Marine - France : budget de la Marine pour 1975 ; le porte-hélicoptères PH-75 ; mise à l'eau du De Grasse et des avisos Drogou et Amyot d'Inville ; brillants résultats du système MM38 Exocet - CENTO (Organisation du Traité central) : l'exercice Midlink
Projet PH 75 français
France
Budget de la Marine pour 1975
Le budget de la Marine pour l’exercice 1975 prévoit 7 141,50 millions de francs de Crédits de paiement (CP) pour l’ensemble du titre III (Fonctionnement) et du titre V (Dépenses en Capital) contre 6 424,31 MF en 1974 et 6 096,21 MF en 1973.
Le titre V est doté de 4 873,83 MF d’Autorisations de programme (AP).
En CP, le budget représente 16 % du budget de la Défense.
Par grandes masses, la répartition des CP du titre III se présente comme suit, comparée à celle de l’exercice précédent :
|
1974 |
1975 |
Soldes - Indemnités - Allocations diverses |
1 383,50 |
1 616,78 |
Personnel - Charges fiscales |
176,26 |
196.49 |
Alimentation |
192,13 |
219,89 |
Entretien et activité |
227,63 |
319,14 |
Dépenses centralisées et soutien |
50,67 |
53,34 |
Carburants et combustibles |
91,8 |
188.37 |
Frais d’exploitation des services |
29,8 |
36,85 |
Entretien de la Flotte |
718,55 |
706.45 |
Entretien des matériels aériens |
148,63 |
165,45 |
Subventions |
5,57 |
5,72 |
Dépenses diverses |
0,32 |
0,32 |
Les crédits du personnel sont supérieurs de 228,28 MF à ceux de l’an dernier. Cette augmentation est due à la réévaluation prévue des soldes et rémunérations des personnels de l’État et à la poursuite de la transformation de la pyramide des grades des officiers-mariniers. N’entrent pas en compte dans ce total, les CP supplémentaires que le Gouvernement a décidé de consacrer à l’amélioration de la condition militaire. Ces crédits, soit 250 MF, seront comme on sait, puisés dans les CP du titre V des Armées.
La part versée par la Marine à ce fonds commun est de 40 MF. Elle a été obtenue par le transfert des CP déjà autorisés pour la construction du dernier des 14 avisos inscrits au 3e Plan. Pour effectuer ce transfert, la Marine a dû renoncer à ce bâtiment, ce qui a entraîné la suppression des 110 MF d’AP prévus pour lui.
Les crédits de personnel permettront d’entretenir des effectifs sensiblement du même ordre que ceux de l’exercice 1974, soit environ 68 000 hommes.
Si l’on examine les CP relatifs à l’entretien de la Flotte, on constate qu’ils sont encore diminués par rapport à ceux dégagés l’an dernier. Or, ces derniers étaient déjà insuffisants. Plusieurs opérations pourtant indispensables devront être différées et d’autres abandonnées, ce qui entraînera la condamnation de bâtiments.
Les hausses des produits pétroliers ont entraîné le doublement des CP relatifs aux combustibles : la Marine disposera cependant en 1975 de moins de combustibles et devra les gérer avec parcimonie.
L’augmentation des CP relatifs à l’entretien des matériels aériens est essentiellement due aux hausses consécutives à l’inflation. Il en est de même pour les crédits qui seront consacrés à l’activité des forces maritimes.
Si l’on examine maintenant les dépenses en capital on voit qu’elles se monteront en 1975 à :
– 3 592,73 MF de CP contre 3 399,00 MF en 1974, soit une augmentation de 169,73 MF. Mais cette augmentation n’est qu’apparente : elle est due à l’accroissement des frais de construction et fabrication consécutifs à l’inflation et à l’accroissement du coût de l’énergie. En réalité, la Marine disposera d’un pouvoir d’achat inférieur à celui de 1974 et cela pourrait se traduire par un léger étalement de certains programmes. On a vu plus haut que 40 MF de CP, prévus pour la construction du 14e aviso inscrit au 3e Plan, ont été transférés comme quote-part de la Marine à l’amélioration de la condition militaire.
– 4 871,83 MF d’autorisations de programme (AP) contre 4 405,65 MF en 1974.
Ces CP et AP seront répartis comme suit :
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CP |
AP |
• Études, recherches, prototype |
473,70 |
581,80 |
• Fabrications : |
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– Habillement, couchage, casernement |
78,00 |
75,90 |
– Aéronautique navale, matériel de série |
323,00 |
1 083,70 |
– Transmissions, équipements |
46,50 |
54,40 |
– Constructions neuves |
2 054,73 |
2 273,80 |
– Munitions et engins |
388,20 |
512,50 |
– Équipement militaire |
58,80 |
99,23 |
• Infrastructure |
|
|
– Commissariat, travaux, installations |
13,80 |
12,50 |
– Bases aéronavales |
26,80 |
27,70 |
– Travaux maritimes |
128,00 |
151,80 |
– Acquisitions immobilières des travaux maritimes et de l’aéronautique navale |
0,50 |
1,20 |
Les 1 083,70 MF d’AP prévus pour le matériel de l’Aéronautique navale permettront :
– de commander une tranche de 20 Super-Étendard qui viendront s’ajouter aux prototypes et aux matériels de présérie, soit 10 au total, votés en 1974 ;
– de poursuivre la fabrication des 18 hélicoptères WG.13 (ou Lynx) commandés l’an dernier.
