Aéronautique - France : point sur l'Airbus A300 - États-Unis : le bombardier stratégique Rockwell B-1
France : point sur l’Airbus
L’Airbus se trouve à un moment important de sa carrière : la phase de développement et des essais est terminée et les premières expériences d’un A300 en service ont été réalisées. L’appareil est reconnu comme étant une réussite technique ; c’est à sa commercialisation qu’Airbus Industrie consacre dorénavant ses efforts.
Pour s’imposer sur le marché, en dépit de la situation économique actuelle caractérisée par une récession généralisée du trafic aérien, Airbus dispose de sérieux atouts. L’expérience déjà acquise par trois compagnies aériennes qui ont utilisé l’Airbus est très probante.
Pour Air France la mise en service de l’Airbus s’est avérée plus aisée que celle de n’importe quel autre appareil. Avec un taux de régularité de près de 98 % – les retards n’excédant pas 5 minutes, contrairement aux 15 minutes admis par les règlements américains – l’Airbus est donc, dès les premiers mois de mise en service, un avion ponctuel.
Bien que plus courte, l’expérience de TEA, la première compagnie charter à utiliser un Airbus, est tout aussi marquante. Avec l’appareil qu’elle a loué à Air Algérie pour la période du Hadj, TEA a effectué, pendant 50 jours, une rotation quotidienne Alger-Bengazi-Jedda-Alger pour amener les pèlerins algériens à La Mecque. Au cours de cette opération, l’Airbus a transporté 18 000 passagers, soit près de 300 passagers par rotation, ce qui équivaut à un coefficient de remplissage de près de 99 % et ceci avec un taux de régularité de 99,5 %. À noter que le nombre d’heures de vol quotidien de l’appareil a été de plus de 15 heures.
Quant à l’A300 d’Air Siam qui assure quotidiennement depuis octobre 1974 la liaison Bangkok–Hong-Kong, il se comporte de manière tout aussi satisfaisante avec un taux de régularité de 98,7 %.
Mais au-delà de l’expérience des Airbus en service, il faut évoquer aussi les très bons résultats obtenus par le premier B4 sorti de la chaîne et sur lequel ont été effectués les vols d’essai de cette version à rayon d’action allongé. Le B4 dont le premier vol a eu lieu le 26 décembre dernier totalisait à la date du 15 mai 1975, 164 heures de vol en 75 sorties, preuve de la très bonne disponibilité de l’appareil. Durant cette période, la plupart des essais nécessaires à la certification de cette version ont été effectués avec succès et sans gros problèmes.
Mais l’une des plus brillantes démonstrations des possibilités de l’appareil a sans doute été réalisée en mars 1975. Parti de Toulouse dans la matinée, l’Airbus B4 est allé se mettre en place à Genève d’où il décolla à 10 h au poids de 155 tonnes pour assurer la liaison directe Genève-Koweït, soit une distance de 4 685 km en 5 h 44, la consommation de carburant ayant été de 34 900 kg alors que la totalité des réservoirs permet d’en emporter 46 700 kg. L’appareil redécolla 2 heures plus tard de Koweït pour se poser peu après minuit à sa base, après un vol de 6 h 30 bloc-bloc, le plus long jamais effectué par un Airbus. En effet le B4 a franchi sans escale la distance de 4 910 km avec un vent contraire de l’ordre de 35 nœuds (65 km/h). À son arrivée à Toulouse, il restait encore 6 300 kg de fuel dans ses réservoirs, soit l’équivalence de 1 h 15 de vol. Il faut noter que ces deux vols ont été réalisés à la charge marchande maximum correspondant au « plein passagers avec bagages ».
Airbus a ainsi fait la preuve de ses qualités techniques et de ses capacités à s’adapter à des conditions d’exploitation diversifiées. Avec une cinquantaine de commandes, Airbus Industrie a confiance dans l’avenir. Le rythme de fabrication est légèrement supérieur à un avion par mois. Ce rythme s’adaptera bien entendu aux ventes et passera bientôt à deux avions par mois.
Les conditions pour assurer le succès du programme Airbus sont réunies dans plusieurs domaines.
Il faut maintenant – Airbus Industrie s’y attache – imposer sur un marché difficile un appareil qui est une réussite technique et qui devrait devenir une réussite commerciale.
États-Unis : le bombardier stratégique Rockwell B-1
Considéré tant par l’US Air Force que par le Département de la Défense (DoD) comme un des éléments essentiels de l’arsenal stratégique américain, le programme B-1 se trouve aujourd’hui à un tournant important : le coût unitaire de l’appareil, aggravé chaque jour par une inflation monétaire notable, constitue dans cette période de récession mondiale un des obstacles majeurs à son développement mis en avant par ses détracteurs.
