S’appuyant sur des études réalisées entre 2006 et 2008 auprès des services de renseignements de pays d’Orient et d’Occident, et de militants islamistes, Jason Burke présente son analyse de la propagation de l’information par Internet et celle de l’islamisme radical chez les jeunes musulmans britanniques. Il soutient la thèse que la radicalisation tient plus aux expériences personnelles de l’individu qu’à une quelconque influence extérieure. L’auteur répond ici aux préjugés souvent répandus par les médias accusant la « Toile » d’amplifier cette radicalisation.
Islam radical, endoctrinement et Internet : responsabilités et idées reçues
Radical Islam, indoctrination and Internet: responsibilities and received wisdom
In this article, based on studies between 2006 and 2008 of British Islamic militants and discussions with security services in both the West and East, the author analyses the spread of information via the Internet, and radical Islam among young British Muslims. Responding to the prejudices often propagated by the media, claiming that the Web accentuates activism, he maintains that radicalisation has more to do with individuals’ personal experiences than with any outside influences.
À 8 h 55, le 7 juillet 2005, Hasib Hussain, dix-huit ans, originaire de Beeston près de Leeds, passa une série d’appels à trois de ses amis qu’il avait quittés une heure et demie plus tôt devant la pharmacie Boots à King Cross station. Il n’eut aucune réponse, mais laissa quand même des messages. Cinq minutes auparavant, les trois hommes avaient fait exploser simultanément leurs bombes, tuant 39 personnes avec eux, dans le métro de Londres. Hussain monta dans le bus et s’assit à l’étage supérieur. Il resta assis là 20 minutes, avant de faire exploser sa propre bombe. Il fut tué, avec treize autres personnes, laissant des douzaines de blessés.
Ces six dernières années, tout comme de nombreux autres pays, la Grande-Bretagne a vécu une succession d’événements de cet ordre. Depuis la tentative d’abattre un jet transatlantique, fin 2001, d’un homme de vingt-huit ans originaire d’une banale banlieue de Londres, aux attentats ratés de Glasgow et de Londres en 2007, il ne se passa pas un mois sans arrestations ou sans alerte. On a d’abord pensé que les responsables étaient des terroristes étrangers venant de l’extérieur, mais il est devenu évident qu’au moins deux tiers d’entre eux étaient nés citoyens britanniques.
Cette édition de Défense nationale et sécurité collective est consacrée au rôle des nouvelles cybertechnologies et à la sécurité. Dans cet article, nous proposons d’analyser le rôle d’Internet et de le remettre à sa juste place. Il est indéniable qu’Internet est devenu une arme puissante et que c’est une aide opérationnelle et stratégique significative pour les militants. Soulignons cependant, que l’Internet est avant tout un média, et que la radicalisation ne dépend pas de la technologie, mais bien des messages reçus et envoyés. Il convient donc d’examiner les raisons de la radicalisation islamique constatée au Royaume-Uni, durant ces dernières années. Cette approche doit fournir un contrepoids nécessaire à la tendance qu’ont les spécialistes de la lutte antiterroriste, et ceux qui travaillent dans le secteur de « la sécurité », à ignorer l’environnement dans lequel la technologie existe et est employée. Ainsi, qui sont les militants islamistes ?
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