Dans le domaine des constructions neuves, la Force océanique stratégique (Fost) recevra 1 196,50 MF d’AP, ce qui permettra :
– de poursuivre l’achèvement de notre 4e Sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE), L’Indomptable, lancé en septembre 1974 ;
– d’activer la construction du Tonnant [NDLR 2024 : 5e SNLE], commandé l’an dernier ;
– de commander les matériels à longs délais d’approvisionnement nécessaires au 6e SNLE [NDLR 2024 : L’Inflexible] dont le Gouvernement a décidé la construction.
Les AP, soit 856,40 MF pour les constructions neuves et 175,40 MF pour les grosses refontes et modernisations, permettront de poursuivre ou de lancer les opérations suivantes :
a) Constructions neuves :
– 1 porte-hélicoptères à propulsion nucléaire. Ce bâtiment sera mis sur cale en avril prochain à Brest [NDLR 2024 : le PH 75 sera finalement abandonné] ;
– 1 sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) de 2 500 t (passation des commandes de matériels à longs délais d’approvisionnement nécessaires à la construction de ce bâtiment qui sera mis en chantier au début de 1976) [NDLR 2024 : le Rubis].
– 2 frégates type F67 (5 700 tonnes pleine charge) : Duguay Trouin (lancé le 1er juin 1973) et De Grasse (lancé le 30 novembre 1974).
– 3 corvettes type C70 (4 100 tpc) : Georges Leygues, Dupleix, Montcalm.
– 4 patrouilleurs rapides classe Glaive (180 tpc) : Trident, Épée, Glaive, Pertuisane.
– 13 avisos A69 de 1 170 t (classe d’Estienne d’Orves). La construction du 14e aviso a été reportée au 4e Plan militaire.
– 1 pétrolier ravitailleur : La Durance.
b) Grosses refontes et modernisations :
– Transformation en navire-atelier de l’ex-ravitailleur de munitions Acheron, lancé mais non achevé. Ce bâtiment a été rebaptisé Jules Verne.
– Poursuite de la modernisation des sous-marins type Daphné (armement et équipement de détection).
– Mise à jour électronique des bâtiments.
– Installation de 4 MM38 à la place de la tourelle n° 2 AR sur 8 des 9 avisos escorteurs type Commandant Rivière. Les navires refondus n’auront plus que 2 tourelles de 100 CA.
– Installation de 4 MM38 sur la Jeanne d’Arc.
– Refonte et modernisation de 5 dragueurs océaniques : Garigliano, Mytho, Cantho, Vinh Long, Dompaire.
Le porte-hélicoptères PH 75
Ce bâtiment qui remplacera l’Arromanches, aujourd’hui condamné, sera le premier navire de guerre de surface à propulsion nucléaire qui ne soit pas de conception et construction américaines, et dans ce domaine notre Marine est à l’avant-garde en Europe.
Ses caractéristiques seront les suivantes : Missions :
a) Lutte ASM au sein d’une force navale.
b) Action extérieure et intervention lointaine avec possibilité de transport de troupes à vitesse moyenne élevée.
• Coque :
– Déplacement : 16 400 t (moyen) ; 18 400 tpc.
– Dimensions : 208 (ht) x 26,4 (flottaison).
• Propulsion : 1 réacteur CAS230 (chaufferie avancée de série, de 230 mégawatts thermiques) dont la fabrication a été confiée aux établissements d’Indret et qui fournira la vapeur à 2 groupes turbo-réducteurs-condenseurs développant une puissance de 48 mW, c’est-à-dire de 65 000 CV ; 2 hélices.
Ce bâtiment sera également doté d’une propulsion de secours constituée par 2 diesels qui permettrait au bâtiment de parcourir, en cas de besoin, 3 000 nautiques à 10 nœuds.
Vitesse : 29 nœuds.
• Installations aéro : 1 pont d’envol mesurant 202 m de long, 46 m de largeur maximale, celle-ci étant ramenée à 31 m au niveau de l’îlot ; 1 hangar mesurant 84 x 21 x 6,50 m (sous barrots) ; 2 ascenseurs latéraux situés à tribord sur l’arrière de l’îlot.
• Armement : 2 systèmes SACP Crotale ; 4 bitubes de 40 CA Breda-Bofors remplacés ultérieurement par des Systèmes antimissiles à très courte portée (SATCP).
Environ 25 hélicoptères WG.13 ou 1 dizaine de Super Frelons ou 1 quinzaine de Puma ou 1 combinaison de ces divers appareils.
• Équipage :
a) Bord : 880 hommes ;
b) Mission intervention : 1 000 à 1 500 hommes + 1 état-major de 50 h.
Signalons pour terminer que les importantes installations hospitalières du PH 75 lui permettraient, le cas échéant, de remplir des missions humanitaires analogues à celles qu’accomplit l’Arromanches, lors des grandes inondations de Tunisie.