Faut-il rappeler que le programme B-1 remonte maintenant à une douzaine d’années ? C’est en effet en 1963 que furent publiés les besoins du Strategic Air Command (SAC) parmi lesquels figurait celui d’un bombardier stratégique à long rayon d’action. Le financement des travaux correspondants fut décidé deux ans plus tard et c’est finalement le 23 décembre 1974 que le premier vol du B-1 eut lieu.
Particularités de construction
La description d’ensemble du B-1 et de ses principaux sous-systèmes a déjà été faite dans ces pages. Aussi ne rappellerons-nous que quelques-unes des données de construction les plus caractéristiques :
– Le fuselage du B-1 du type monocoque est réalisé en alliage d’aluminium, le titane n’étant utilisé que pour les éléments soumis à des contraintes importantes. Les radômes et carénages d’antennes sont exécutés en tissu de quartz imprégné de résine polyamide ou en tissu de verre. La cellule du B-1 se caractérise également par une très grande résistance car elle a bénéficié très largement des études faites sur le General Dynamics F-111 Aardvark et le Lockheed C-5A Galaxy.
– Le B-1 est doté d’un système de gestion du carburant et de centrage extrêmement sophistiqué dont le rôle, classique sur des avions de cette taille, est d’assurer les transferts de carburant entre les différents réservoirs de façon à maintenir le centrage aux valeurs préétablies pour la mission.
– Le test des systèmes de bord, de leurs performances, l’identification des équipements défectueux, l’enregistrement des paramètres des groupes propulseurs sont assurés en permanence par une centrale intégrée.
– Le turboréacteur à double flux et à double corps General Electric F101 est un moteur d’avant-garde. La poussée est de 13 600 kg. Le taux de dilution se situe aux environs de 2. Le corps Basse pression (BP), dont le rapport de pression est supérieur à 2, comprend une soufflante à deux étages munie d’aubes directrices d’entrée à incidence variable. Le système Haute pression (HP) est composé d’un compresseur axial à 9 étages dont les aubes de stator sont à incidence variable, une chambre de combustion annulaire et une turbine mono-étage. La construction modulaire du G100 facilite largement les opérations de maintenance et les réparations. Sa consommation de carburant et son encombrement sont inférieurs de 25 à 30 % aux réacteurs de la génération précédente.
Les capacités de l’avion
La mission du B-1 est la pénétration lointaine à basse ou haute altitude, en vitesse subsonique ou supersonique, en vue de lancer avec une très grande précision des engins téléguidés ou des bombes sur des objectifs ponctuels militaires ou industriels. Pour cela le B-1 est capable de voler à basse altitude en suivi de terrain à 300 mètres du sol environ sur de très grandes distances à vitesse subsonique élevée.
À haute altitude, il vole à plus de Mach 2 avec une charge de 25 à 35 t sur une distance de plus de 10 000 km. Cette distance peut être accrue par le ravitaillement en vol, capacité qui est indispensable pour un avion comme le B-1 et qui a tendance actuellement à être étendue à un nombre de plus en plus grand d’appareils militaires car elle conditionne dans une large mesure leurs possibilités d’action.
Pour le survol du territoire ennemi, le B-1 met en œuvre deux systèmes électroniques destinés à assurer défense et attaque. Avec un coefficient de réflexion radar très faible (trente fois inférieur à celui du B-52), un équipement de contre-mesures réalisé à partir des techniques les plus récentes, le B-1 est très efficacement protégé contre les actions ennemies.
Le B-1 est armé de 24 missiles SRAM en soutes et de 8 en charge extérieure. Il dispose de leurres du type QUAIL en attendant la mise en service prochaine (fin de la décennie actuelle) de l’ALCM (Air Launched Cruise Missile), missile développé conjointement par l’US Navy et l’USAF depuis l’abandon en 1973 du SCAD (Subsonic Cruise Armed Decoy). L’ALCM, d’un poids de 900 kg environ, peut être transporté dans les soutes du B-1 ; son radar de suivi du terrain le rend capable de voler à quelques centaines de pieds au-dessus du relief sur une distance de près de 600 kilomètres.
Grâce à une conception avancée (géométrie variable), une motorisation importante (4 x 13,6 t), des capacités de pénétration à basse altitude (en dessous de la hauteur minimale d’interception des missiles adverses) et de brouillage des radars ennemis, un armement à base d’engins téléguidés à long rayon d’action, le B-1 apparaît comme un système d’arme très évolué, qui selon l’USAF sera efficace contre une gamme très diversifiée d’objectifs.
Il lui reste maintenant à faire la preuve de ses qualités techniques pour s’imposer définitivement et provoquer une décision favorable aux plus hauts niveaux. ♦