Politique et diplomatie - Principes et conséquences de la doctrine stratégique américaine
Dans mon article du mois dernier (1), j’ai rassemblé certaines des conclusions auxquelles conduisent les travaux des spécialistes américains sur la politique et la stratégie. J’essaierai dans le présent article d’ordonner ces conclusions en une doctrine cohérente, compte tenu de l’orientation officielle de Washington en matière de politique militaire et de politique étrangère.
Il est manifeste que depuis 1958-59 au moins, c’est-à-dire dès avant l’accession au pouvoir de l’administration démocrate, les États-Unis cherchent un substitut à la stratégie des représailles massives. L’abandon de cette stratégie a été éloquemment exprimé dans le message que le Président Kennedy a présenté au Congrès sur le budget de la Défense, le 28 mars 1961. « Notre position en matière de défense, déclarait le Président, doit être à la fois souple et parfaitement ferme. Tout agresseur potentiel envisageant une attaque dirigée contre une portion quelconque du monde libre en usant de n’importe quelle sorte d’armement, qu’il soit conventionnel ou nucléaire, doit savoir que nous répondrons de manière adaptée à la menace et d’une façon efficace et effective ». Par conséquent, « nous devons être capables de faire un choix délibéré en ce qui concerne les armes et la stratégie que nous utiliserons… Nos armes doivent pouvoir être utilisées de manière à permettre l’examen et la sélection par les autorités civiles en ce qui concerne les délais, l’ampleur de la réaction, et les objectifs auxquels elle s’en prendrait ». Et « dans l’hypothèse d’une agression majeure qui ne pourrait pas être repoussée par des forces conventionnelles, nous devons être prêts à prendre toutes les décisions, à utiliser toutes les armes qui s’avéreraient appropriées. Mais notre objectif maintenant est d’augmenter nos possibilités de limiter notre réponse à l’emploi d’armes non atomiques ».
Les tendances de la politique militaire américaine ne pouvaient être définies avec plus de clarté et de franchise que dans ce discours où le Président Kennedy disait encore : « Notre position militaire, l’état de nos forces doivent être suffisamment flexibles et placés sous un contrôle assez efficace pour correspondre aux efforts que nous faisons en explorant toutes les possibilités et en prenant toutes les mesures qui peuvent diminuer la tension… Notre armement doit être soumis à l’ultime commandement et au contrôle des autorités civiles et ceci de manière permanente, aussi bien en temps de paix qu’en temps de guerre. La décision de base concernant notre participation à n’importe quel conflit et notre réponse à n’importe quelle sorte de menace — en englobant toutes les décisions relatives à l’utilisation d’armes nucléaires ou au passage d’une guerre limitée à une guerre généralisée — seront prises par les autorités civiles régulièrement constituées. Ceci exige une organisation effective et sûre des procédures, des moyens matériels et des moyens de communication… ainsi que des mesures défensives destinées à permettre aux autorités civiles de prendre des mesures réfléchies et appropriées… »
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