cinq ans sur les biotechnologies, de manière à mieux coordonner leurs actions et se protéger en la matière de leurs compétiteurs, en particulier la Chine. Par exemple, la National Security Commission on Emerging Biotechnology a été créée en mars 2022.
(30) Kissinger Henry, « How the Enlightenment End », The Atlantic, juin 2018 (www.theatlantic.com/).
(31) Clausewitz (von) Carl, De la guerre, livre I, 1832. La violence armée est un instrument au service d’une politique. La guerre est un acte de violence destiné à contraindre l’adversaire à exécuter notre volonté.
(32) Kissinger Henry, op. cit.
(33) Future of Life Institute, The Malicious Use of Artificial Intelligence: Forecasting, Prevention, and Mitigation, 2018.
(34) Kant Emmanuel, Vers la paix perpétuelle, 1795.
(35) Burkhard Thierry, Vision stratégique du chef d’état-major des Armées, octobre 2021 (www.defense.gouv.fr/).
(36) Einstein Albert, Lettre au Congrès pour la paix, 1950.
(27) Comité d’éthique de la défense, Avis portant sur le soldat augmenté, 32 pages, septembre 2020 (https://www.defense.gouv.fr/).
(38) Parly Florence, « Déclaration de la ministre des Armées, sur l’armée et l’éthique », Forum innovation défense, 4 décembre 2020 (https://www.vie-publique.fr/discours/277612-florence-parly-04122020-ethique).
(39) Kissinger Henry, Schmidt Eric et Huttenlocher Daniel, The Age of AI. And Our Human Future, Little, Brown and Company, 2021, 272 pages.
(40) Alexandre Laurent, La guerre des intelligences : Intelligence artificielle versus intelligence humaine, JC Lattès, 2017. Il développe cette idée de manipulation des esprits dans son chapitre 4 intitulé « La guerre des cerveaux a déjà commencé ». Voir également Pinard Legry Olivier, « Neurosciences et sciences cognitives : comment se préparer à la guerre des cerveaux ? », Cahiers de la RDN, « Idées de la guerre, guerre des idées – Regards du CHEM – 71e session », 2022, p. 58-76 (https://www.defnat.com/e-RDN/vue-article-cahier.php?carticle=483&cidcahier=1291).
(41) Draghi Mario, The future of European competitiveness (Rapport), septembre 2024 (https://commission.europa.eu/).
(42) Radar Défense (https://radar-defense.org/).
(43) NDLR : Au sujet de l’Irba, voir les Cahiers de la RDN dédiés à la thématique du soldat augmenté, dirigés par le Crec Saint-Cyr et l’Irba (https://www.defnat.com/e-RDN/cahiers-de-la-RDN.php?crubrique=4).
(44) Programme pour l’industrie européenne de la défense.








