Le Sud-Est asiatique en danger (I)
Après la bombe d’Hiroshima, dès que l’armée japonaise eût amorcé son reflux vers sa patrie humiliée et désorganisée, le communisme essaya sans désemparer de s’installer derrière elle, en profitant des ruines et des rancunes laissées par la guerre comme des illusions occidentales sur les desseins de Staline. Bien que la lutte entre Mao Tse-Toung et Chiang Kaï-Schek fût encore incertaine ; que les armées communistes fussent encore loin des frontières thaïlandaises et indochinoises ; que Staline hésitât encore à s’engager pour Mao, la guérilla fut systématiquement organisée en Malaisie comme elle l’était en même temps en Birmanie, en Indonésie, en Indochine puis en Corée, en application de la tactique « insurrectionnelle » stalinienne définie par Jdanov en 1947. En Thaïlande, le roi était assassiné et les ferments de discorde attisés.
Au Viet-Nam, le parti communiste de Ho Chi-Minh, dont les cadres et les premières troupes avaient été préparés en Chine, à la porte du Tonkin, avec la complaisance aveugle de Chiang Kaï-Schek et des Américains, prenait la succession du gouvernement fantoche annamite formé, avec son appui, par l’armée d’occupation nippone après le coup de force du 9 mars 1945. Ho Chi-Minh s’efforçait ensuite de se consolider et d’éliminer les vieux partis nationalistes, plus forts que lui à l’époque, en prenant à l’égard de la France, pour bénéficier de sa neutralité, et même de sa bienveillance, le visage classique et rassurant d’un nationalisme pacifique et prêt à coopérer… En décembre 1946, il rejetait son masque tactique et entreprenait contre la France, empêtrée d’illusions et de vieilles idées dépassées, une véritable guerre, qui allait durer près de dix ans. Après le triomphe du communisme en Chine et l’élimination de Chiang Kaï-Shek en 1950, ses commandos et ses cadres ne cessèrent de se fortifier, étendant leur action jusqu’en Cochinchine et même au Cambodge, où des régions entières de l’intérieur leur obéissaient. Les accords de Genève en 1954 coupèrent l’ancienne Indochine en deux. Ho Chi-Minh installait sa dictature dans tout le Nord du Viet-Nam tandis que Ngo Dinh-Diem installait la sienne au Sud et au Centre. Le Laos restait théoriquement uni : mais les provinces du Nord, limitrophes du Tonkin, peuplées en majorité d’allogènes, restaient — sauf les Meos — sous l’influence des éléments communistes ou communisants appuyés sur des bandes bien disciplinées. Le Cambodge avait accédé, lui aussi, à la pleine indépendance sous l’autorité de sa royauté traditionnelle qui adoptait, peu après, une attitude de neutralisme. Les commandos communistes du Sud Viet-Nam et du Cambodge évacuaient le pays, mais en laissant en certains points, surtout au Sud Viet-Nam, de profondes racines, des cadres et de petits groupes armés destinés à constituer les noyaux de l’action future.
La Thaïlande, puissamment aidée par les États-Unis, se redressait : le Maréchal Pibul Songram, l’ancien ami des Japonais, consolidait sa dictature militaire ; puis, affaibli et plus ou moins « démonétisé », il était remplacé en 1958 par la dictature du Maréchal Sarit, avec, semble-t-il, l’accord tacite du roi et des Américains.
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