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  • Revue n° 669 Novembre 2004
  • Gendarmerie et sécurité intérieure - Incivilités et théories de la « vitre cassée »

Gendarmerie et sécurité intérieure - Incivilités et théories de la « vitre cassée »

François Dieu, « Gendarmerie et sécurité intérieure - Incivilités et théories de la « vitre cassée »  » Revue n° 669 Novembre 2004 - p. 181-183

Notion ancienne redécouverte judicieusement par l’analyse des politiques de sécurité, puis transposée sans ménagement dans le vocabulaire médiatique et politique, les incivilités jouent un rôle déterminant dans la genèse et la diffusion du sentiment d’insécurité, quand ce n’est pas de la délinquance, même si elles ne sont que très partiellement recensées dans les statistiques officielles. « Les incivilités, note Sébastian Roché, n’ont pas de définition juridique précise. Il s’agit d’une notion sociologique avant tout, qui renvoie aux perceptions et aux représentations des gens (…Ce) sont des atteintes à l’ordre en public. C’est un concept qui est très proche de celui d’ordre public, en dehors du fait qu’il émane de la population sans être codifié par le droit » (1).

En constante progression ces vingt dernières années, les comportements incivils regroupent des désordres mineurs quotidiens qui ne sont pas fondamentalement contraires à la loi, ou tout au moins ne font pas forcément l’objet de poursuites, comme, par exemple, se livrer à de petits actes de vandalisme (graffiti et tags, dégradations et souillures dans les cages d’escaliers, les cabines téléphoniques, les abribus), faire du bruit dans les rues (en particulier la nuit, aux abords des immeubles), manquer de courtoisie, bousculer et insulter les passants ou les habitants du quartier… Les incivilités, ce sont aussi les épaves de voitures ou de mobylettes sur le parking des immeubles, les crachats et les menaces, les poubelles renversées, les mauvaises odeurs, les boîtes aux lettres fracturées, les carrosseries rayées, les vitres brisées, les caves désertées ou abandonnées aux dealers…

Par leur fréquence et leur généralisation, leur quotidienneté et leur visibilité, tous ces comportements ordinaires d’insociabilité et de délinquance de prédation et d’appropriation, et surtout les traces indélébiles qu’ils laissent dans la ville (sans parler de leur coût pour la collectivité), parce qu’ils incarnent une forme de désordre affectant tout un chacun et bénéficient généralement d’une totale impunité, sont appréhendés, en dépit de leur caractère souvent bénin, comme autant d’indices de dangerosité et de délabrement de l’environnement urbain, de signes concrets d’une menace banale et anonyme pour l’individu comme pour la collectivité. Le comportement incivil peut être aussi, pour son auteur, une voie d’entrée presque anodine dans la délinquance. Aussi la multiplication des incivilités peut-elle au moins en partie expliquer la croissance de la délinquance juvénile. En effet, les déprédations dans le quartier peuvent permettre à l’adolescent, en quelque sorte de faire ses gammes, de s’engager dans la voie de la déviance, de rejoindre d’autres mineurs délinquants ou prédélinquants.

Manifestations d’une violence à la fois effective et symbolique, ces phénomènes ont pour effet de brouiller la vie sociale et d’installer durablement la méfiance dans les relations interindividuelles, de sorte que, dans ce climat dans lequel l’individu est tenté de se retirer de l’espace public et de se replier sur lui-même, les faits d’insécurité objective (comme les cambriolages et les agressions) ont nécessairement un plus grand retentissement. En d’autres termes, les incivilités, en se multipliant, représentent le terrain favorable sur lequel se développe un sentiment d’insécurité, dont le moteur demeure la pression croissante exercée par la délinquance sur le système social. Les incivilités sont ainsi le maillon essentiel qui, en présence d’autres variables socio-économiques — comme le niveau de pauvreté, le pourcentage de minorités ethniques, la fréquence des déménagements ou encore le taux de cambriolages et d’agressions — expliquent le délabrement matériel et social de certains quartiers en difficulté. Par référence à la théorie de la « vitre brisée » (Broken Windows) formulée par J. Wilson et G. Kelling, il est alors possible de souligner combien le sentiment d’insécurité ouvre la voie au développement de la délinquance, à moins, bien évidemment, que les gouvernants ne se décident à réagir par la mise en œuvre de mesures préventives et répressives destinées à juguler l’extension de ce phénomène.

Dans sa préface du livre argumenté publié par son compère George L. Kelling, sur la base notamment des expériences conduites à New York, James Q. Wilson résume en quelques phrases cette théorie, modeste par son assise scientifique, mais exceptionnelle par son audience chez les tenants de pratiques policières diamétralement opposées : « Nous avons utilisé l’image de la vitre brisée pour expliquer comment les quartiers pouvaient être investis par le désordre et même le crime si personne n’intervient pour les préserver (…) Les petits désordres conduisent aux plus grands et les plus grands peut-être même aux crimes » (2). Selon cette théorie développée à partir d’un court article publié au début des années 80 (3), parfois réduite par ses détracteurs hexagonaux à une version « sociologisante à bon marché » du proverbe « qui vole un œuf vole un bœuf », les comportements d’abandon provoqués par les actes de vandalisme conduisent à l’effondrement des contrôles sociaux et à l’invasion de l’espace urbain par la délinquance.

