Continent délaissé par Washington à la fin de la guerre froide, l’Afrique occupe, depuis les attentats du 11 septembre 2001, une place nouvelle et particulière dans la vision stratégique des États-Unis, qui ont inséré la région dans leur stratégie intégrale. Il n’est pas interdit de penser que les modalités de la gestion politique du continent puissent à l’avenir servir de banc d’essai aux politiques menées dans d’autres régions du globe.
Washington redécouvre l'Afrique subsaharienne
Washington rediscovers sub-Saharan Africa
A continent largely abandoned by Washington at the end of the Cold War, Africa has since the 9/11 attacks reassumed a special place in the United States’s overall strategic vision. It appears that the numerous US political initiatives on the continent could serve as a blueprint for action in other parts of the world.
Depuis quelques années, on peut observer un regain d’intérêt des grandes puissances pour le continent africain. Si les États-Unis ont fait un retour remarqué à la fin des années 90, ils sont loin d’être les seuls à avoir réinvesti cet ensemble régional. En effet, des pays tels que le Japon, l’Inde et, plus encore, la Chine ont accru leur présence dans ce qui constituait, il y a peu encore, le « pré-carré historique » européen. La « conquête » de l’Afrique, un continent riche en matières premières (pétrole, or, cobalt, bois, uranium) constitue, en ce début de XXIe siècle, un enjeu majeur. Il est, en outre, au cœur d’un jeu d’influence de plus en plus agressif et ce souvent au détriment des pays africains eux-mêmes. On observe dès lors sur l’échiquier africain un vrai jeu de go, chaque grande puissance essayant de s’y profiler. Comment dès lors les États-Unis se profilent-ils sur le continent africain ?
Lutte antiterroriste
Si les États-Unis se sont à nouveau intéressés à l’Afrique fin des années 90, cet intérêt s’est fortement accentué depuis les événements du 11 septembre 2001. L’ancienne route des caravanes allant de la Libye à la Mauritanie étant une zone susceptible d’action d’Al-Qaïda et consorts, les États-Unis ont lancé l’initiative pan-Sahel (IPS) dès 2002. Il s’agit d’un partenariat avec le Mali, le Niger, le Tchad et la Mauritanie portant sur la formation des militaires et encourageant la coopération sahélo-maghrébine en matière de lutte contre le terrorisme. Ce programme, financé à hauteur de 7,5 M$, comprend une formation de base sur le maniement des armes, la planification, les communications, la conduite de patrouilles et l’apport de soins médicaux (1). Devant le succès du programme, les États-Unis lancent en 2005 un projet plus ambitieux : le Trans Saharan Counterterrorism Partnership, avec un budget de cent millions par an, et cela jusqu’en 2010. Aux quatre pays partenaires de l’IPS, s’ajoutent cinq autres dans la nouvelle initiative : l’Algérie, le Maroc, le Nigeria, le Sénégal et la Tunisie (2). Le programme consiste toujours à entraîner les forces militaires de pays africains dans la lutte antiterroriste, mais également à garantir la stabilité régionale. Dans ce cadre, le programme réserve un rôle à l’USaid (promotion de l’enseignement), au département d’État (sécurité des aéroports) et au département du Trésor (finances). Les Américains organisent en outre des exercices militaires conjoints avec ces pays (exemple l’exercice Flintlock).
Afin de mieux contrôler la Corne de l’Afrique, ses voies maritimes et de faciliter la lutte contre le terrorisme, les États-Unis sont aujourd’hui présents à Djibouti, autrefois chasse gardée traditionnelle de la France. En octobre 2002, Washington crée, le Combined Joint Task Force-Horn of Africa pour lutter contre le terrorisme et pour améliorer la sécurité en Éthiopie, en Érythrée, au Soudan, au Kenya, en Somalie, au Yémen, ainsi qu’en mer Rouge, dans le golfe d’Aden et dans l’océan Indien. Outre la présence militaire, le département d’État a en 2003, mis sur pied un nouveau programme ciblant l’Afrique orientale (East African Counter Terrorism Program). Financée à hauteur de 100 M$, l’initiative comprend des projets de formation pour assurer la sécurité des frontières et des côtes, renforcer le contrôle de la circulation des personnes et des marchandises entre les pays, etc. (3). Enfin, l’armada de la Joint Task Force 150, composée entre autres de navires américains, français, allemands, patrouille le golfe d’Aden et les eaux entourant la Corne de l’Afrique. Concernant le Soudan, on peut reprocher aux États-Unis une certaine ambiguïté : très actifs, et même critiques, dans le Darfour, ils soutiennent le gouvernement soudanais dans sa lutte contre le terrorisme. Le gouvernement soudanais aurait mis à disposition des États-Unis certains de ses agents pour recueillir des informations sur l’insurrection irakienne et aurait assisté les États-Unis lors du renversement des Tribunaux islamiques en Somalie.
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