Mise à l’eau du De Grasse et des avisos Drogou et Amyot d’Inville
Ces 3 bâtiments ont été mis à l’eau le 30 novembre 1974 dans l’arsenal de Lorient, en présence de l’amiral Joire Noullens, Chef d’état-major de la Marine (CEMM), représentant le ministre de la Défense, et de l’ingénieur général Thiennot, représentant le Délégué ministériel à l’armement (DMA).
Le De Grasse est la dernière des 3 frégates anti-sous-marines (ASM) type F67 inscrites au 2e plan d’équipement militaire et le premier bâtiment de la Marine nationale équipé du système de missiles surface-air à courte portée (SACP Crotale). Il est également le premier à bénéficier totalement des aménagements que l’on a décidé d’introduire sur tous les nouveaux navires en vue d’améliorer les conditions de vie à bord et le confort de l’équipage.
Rappel des caractéristiques :
• Déplacement : 4 580 t Washington ; 5 745 tpc.
• Dimensions : 152,75 (ht) x 142,5 (pp) x 15,30 x 5,70 m.
• Propulsion : 4 chaudières ; 2 groupes de turbines développant au total 57 300 CV ; 2 hélices.
• Performances :
– Vitesse max. : 31 nœuds.
– Distance franchissable : 5 000 nautiques/ 18 nœuds ;
• Armement :
– Missiles : 6/MM38 Exocet ; 1 SACP Crotale (16 missiles).
– Artillerie : 2/100 CA (1 x 2).
– ASM : 1 système Malafon (13 missiles) ; 2 catapultes pour le lancement de torpilles L5 ; 2 hélicoptères WG.13.
• Équipage : 25 officiers + 90 officiers mariniers + 188 hommes.
Le De Grasse doit en principe être armé pour essais le 7 novembre 1975 et admis au service actif en octobre 1976.
Le Drogou et l’Amyot d’Inville sont les deuxième et troisième des 13 avisos qui doivent être construits au titre du 3e plan militaire (1971-1975). Déplaçant 1 170 t, ils auront une vitesse de 21 nœuds fournie par 2 diesels. Leur armement comprendra 1/100 CA, 1 lance-roquettes ASM sextuple de 375 mm et 2 MM38 Exocet.
Brillants résultats du système MM38 Exocet
Depuis la fin des essais d’évaluation et l’adoption des modifications qu’il était apparu nécessaire d’entreprendre, 33 tirs d’Exocet ont été effectués dont 22 pour le compte des marines étrangères qui ont adopté ce système d’arme.
Ces 33 tirs se répartissent comme suit :
– Marine française : 11 tirs, 9 succès.
– Royal Navy : 10 tirs, 10 succès. Le dernier tir à partir du Norfolk s’est effectué par mauvais temps (mer force 6). Sur ces 10 tirs, 2 ont été effectués en salves de 2 missiles.
– Bundesmarine : 5 tirs, 4 succès.
– Marine grecque : 6 tirs, 4 succès (3 à charge militaire et 1 à case de mesure). Les 2 tirs manques ont été effectués en Grèce.
– Marine péruvienne : 1 tir, 1 succès.
Ces tirs ont été effectués dans des conditions extrêmement variées allant de la très courte distance d’interception (4 000 m environ) à la distance maximale possible (40 000 m environ) et avec des états de mer variant de 0 à 6.
L’efficacité globale du système a donc été de l’ordre de 85 % pour l’ensemble des tirs, ce qui est tout à fait remarquable.
CENTO (Central Treaty Organization) : l’exercice Midlink
Organisé par les Nations faisant partie de cette organisation (Grande-Bretagne, Turquie, Iran, Pakistan), l’exercice Midlink s’est déroulé du 19 au 30 novembre 1974 dans le Nord de l’océan Indien avec une importante participation américaine due au séjour dans cette zone d’un Task Group détaché de la 7e Flotte du Pacifique et centré sur le porte-avions CVA-64 Constellation et un SNA.
On sait en effet que depuis la guerre dite du Kippour et pour contrebalancer la présence soviétique, les États-Unis déploient occasionnellement dans ce théâtre un groupe naval plus ou moins important en provenance de la Flotte du Pacifique, qui vient soutenir la petite force qu’ils y entretiennent en permanence. Cette dernière baptisée Mideastforce se compose d’un navire-amiral, actuellement le La Salle qui est un ex-navire amphibie, et 2 à 3 escorteurs.
Pour en revenir à l’exercice Midlink, celui-ci a, d’après la presse anglo-saxonne, mis en œuvre 45 bâtiments, des avions de la Royal Air Force (RAF) basés pour la circonstance dans l’île de Masirah et bien entendu les aéronefs embarqués sur le Constellation.
La Royal Navy y était représentée par la totalité du Task Group qu’elle détache désormais en permanence à l’Est du Cap avec relève tous les 9 mois. Actuellement, ce Task Group comprend : le croiseur porte-hélicoptères Blake, le SNA Warspite (Classe Valiant), 5 escorteurs, 3 bâtiments de soutien logistique. ♦