Dans leur analyse, J. Wilson et G. Kelling se fondent, en fait, sur les résultats d’une expérience réalisée en 1969 par Philip Zimbardo, psychologue à l’Université de Stanford. Ce dernier fit déposer deux voitures sans plaque d’immatriculation, le capot relevé, l’une dans une rue du Bronx, l’autre, dans le quartier huppé de Palo Alto en Californie. Dans les dix minutes qui suivirent, la voiture abandonnée dans le Bronx fut l’objet d’actes de pillage et de vandalisme. Quant à la voiture déposée à Palo Alto, personne ne la toucha pendant une semaine. Zimbardo se mit alors à la défoncer à coups de masse ; des passants en firent de même, de sorte que, en quelques heures, la voiture se trouva retournée et entièrement détruite. Une précision : dans les deux cas, le psychologue a observé que les vandales étaient des individus de race blanche, bien habillés et apparemment sans problème : « Un quartier stable où des familles se préoccupent de l’état de leur maison, font attention aux enfants des autres et rejettent fermement les intrus, peut se transformer en quelques années (et même en quelques mois) en une jungle terrifiante, inhospitalière. Qu’un bien soit abandonné, qu’on laisse pousser la mauvaise herbe ou briser une vitre… et les adultes cessent bientôt de réprimander les enfants turbulents. Les enfants s’enhardissent et deviennent encore plus turbulents. Les familles quittent l’endroit et sont remplacées par des personnes sans attaches. Les adolescents se rassemblent devant la boutique du coin et refusent de partir quand le propriétaire le leur demande. Des bagarres surviennent. Les ordures s’accumulent. Des gens se mettent à boire en face de l’épicerie. (…) Une telle zone est éminemment vulnérable à l’invasion par la délinquance. En effet, bien que cette dernière n’y soit pas inévitable, elle est plus susceptible d’y survenir qu’en des lieux où les comportements sociaux sont réglables par le biais des contrôles informels ».

Des nuisances qui ne sont pas réparées et sanctionnées sont autant d’indices tangibles du recul des mécanismes de protection du quartier, ce qui ouvre la porte à un processus inexorable de dégénérescence. En effet, l’absence de réaction vis-à-vis de ces désordres mineurs incarnés par la métaphore de la vitre cassée fournit différents signaux aux habitants du quartier ; les uns, pour favoriser le passage à l’acte et encourager d’autres formes de déviance ; les autres, pour donner une impression de dégradation du cadre de vie conduisant aux comportements d’évitement, de résignation et de retrait. Le vide ainsi créé est de nature à attirer les marginaux et les criminels à investir cet espace fragilisé, devenu propice aux trafics et aux activités illégales de toute nature, conduisant à l’apparition de « points noirs » (hot spots) pouvant assez rapidement transformer le quartier en une « zone de non-droit » (no-go area) abandonnée par la police (en dehors des opérations mobilisant d’importants moyens), les services sociaux et les populations socialement intégrées. Wesley Skogan a mis en évidence les éléments de cette « spirale du déclin » aboutissant à l’émergence d’une zone criminelle : la dégradation progressive du bâti, l’augmentation du taux de déménagement et la paupérisation des habitants, l’affaiblissement des contrôles sociaux, l’installation d’un climat de méfiance et de peur, le développement de la criminalité (4). Ainsi les incivilités peuvent-elles constituer le terrain favorable au développement de l’asociabilité et de la déviance, mais aussi du sentiment d’insécurité et de la délinquance. Ce constat, ainsi que la prise de conscience de l’impératif de répondre à ce cycle de délabrement urbain font l’objet d’un large consensus, ce qui explique que la référence à la théorie du Broken Windows se retrouve chez les tenants de formes de régulation sociale apparemment différentes, qu’il s’agisse de mobiliser la police et la population dans des initiatives tendant à apporter des solutions globales et partenariales (Community Policing), ou bien de mettre en œuvre des stratégies policières et judiciaires plus « intensives », plus répressives, tendant à éradiquer toutes les formes de désordre, à « tuer dans l’œuf » les manifestations mineures de l’insécurité dégradant le cadre de vie et alimentant la criminalité (Quality of Life Policing ou Zero Tolerance Policing). ♦


(1) La société incivile. Qu’est-ce que l’insécurité ? ; Seuil, 1996, p. 48 et 75.
(2) George L. Kelling et Catherine Coles : Fixing Broken Windows, Touchstone, 1997, p. XV.
(3) « Broken Windows : The police and Neighborhood Safety », The Atlantic Monthly, mars 1982, n° 249, p. 29-38. Trad. française dans Les Cahiers de la Sécurité Intérieure, n° 15, 1er trimestre 1994, p. 163-180. Cf. également Sébastian Roché, « La théorie de la vitre cassée en France. Incivilités et désordres en public », Revue Française de Science Politique, vol. 50, juin 2000, p. 387-412.
(4) Wesley Skogan : Disorder and Decline : Crime and the Spiral of Decay in American Neighborhoods, University of California Press, 1990.

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