Otan - Après la session ministérielle du Conseil atlantique et la conférence des Bahamas - L'Espagne à l'Otan ? - Le départ du général Norstad
La session ministérielle du Conseil Atlantique, qui s’est tenue à Paris, du 12 au 15 décembre 1962, ne devait en principe aboutir à aucun résultat spectaculaire. M. Dean Rusk, Secrétaire d’État, avait lui-même déclaré, à son départ de Washington, que cette réunion aurait simplement pour objet « un examen général des responsabilités de l’Otan ». En outre, il eût été difficile aux ministres de quinze puissances de venir en trois jours à bout des problèmes sur lesquels leurs experts se penchent à longueur d’année sans trouver de moyen terme entre les vues divergentes de ceux qui réclament plus d’armes conventionnelles et de ceux qui, au contraire, par l’accession à la puissance nucléaire, voudraient retrouver l’autonomie stratégique. En fait, le communiqué officiel par lequel s’est terminée cette session ne va pas au-delà de considérations générales, et d’affirmations trop unanimes pour que leur formulation ne masque pas des divergences de vues, voire des oppositions. Mais il ne faut pas se contenter de ce communiqué.
Il s’agissait surtout d’entériner la transformation de la scène internationale provoquée par la retraite soviétique dans la crise cubaine. À cet égard, la politique du Président Kennedy a été approuvée à l’unanimité, et MM. Erquin (Turquie) et Piccioni (Italie) n’ont eu guère de peine à faire proclamer qu’une fois de plus la fermeté s’est révélée payante face à l’Est. On pouvait se demander pourtant si M. Dean Rusk ne s’entendrait pas reprocher d’avoir non « consulté » les alliés des États-Unis, mais de les avoir simplement « informés ». Tous les ministres des Affaires étrangères ont été d’accord : la situation exigeait une rapidité et une discrétion totales, il fallait que Moscou fût incapable de prévenir la démarche américaine et n’en fût informé qu’au moment même où elle avait lieu – autrement c’est Moscou qui aurait dû s’engager et, du même coup, accroître les risques que Washington ne pouvait pas ne pas prendre. Pour la première fois, peut-être, les alliés des États-Unis ont pris conscience de cette « logique nucléaire » qui, aujourd’hui, domine l’ensemble des rapports Est-Ouest.
Mais – et c’est alors que la discussion « déboucha » sur les problèmes posés par la réorganisation du potentiel nucléaire de l’Alliance – de leur succès dans l’affaire cubaine, les Américains concluaient à la nécessité d’un effort supplémentaire de l’Europe dans le domaine des armes conventionnelles, à l’exclusion de tout effort nucléaire : selon eux, la retraite de M. Khrouchtchev en une zone où les États-Unis possédaient une écrasante supériorité en armes classiques apportait la preuve qu’ils avaient raison de demander à leurs alliés un renforcement, du potentiel non nucléaire de l’Otan. Cette retraite confirmait selon eux les idées de MM. Kissinger et Nitze : l’improbabilité d’un affrontement thermonucléaire lorsque le rapport enjeu-risque n’est pas vital pour les deux Grands (l’enjeu cubain n’était pas vital pour l’URSS, donc le risque cubain était disproportionné, donc la menace d’un recours à l’arsenal thermonucléaire devenait peu crédible) rend plus impérieuse la nécessité d’un renforcement des moyens de dissuasion non nucléaires. Pour la première fois, les idées relatives à l’« assouplissement » de la dissuasion avaient trouvé un point d’application, et elles s’étaient révélées justes.
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