Le plan de développement des capacités, établi conjointement par l’Agence européenne de défense et les instances militaires de l’Union européenne avec une forte implication des États membres, va être présenté dans sa première version complète en juillet 2008. C’est un outil révolutionnaire qui va non seulement favoriser le lancement de projets en coopération destinés à combler les lacunes capacitaires européennes, mais aussi, à terme, structurer de manière plus efficace la programmation des investissements de défense des pays membres. À condition que ces derniers saisissent la chance qui leur est offerte de se l’approprier.
Le plan de développement des capacités : un outil révolutionnaire
The EU's Capability Development Plan: a revolutionary tool
The Capability Development Plan drawn up jointly by the European Defence Agency and the EU’s military bodies, with strong member state involvement, is to be issued in its first complete version in July 2008. This is a very powerful process which should not only give birth to collaborative projects addressing European capability shortfalls, but also in the longer term help restructure member states’ defence investment planning—provided they seize this opportunity.
Tandis que l’Agence européenne de défense (AED) approche de son quatrième anniversaire, le cycle inaugural du processus capacitaire mis en place à l’Union européenne est en passe de s’achever avec la première édition, impatiemment attendue, du plan de développement des capacités (PDC). Le hasard des calendriers fait que ce document fondateur va être publié en juillet 2008 alors même que débute la présidence française de l’Union, et que s’ébauchent de premières, et nécessairement circonspectes, réflexions sur ce que pourrait être, à terme, la coopération structurée permanente, nouvelle disposition introduite par le Traité de Lisbonne. Cette concomitance est certes fortuite, toutefois la recherche de la plus large participation des États membres à la mise en œuvre du plan de développement des capacités s’inscrira de manière cohérente avec notre objectif affiché de contribuer à développer la défense européenne. Par ailleurs, les premières réflexions laissent penser que ce plan de développement des capacités sera vraisemblablement une référence importante pour l’élaboration de la coopération structurée permanente qui pourrait, dans l’avenir, rassembler ceux qui le veulent autour de la réalisation d’objectifs partagés plus ambitieux. Beaucoup plus qu’un plan, c’est en fait un processus particulièrement puissant qui est appelé à orienter et canaliser durablement et par itérations successives les investissements de défense des différents États membres qui le souhaiteront ; et ce au double bénéfice : de l’Union, dont les capacités seront renforcées, et des participants eux-mêmes, qui optimiseront ainsi leur retour sur investissement avec la garantie de mieux procéder à la « bonne dépense » grâce à la consolidation des analyses effectuées par l’AED.
Un plan opportun
Le plan de développement des capacités n’arrive-t-il pas trop tard ? La réponse à cette question est clairement « non ».
La constatation de lacunes capacitaires n’est pas en soi un phénomène nouveau ; l’exemple du transport stratégique est le plus évident et point n’était besoin d’un outil conceptuel compliqué pour savoir quels étaient nos besoins et nos déficiences en la matière, ni pour lancer le programme d’avion A400M tant attendu. Plus récemment, les difficultés rencontrées par l’Union européenne, comme d’ailleurs par l’Otan, pour disposer en quantité suffisante d’hélicoptères dans les théâtres extérieurs, qu’il s’agisse des Balkans, de l’Afghanistan, ou du Tchad, ont mis en évidence un domaine dans lequel les défauts sont aigus et les besoins particulièrement urgents ; au point que Britanniques et Français ont pris de concert l’initiative d’actionner l’AED pour qu’elle coordonne les visions et les efforts des États membres en la matière ; cette initiative, d’ailleurs, vient d’être approuvée par l’ensemble des pays membres qui y apportent massivement leur soutien. Dans ces conditions, a-t-on toujours besoin d’un processus lourd et très technique qui peut paraître bureaucratique ? Fera-t-il autre chose que souligner des évidences ? Et enfin, est-il adapté au tempo exigé par les opérations, ou bien n’est-il pas déjà dépassé par les événements comme pourrait l’illustrer le cas des hélicoptères ? Face à ces questions, on peut affirmer que le processus de « plan de développement des capacités », bien au contraire, doit être renforcé et mis en œuvre sans tarder : en effet, tout d’abord, si nous l’avions lancé plus tôt, nous n’en serions pas aujourd’hui à subir des lacunes aussi graves ; aussi plus tôt nous mettrons en application cet outil, qui comporte une forte dimension prospective, mieux nous serons armés pour identifier de manière systématique les déficiences à venir — car elles sont loin d’être aussi évidentes que dans le cas du transport stratégique — et pour les traiter de manière anticipée et planifiée, au lieu de devoir réagir face à l’urgence avec « les moyens du bord ». Enfin, le traitement ponctuel et immédiat des lacunes qui nous pénalisent aujourd’hui, typiquement le domaine des hélicoptères, s’il n’est nullement en contradiction avec la mise en route et la poursuite en parallèle d’un processus permanent, mobilise beaucoup d’énergies qu’on ne pourrait rassembler de façon durable avec une telle intensité et risque de n’aboutir, en toute logique, qu’aux seules solutions palliatives susceptibles de produire des résultats atteignables à court terme au prix des seules ressources, notamment financières, immédiatement mobilisables. L’exercice a forcément ses limites.
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