Le nouveau contexte stratégique
Je voudrais vous présenter une réflexion essentiellement prospective dans la mesure où, aujourd’hui, nous nous trouvons dans une situation marquée par nombre d’incertitudes, d’imprévisibilité, de sorte que je souhaite raisonner sur des horizons relativement lointains, de l’ordre de 2015, tout en projetant l’analyse au-delà de cette date.
Hier, la situation se caractérisait par la bipolarisation exercée par deux grandes puissances ayant des projets totalement antagonistes. Cette bipolarité était extrêmement contraignante pour les degrés de liberté d’action des autres États, à commencer par la France qui souhaitait disposer d’une marge de manœuvre qui lui soit propre. Autre caractéristique : nous avions affaire à l’Union soviétique, dont la menace était constituée par un couple d’idéologie et de forces militaires tout à la fois nucléaires et classiques, sans oublier le caractère central de son projet matérialiste et messianique. Résultat de cette situation : une Europe brisée, polarisée sur deux systèmes d’alliance, l’Otan et le Pacte de Varsovie, mais avec la tentative française de dégager une spécificité avec des moyens qui lui soient propres, non pas seulement concernant l’indépendance nationale, mais aussi l’autonomie de décision stratégique.
Dans un contexte de cette sorte, la dissuasion nucléaire devenait le mode stratégique dominant et constituait la posture qui, tant dans le domaine de la définition du projet politique que dans la formation des forces, ne pouvait qu’accaparer l’essentiel de nos activités et tenir finalement le devant de la scène. Par rapport au projet politique gaullien, il était clair qu’il s’agissait d’utiliser la dissuasion nucléaire pour dégager un degré supplémentaire de liberté d’action aussi bien politique que militaire. D’où la posture particulière de la dissuasion nucléaire française, du faible au fort, c’est-à-dire la volonté de placer nos forces nucléaires à un niveau qui soit cohérent avec notre situation, avec le volume des moyens dont nous pouvions disposer, autrement dit l’instauration d’une suffisance stratégique adaptée.
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