Cette semaine, la RDN revient sur la tenue à Paris, à l'initiative de la France et de l'Inde, du Sommet pour l'action sur l'Intelligence artificielle. Entre usages éthiques et réflexions sur nos sociétés, ces nouvelles technologies – et donc les nouveaux usages – suscitent des interrogations culturelles, scientifiques, philosophiques et politiques auxquelles la France et l'Union européenne doivent répondre face aux géants américains et chinois, y compris dans le domaine de la défense.
Éditorial – Sommet pour l’action sur l’Intelligence artificielle : IA pour tous, tous pour IA ? (T 1682)
« Cette illustration représente un sommet futuriste sur l'intelligence artificielle, avec des scientifiques, des politiciens (sic) et des militaires réunis autour de technologies liées à l'IA, symbolisant la collaboration et l'innovation dans ce domaine. » - généré à l'aide de l'IA sur Le Chat de MistralAI après lui avoir demandé de trouver une illustration pour cet article.
Editorial —AI Action Summit: AI for All, All for AI?
This week, the RDN looks back at the holding of the Summit for AI Action Summit in Paris, initiated by France and India. Between ethical uses and reflections on our societies, these new technologies —and thus the new applications— raise cultural, scientific, philosophical, and political questions that France and the European Union must address facing of American and Chinese giants, including in the field of defense.
Depuis l’essor du logiciel grand public d’Intelligence artificielle (IA) générative et conversationnelle ChatGPT, créé par la société OpenAI en 2022, les outils d’IA et leur utilisation sont sur toutes les lèvres. Si bien que l’IA suscite, certes, une fascination mais, surtout, de l’inquiétude dans divers secteurs, allant de l’art et la culture jusqu’aux domaines les plus stratégiques de l’État, et les armées au premier chef.
S’il est trop tôt pour considérer que l’IA constitue pleinement une technologie de rupture (tant son utilisation est encore relative), force est de constater que les acteurs politiques, économiques, industriels ou sociaux qui la manieront (voire la contrôleront) auront un coup d’avance sur ceux qui s’en éloigneraient. C’est tout l’objet du Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle, organisé au Grand Palais à Paris par la France et l’Inde, du 6 au 11 février. Rassemblant des acteurs scientifiques, culturels, industriels, économiques et politiques (le 11 février est la journée consacrée aux actions politiques), l’enjeu est de mettre en avant une vision éthique de cette nouvelle technologie. Entre la création d’une « IA de confiance », la volonté de mise en place d’une « IA au service de l’intérêt public » ainsi qu’une « gouvernance mondiale de l’IA », les termes sont posés.
À la suite de la prise de position de plus en plus offensive du monde de la tech américaine et, plus particulièrement, d’Elon Musk (patron de Tesla, SpaceX ou encore du réseau social X), après l’élection de Donald Trump, difficile de ne pas y voir l’ombre de l’homme le plus riche de l’histoire. Si Donald Trump a préféré envoyer son Vice-Président J. D. Vance et qu’Elon Musk est absent de ce sommet, sa présence médiatique se fait bien ressentir avec, par exemple, le lancement d’une OPA hostile de ce dernier sur OpenAI de près de 100 milliards de dollars. Sam Altman, co-fondateur d’OpenAI et membre de son conseil d’administration a immédiatement refusé. La guerre économique a aussi lieu dans le domaine des nouvelles technologies.
L’intelligence artificielle constitue-t-elle cette révolution que d’aucuns annoncent ? L’investissement annoncé par le président de la République, Emmanuel Macron, de 109 milliards d’euros est-il suffisamment audacieux et crédible pour faire de la France et de l’Union européenne des acteurs majeurs de l’IA ? Quelle éthique de l’IA ? Quelle menace ou chance pour l’emploi ? Si l’on s’inquiète de la perte de son emploi qui serait remplacé par un outil d’intelligence artificielle, on peut espérer que la mise en place des infrastructures inhérentes à l’IA (serveurs, etc.) puisse, elle, être porteuse d’emplois, comme l’affirme Xavier Niel, président du groupe Iliad (Free, entre autres). Toute innovation est bonne à prendre, sans aller dans l’entière aliénation. L’intelligence artificielle ne remplacera pas l’intelligence humaine : son fonctionnement repose, justement, sur cette dernière. Les questions qui se posent aujourd’hui pour les auteurs, les créateurs, les employés du tertiaire se posaient déjà à l’heure de l’automatisation et de la robotisation des champs de bataille pour nos armées. L’utilisation des drones, permettant d’effectuer de la reconnaissance voire de tuer sans personnel à bord a été (et constitue toujours) l’exemple type du débat éthique, politique et philosophique au sein de nos armées et des états-majors, ainsi que de nos sociétés occidentales.
Quelle utilisation de l’IA pour nos armées, pour la défense ? Le monde militaire ne s’éloigne pas de ces innovations provenant du civil et, au contraire, s’y intéresse pleinement. Le ministère des Armées s’est doté de l’Agence ministérielle pour l’IA de défense (Amiad) en mai 2024 et prend à bras-le-corps cette question de l’innovation, majeure pour notre défense et notre souveraineté. Dans le cadre du sommet pour l’action sur l’Intelligence artificielle, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a donné une conférence à l’École militaire portant sur ces sujets : l’enjeu est de faire de la France une nation indépendante en matière d’IA, figure de proue de l’Union européenne dans ce domaine. Les mots et les objectifs sont donc posés, l’enjeu sera de les atteindre dans cette nouvelle conflictualité économique et technologique où de nombreux acteurs s’affrontent pour maîtriser et mettre à disposition des outils qui tendent à prendre toujours plus de place dans les utilisations quotidiennes, civiles comme militaires. Les États-Unis investissent, les Chinois aussi – le lancement de DeepSeek, un « ChatGPT chinois », moins cher à développer, a suscité de nombreuses réactions (notamment en matière de données) –, l’Europe ne doit pas suivre, mais être à l’initiative.
La doctrine de défense française saura, elle, être à l’initiative. Forte de ses centres de recherches, de son Agence pour l’innovation de défense (AID) et d’autres organismes, grâce, également, à la Loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030 et à l’inscription de l’influence comme nouvelle fonction stratégique depuis 2022 (Revue nationale stratégique), il est encore temps de monter et de rester dans le train, de ne pas se laisser distancer sur l’enjeu de l’intelligence artificielle. Il faut toutefois se décider rapidement : nos adversaires stratégiques et, maintenant, économiques, n’attendront pas que tout le monde soit monté pour faire avancer le TGV « Intelligence artificielle ».
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Ayant demandé à l'intelligence artificielle générative Le Chat du Français MistralAI une illustration correspondant à cet éditorial, le logiciel a généré, en moins de 5 secondes, l'image d'illustration de l'éditorial. Lui demandant de corriger son illustration en retirant la notion de « sommet », voici l'image qu'il a générée, en précisant : « Cette illustration montre des technologies liées à l'IA, telles que des robots, des drones et des interfaces holographiques, en mettant l'accent sur la collaboration et l'innovation dans le domaine de l'IA. »
(Image générée à l'aide de l'intelligence artificielle / Le Chat par MistralAI)